Dans ce texte extrait de Voyage au centre de la Terre de Jules Verne, quel motif pousse les personnages à aller vers l'inconnu ?
- Voici ce que je décide, répliqua le professeur Lidenbrock en prenant ses grands airs : c'est que ni toi ni personne ne sait d'une façon certaine ce qui se passe à l'intérieur du globe, attendu qu'on connaît à peine la douze-millième partie de son rayon ; c'est que la science est éminemment perfectible, et que chaque théorie est incessamment détruite par une théorie nouvelle. N'a-t-on pas cru jusqu'à Fourier que la température des espaces planétaires allait toujours diminuant, et ne sait-on pas aujourd'hui que les plus grands froids des régions éthérées ne dépassent pas quarante ou cinquante degrés au-dessous de zéro ? Pourquoi n'en serait-il pas ainsi de la chaleur interne ? Pourquoi, à une certaine profondeur, n'atteindrait-elle pas une limite infranchissable, au lieu de s'élever jusqu'au degré de fusion des minéraux les plus réfractaires ?
Dans ce texte extrait de Voyage au bout de la nuit de Louis-Ferdinand Céline, quel motif pousse le narrateur à aller vers l'inconnu ?
Ça n'a pas traîné. Dans cette stabilité désespérante de chaleur, tout le contenu humain du navire s'est coagulé dans une massive ivrognerie. On se mouvait mollement entre les ponts, comme des poulpes au fond d'une baignoire d'eau fadasse. C'est depuis ce moment que nous vîmes à fleur de peau venir s'étaler l'angoissante nature des blancs, provoquée, libérée, bien débraillée enfin, leur vraie nature, tout comme à la guerre. Étuve tropicale pour instincts tels crapauds et vipères qui viennent enfin s'épanouir au mois d'août sur les flancs fissurés des prisons. Dans le froid d'Europe, sous les grisailles pudiques du Nord, on ne fait, hors des carnages, que soupçonner la grouillante cruauté de nos frères, mais leur pourriture envahit la surface dès que les émoustille la fièvre ignoble des tropiques.
Dans ce texte extrait de Voyage autour du monde de Louis-Antoine de Bougainville, quel motif pousse le narrateur à aller vers l'inconnu ?
Ici, une douce oisiveté est le partage des femmes, et le soin de plaire leur plus sérieuse occupation. Je ne saurais assurer si le mariage est un engagement civil ou consacré par la religion, s'il est indissoluble ou sujet au divorce. Quoi qu'il en soit, les femmes doivent à leurs maris une soumission entière: elles laveraient dans leur sang une infidélité commise sans l'aveu de l'époux. Son consentement, il est vrai, n'est pas difficile à obtenir, et la jalousie est ici un sentiment si étranger que le mari est ordinairement le premier à presser sa femme de se livrer. Une fille n'éprouve à cet égard aucune gêne; tout l'invite à suivre le penchant de son cœur ou la loi de ses sens, et les applaudissements publics honorent sa défaite. Il ne semble pas que le grand nombre d'amants passagers qu'elle peut avoir eu l'empêche de trouver ensuite un mari.
Dans ce texte extrait de Bourlinguer de Blaise Cendrars, quel motif pousse le narrateur à aller vers l'inconnu ?
Écrire n'est pas mon ambition, mais vivre. J'ai vécu. Maintenant j'écris. Mais je ne suis pas un pharisien qui se bat la poitrine parce qu'il se met dans un livre. Je m'y mets avec les autres et au même titre que les autres. Un livre aussi c'est la vie. Je ne suis qu'un con. Et la vie continue. Et la vie recommence. Et la vie entraîne tout.
Dans ce texte extrait de L'Usage du monde de Nicolas Bouvier, quel motif pousse le narrateur à aller vers l'inconnu ?
C'est la contemplation silencieuse des atlas, à plat ventre sur le tapis, entre dix et treize ans, qui donne ainsi l'envie de tout planter là. Songez régions comme le Banat, la Caspienne, le Cachemire, aux musiques qui y résonnent, aux regards qu'on y croise, aux idées qui vous y attendent... Lorsque le désir résiste aux premières atteintes du bon sens, on lui cherche des raisons. Et on en trouve qui ne valent rien. La vérité, c'est qu'on ne sait comment nommer ce qui vous pousse. Quelque chose en vous grandit et détache les amarres, jusqu'au jour où, pas trop sûr de soi, on s'en va pour de bon.
Dans ce poème extrait des Fleurs du Mal de Charles Baudelaire, quel motif pousse le narrateur à aller vers l'inconnu ?
Mon enfant, ma sœur,
Songe à la douceur
D'aller là-bas vivre ensemble !
Aimer à loisir,
Aimer et mourir
Au pays qui te ressemble !
Les soleils mouillés
De ces ciels brouillés
Pour mon esprit ont les charmes
Si mystérieux
De tes traîtres yeux,
Brillant à travers leurs larmes.
Là, tout n'est qu'ordre et beauté,
Luxe, calme et volupté.
Dans ce texte extrait de L'autre monde ou les états et empires de la lune de Cyrano de Bergerac, quel motif pousse le narrateur à aller vers l'inconnu ?
Je restai bien surpris de me voir tout seul au milieu d'un pays que je ne connaissais point. J'avais beau promener mes yeux, et les jeter par la campagne, aucune créature ne s'offrait pour les consoler. Enfin, je résolus de marcher, jusques à ce que la Fortune me fît rencontrer la compagnie de quelque bête ou de la mort.
Elle m'exauça car au bout d'un demi-quart de lieue je rencontrai deux fort grands animaux, dont l'un s'arrêta devant moi, l'autre s'enfuit légèrement au gîte (au moins, je le pensai ainsi à cause qu'à quelque temps de là, je le vis revenir accompagné de plus de sept ou huit cents de même espèce qui m'environnèrent). Quand je les pus discerner de près, je connus qu'ils avaient la taille, la figure et le visage comme nous. Cette aventure me fit souvenir de ce que jadis j'avais ouï conter à ma nourrice, des sirènes, des faunes et des satyres. De temps en temps ils élevaient des huées si furieuses, causées sans doute par l'admiration de me voir, que je croyais quasi-être devenu monstre.
Une de ces bêtes-hommes m'ayant saisi par le col, de même que font les loups quand ils enlèvent une brebis, me jeta sur son dos et me mena dans leur ville. Je fus bien étonné, lorsque je reconnus en effet que c'étaient des hommes, de n'en rencontrer pas un qui ne marchât à quatre pattes.
Dans ce texte extrait d'une lettre à Luis de Santangel, quel motif pousse le narrateur, Christophe Colomb, à aller vers l'inconnu ?
Cette île est, ainsi que toutes les autres, fertile au suprême degré, mais celle‑ci plus encore que les autres. Elle a sur la rive de la mer nombre de ports auxquels ceux de la Chrétienté que je connais ne sauraient être comparés, et à foison des fleuves si beaux et si grands que c'est merveille. Les terres de ces îles sont élevées, et on y rencontre beaucoup de sierras et d'immenses montagnes, incomparablement plus hautes que l'île de Ténériffe, toutes magnifiques, de mille formes, toutes accessibles et pleines d'arbres de mille essences, si hauts qu'ils semblent atteindre au ciel, et dont je me suis persuadé qu'ils ne perdent jamais leurs feuilles, selon ce que j'ai pu comprendre, les voyant aussi verts et aussi beaux qu'ils le sont au mois de mai en Espagne. Certains étaient en fleur, d'autres avaient leurs fruits, les autres se trou vaient en un état différent selon leur espèce. Et le rossignol et mille autres sortes d'oiseaux chantaient en ce mois de novembre partout où je suis passé.
Dans ce texte extrait du Livre des merveilles ou Le devisement du monde de Marco Polo, quel motif pousse le narrateur à aller vers l'inconnu ?
Quand nous commençâmes d'entrer parmi ces peuples barbares, il me fut avis, comme je l'ai déjà dit, que j'arrivais en un autre monde. Ils nous environnèrent tous à cheval, après qu'ils nous eurent fait attendre longtemps, pendant qu'ils étaient assis à l'ombre de leurs chariots noirs. La première chose qu'ils nous demandèrent fut si nous n'avions jamais été parmi eux ; et ayant su que non, ils commencèrent à nous demander effrontément de nos vivres : nous leur donnâmes de nos biscuits et du vin que nous avions apporté du lieu d'où nous étions partis, et en ayant vidé une bouteille, ils en demandèrent encore une autre, disant par risée qu'un homme n'entre pas en une maison avec un pied seul ; ce que nous leur refusâmes toutefois, nous excusant sur le peu que nous en avions. Alors ils s'enquirent d'où nous venions et où nous voulions aller : je leur répondis, comme j'ai dit ci-dessus, que nous avions ouï dire du prince Sartach qu'il était chrétien, que j'avais dessein d'aller le trouver, d'autant que j'avais à lui présenter les lettres de Votre Majesté : sur quoi ils me demandèrent fort si j'y allais de mon propre mouvement ou si j'étais envoyé par quelqu'un ; je répondis que personne ne m'avait contraint d'y aller et que je n'y fusse pas venu si je n'eusse pas voulu ; tellement que c'était de moi-même et de la volonté et permission de mon supérieur, car je me gardai bien de dire que je fusse envoyé par Votre Majesté.