Dans quelles phrases repère-t-on les marqueurs d'un élément de situation d'énonciation ?
« (1) Madame Vauquer, née de Conflans, est une vieille femme qui, depuis quarante ans, tient à Paris une pension bourgeoise établie rue Neuve Sainte-Geneviève, entre le Quartier latin et le faubourg Saint-Marceau. (2) Cette pension, connue sous le nom de la Maison Vauquer, admet également des hommes et des femmes, des jeunes gens et des vieillards, sans que jamais la médisance ait attaqué les mœurs de ce respectable établissement. (3) Mais aussi depuis trente ans ne s'y était-il jamais vu de jeune personne, et pour qu'un jeune homme y demeure, sa famille doit-elle lui faire une bien maigre pension. (4) Néanmoins, en 1819, époque à laquelle ce drame commence, il s'y trouvait une pauvre jeune fille. »
Honoré de Balzac, Le Père Goriot, 1835
Dans cet extrait du Père Goriot de Balzac, on repère des informations concernant les circonstances spatiales et temporelles de l'action, sans référence à la situation d'énonciation, c'est-à-dire le moment où le discours est produit. Dans la première phrase, l'action est située du point de vue spatial : « rue Neuve Sainte-Geneviève, entre le Quartier latin et le faubourg Saint-Marceau ». Dans la quatrième phrase, l'action est située du point de vue temporel « en 1819 ». La suite de la phrase « époque à laquelle ce drame commence » précise davantage le moment de l'action.
« (1) Vous recevrez cette lettre demain matin. (2) J'exige que demain, à sept heures du soir, vous soyez chez moi. (3) Je ne recevrai personne qu'à huit, pas même le régnant Chevalier : il n'a pas assez de tête pour une si grande affaire. (4) Vous voyez que l'amour ne m'aveugle pas. (5) À huit heures je vous rendrai votre liberté, et vous reviendrez à dix souper avec le bel objet ; car la mère et la fille souperont chez moi. (6) Adieu, il est midi passé : bientôt je ne m'occuperai plus de vous.
(7) Paris, ce 4 août 17… »
Pierre Choderlos de Laclos, Les Liaisons dangereuses, 1782
Dans cet extrait des Liaisons dangereuses, de Choderlos de Laclos, on repère des informations concernant les circonstances spatiales et temporelles, se référant à la situation d'énonciation, c'est-à-dire le moment où l'énoncé est produit. Dans la première phrase, la situation d'énonciation est indiquée, il s'agit d'une lettre : « Vous recevrez cette lettre demain matin ». Dans la sixième phrase, l'heure de la fin de l'écriture est précisée : « Adieu, il est midi passé ». La septième phrase précise davantage le lieu de l'écriture et la date de la lettre « Paris, ce 4 août 17… ».
« (1) Ô jeunesse, jeunesse ! (2) Je t'en supplie, songe à la grande besogne qui t'attend. (3) Tu es l'ouvrière future, tu vas jeter les assises de ce siècle prochain, qui, nous en avons la foi profonde, résoudra les problèmes de vérité et d'équité, posés par le siècle finissant. (4) Nous, les vieux, les aînés, nous te laissons le formidable amas de notre enquête, beaucoup de contradictions et d'obscurités peut-être, mais à coup sûr l'effort le plus passionné que jamais siècle ait fait vers la lumière, les documents les plus honnêtes et les plus solides, les fondements mêmes de ce vaste édifice de la science que tu dois continuer à bâtir pour ton honneur et pour ton bonheur. »
Émile Zola, Lettre à la jeunesse, 1897
Dans cet extrait de Lettre à la jeunesse de Zola, on repère des informations concernant l'énonciateur, le destinataire, et les circonstances temporelles se référant à la situation d'énonciation, c'est-à-dire le moment où l'énoncé est produit. Dans la première phrase, le destinataire de l'énoncé est indiqué, il s'agit de la jeunesse. Dans la deuxième phrase, l'énonciateur s'exprime à la 1re personne, c'est l'auteur. Dans la troisième phrase, le temps est précisé, la fin du XIXe siècle. La quatrième phrase précise davantage l'énonciateur, la génération des anciens, celle de l'auteur, qui s'adresse aux générations futures.
« MADAME PERNELLE.
(1) Laissez, ma bru, laissez ; ne venez pas plus loin ;
Ce sont toutes façons dont je n'ai pas besoin.
ELMIRE.
(2) De ce que l'on vous doit envers vous on s'acquitte.
(3) Mais, ma mère, d'où vient que vous sortez si vite ?
MADAME PERNELLE.
(4) C'est que je ne puis voir tout ce ménage-ci,
Et que de me complaire on ne prend nul souci.
(5) Oui, je sors de chez vous fort mal édifiée :
Dans toutes mes leçons j'y suis contrariée ;
On n'y respecte rien, chacun y parle haut,
Et c'est tout justement la cour du roi Pétaud. »
Molière, Tartuffe, 1669
Dans cet extrait de Tartuffe, de Molière, on repère des informations concernant les destinataires, et les circonstances spatiales se référant à la situation d'énonciation, c'est-à-dire le moment où le dialogue théâtral est produit. Dans la première phrase, le destinataire de Madame Pernelle est indiqué, il s'agit de sa bru (l'épouse de son fils), Elmire. Dans la troisième phrase, Madame Pernelle devient à son tour le destinataire d'Elmire, qui l'appelle « ma mère ». La cinquième phrase précise davantage le lieu de l'action, chez Elmire.
« (1) Je viens de m'éveiller en sursaut, poursuivi par elle et me disant : — Ah ! ce n'est qu'un rêve ! (2) — Hé bien ! avant même que mes yeux lourds aient eu le temps de s'entr'ouvrir assez pour voir cette fatale pensée écrite dans l'horrible réalité qui m'entoure, sur la dalle mouillée et suante de ma cellule, dans les rayons pâles de ma lampe de nuit, dans la trame grossière de la toile de mes vêtements, sur la sombre figure du soldat de garde dont la giberne reluit à travers la grille du cachot, il me semble que déjà une voix a murmuré à mon oreille : — Condamné à mort ! »
Victor Hugo, Le Dernier Jour d'un condamné, 1829
Dans cet extrait du roman Le Dernier Jour d'un condamné de Victor Hugo, on repère des informations concernant l'énonciateur, et les circonstances spatiales et temporelles se référant à la situation d'énonciation, c'est-à-dire le moment où l'énoncé est produit. Dans la première phrase, l'énonciateur s'exprime à la 1re personne, il vient de se réveiller, ce qui indique le moment de la situation d'énonciation. Dans la deuxième phrase, le temps est précisé, son sommeil est perturbé durant la nuit. Cette deuxième phrase précise aussi davantage le lieu, l'énonciateur est dans sa cellule, il est le narrateur condamné à mort.