Sommaire
IDe multiples échanges et mobilités autour des frontières françaisesALes échangesBLes mobilitésIILes flux transfrontaliers : obstacles et coopération européenneADes obstacles à surmonterBLa coopération interrégionale mise en œuvre par l'Union européenneIIIDes dynamiques différenciées dans les régions transfrontalièresALes régions transfrontalières les plus dynamiquesBLes régions transfrontalières moins dynamiques1Les régions transfrontalières du Sud2Les régions ultra-périphériquesLes pays de l'Union européenne qui ont une frontière commune avec la France sont la Belgique, le Luxembourg, l'Allemagne, l'Italie et l'Espagne. Ces régions frontalières sont caractérisées par des échanges et des mobilités. L'Union européenne encourage ces échanges et ces mobilités. Les régions transfrontalières entre la France et les autres pays membres ont des dynamiques très différentes.
Comment les espaces transfrontaliers incluant la France sont-ils devenus des espaces dynamiques au sein du territoire de l'Union européenne ?
De multiples échanges et mobilités autour des frontières françaises
On assiste depuis quelques dizaines d'années à une intensification de l'intégration des États membres avec leurs pays voisins. Cette dynamique se traduit en particulier par la multiplication des flux de marchandises et des mobilités de travailleurs de part et d'autre des frontières communes. C'est le cas aux frontières de la France.
Les échanges
Avec la création du marché unique et l'ouverture des frontières, les flux commerciaux entre la France et les autres pays membres de l'Union européenne se sont multipliés. La France effectue la majorité de ses échanges commerciaux avec les pays de l'Union européenne (plus de 50 % des exportations et des importations du pays). Les principaux partenaires sont des pays frontaliers. Les régions transfrontalières sont devenues des territoires animés par de multiples échanges économiques : marchandises, investissements ou encore tourisme.
Avec la proximité géographique, la création du marché unique a fortement favorisé les échanges commerciaux entre pays de l'Union européenne.
La France effectue de nombreux échanges avec les pays de l'UE.
Le premier partenaire commercial de la France est l'Allemagne, avec laquelle elle réalise environ 15 % de ses échanges commerciaux.
Les échanges entre la France et les autres pays de l'UE varient.
La France : les dynamiques différenciées des territoires transfrontaliers
D'après l'Insee
2019
Les régions frontalières françaises sont des territoires privilégiés par les entreprises des pays voisins pour y investir.
L'Allemagne est le premier investisseur étranger dans la région Grand Est, les entrepreneurs allemands investissent notamment en Alsace où la population pratique l'allemand.
Les entreprises investissent dans de nouvelles technologies, des universités ou des centres de recherche situés dans deux pays frontaliers afin de mettre leurs travaux en commun.
En 2011, le projet Tandem réunit des PME, des centres de recherche et des institutions d'enseignement supérieur de la région française du Nord-Pas-de-Calais et de la province de Flandre-Occidentale (Belgique). La recherche porte sur le domaine du bâtiment durable, des énergies renouvelables, de la gestion de l'eau et des NTIC.
Le tourisme est un autre secteur économique dans lequel se développent des liens entre la France et les pays transfrontaliers, avec l'élaboration d'offres touristiques communes de part et d'autre des frontières.
Le projet Green Pyrenees Slow Tourism regroupe des communes françaises et espagnoles pour la valorisation du tourisme vert avec une stratégie de développement d'un tourisme durable.
Les mobilités
Les mobilités humaines sont importantes dans les régions transfrontalières entre la France et les pays autour d'elle. De nombreuses mobilités quotidiennes concernent les travailleurs français qui traversent la frontière pour exercer un emploi dans un autre pays. On observe également des déplacements de personnes pour les loisirs, le commerce ou des raisons scolaires ou médicales.
Plus de la moitié des travailleurs français frontaliers qui résident en France traversent la frontière pour leur travail. Ils se rendent surtout en Suisse.
Près de 180 000 Français résidant à la frontière franco-suisse travaillent en Suisse.
Les autres principaux pays de travail font partie de l'Union européenne :
- Le Luxembourg accueille 75 000 travailleurs.
- L'Allemagne accueille 45 000 travailleurs.
- La Belgique accueille 35 000 travailleurs.
© espaces-transfrontaliers.org
Plus de 360 000 Français vont travailler dans des pays voisins.
Plusieurs raisons expliquent ces mobilités pour le travail :
- L'ouverture des frontières et les infrastructures de transport facilitent les déplacements quotidiens.
- Le niveau des salaires est plus élevé dans certains pays frontaliers.
- Il y a plus d'emplois dans certains pays frontaliers.
Le profil des travailleurs frontaliers varie selon le pays de destination :
- Près de la moitié des frontaliers qui travaillent en Allemagne et en Belgique sont des ouvriers de l'industrie. Ce sont majoritairement des hommes, plutôt âgés (plus de 20 % ont plus de 55 ans).
- Les frontaliers qui travaillent en Suisse ou au Luxembourg sont surtout des cadres d'entreprises, ils sont plus jeunes et sont davantage employés dans le secteur des services.
Les mobilités concernent également des élèves qui sont scolarisés dans un établissement étranger.
Les mobilités transfrontalières concernent également les déplacements des habitants des régions frontalières qui se rendent dans le pays voisin pour les loisirs ou pour effectuer des achats de consommation courante. L'offre de produits est différente et certains produits sont moins chers.
Les cigarettes, l'alcool ou l'essence sont vendus moins cher au Luxembourg.
Dans le magasin Ikea à Sterpenich au Luxembourg :
- 60 % de la clientèle est luxembourgeoise ;
- 27 % de la clientèle est belge ;
- 10 % de la clientèle est française.
Les mobilités transfrontalières concernent également l'accès à des établissements de santé.
Sur le plateau de Cerdagne, coupé en deux par la frontière entre le département français des Pyrénées-Orientales et la province espagnole de Catalogne, un hôpital a ouvert ses portes en 2014.
Les flux transfrontaliers : obstacles et coopération européenne
Les obstacles qui freinent les échanges transfrontaliers sont multiples. Ils sont géographiques, culturels, économiques et institutionnels. La coopération territoriale européenne a cependant favorisé ces échanges par la multiplication de projets entre les pays membres.
Des obstacles à surmonter
Il existe plusieurs obstacles au développement des flux dans les régions transfrontalières : des obstacles juridiques et administratifs, des obstacles linguistiques, des obstacles physiques (montagnes) et des obstacles d'infrastructures (impossibilité de se déplacer facilement).
Les premiers obstacles aux mobilités et aux échanges transfrontaliers sont d'ordres juridique et administratif :
- Les qualifications et les diplômes ne sont pas forcément reconnus dans les pays voisins.
- Les régimes sociaux sont différents (critères d'accès aux prestations sociales en tant que travailleur frontalier).
- Les règles fiscales, juridiques ou administratives sont différentes (droit du travail, assurances professionnelles, responsabilité civile, normes de sécurité, impôts, etc.).
Les Français qui travaillent dans les pays voisins ont un régime de retraite nettement moins avantageux qu'en France, en termes de compensation financière comme de durée.
Les mobilités professionnelles peuvent être pénalisées par les obstacles linguistiques.
Lors d'une enquête publique réalisée en 2015 auprès des habitants des régions transfrontalières de l'Union européenne, 38 % des personnes interrogées ont mentionné l'obstacle linguistique.
Les frontières avec l'Espagne et l'Italie sont les plus difficiles à traverser car elles se situent dans des régions montagneuses, dans les Pyrénées et les Alpes.
© Wikimedia Commons/© Wikiwand
Les carences des infrastructures de transport rendent difficile l'accès aux pays voisins et pénalisent les échanges et les mobilités.
La différence d'écartement des rails en France et en Espagne freine l'essor du transport ferroviaire transfrontalier.
La coopération interrégionale mise en œuvre par l'Union européenne
La coopération interrégionale mise en œuvre par l'Union européenne vise à réduire les obstacles aux flux dans les régions transfrontalières. L'Union européenne a ainsi mis en place des programmes qui contribuent au rapprochement des États communautaires. Quatre programmes de coopération interrégionale sont actuellement en cours au profit des régions transfrontalières de l'Union européenne : Interreg Europe, Interact, URBACT. De multiples programmes de coopération régionale dans le domaine des transports, de l'éducation ou encore de la protection de l'environnement voient le jour.
- Interreg Europe : financé par le Fonds européen de développement régional (FEDER). Interreg Europe organise la coopération entre les régions européennes avec un volet spécifique pour la coopération transfrontalière.
- Interact : programme qui accompagne les acteurs de la coopération interrégionale par des conseils sur les procédures à suivre, les outils à disposition, la diffusion de l'information sur les projets les plus innovants.
- URBACT : programme qui vise la mise en réseau et le développement durable des villes européennes.
- ESPON : programme qui vise le développement de la recherche scientifique (création de bases de données, de cartes et d'atlas) au service de l'aménagement des territoires.
Les régions frontalières partenaires dans la coopération transfrontalière forment des eurorégions.
Interreg est l'instrument majeur de la coopération transfrontalière. Les budgets alloués aux régions concernées concernent 4 axes prioritaires :
- le soutien à la croissance économique (aide aux PME, essor de la recherche et de l'innovation) ;
- la protection des citoyens (lutte contre la pauvreté, aide à l'emploi et à la mobilité, amélioration de la formation) ;
- la protection de l'environnement (réduction de la consommation en carbone, lutte contre le changement climatique, gestion des risques) ;
- l'amélioration de la coordination des institutions et des administrations publiques.
© espaces-transfrontaliers.org
Grâce aux aides apportées, plusieurs projets ont vu le jour, notamment dans les transports.
La liaison ferroviaire Lyon-Turin est un projet de ligne de chemin de fer traversant les Alpes.
© transalpine.com
Certains projets concernent l'éducation et l'enseignement.
Le projet « Réussir sans frontière » entre la France, la Suisse et l'Allemagne incite les collèges, lycées et CFA à développer l'apprentissage transfrontalier en fonction des besoins des pays voisins.
D'autre projets concernent l'environnement.
Le projet VéloViso entre la France et l'Italie vise le développement du cyclotourisme de part et d'autre de la frontière par l'aménagement de 125 parcours qui représentent un total de 3 000 kilomètres.
Des dynamiques différenciées dans les régions transfrontalières
Les régions transfrontalières les plus dynamiques
Les régions transfrontalières qui sont intégrées à la mégalopole européenne, ainsi que les régions métropolisées, sont les plus dynamiques. Leur PIB/habitant est plus élevé, les échanges sont facilités, les mobilités sont nombreuses.
Les régions intégrées à la mégalopole européenne sont les régions qui ont le PIB/habitant le plus élevé. Les flux de travailleurs français y sont les plus importants. C'est le cas des régions transfrontalières avec le Luxembourg, l'Allemagne ou la Suisse.
Les régions métropolisées se trouvent le long de la frontière est de la France. Ces régions transfrontalières sont proches de métropoles européennes qui multiplient les flux entre elles. Les villes transfrontalières coopèrent de plus en plus dans les domaines universitaire et scientifique. Leur proximité permet la coopération des laboratoires et des centres de recherche, des liens se tissent entre les universités.
Les universités de Strasbourg, Mulhouse, Bâle, Freiburg et Karlsruhe constituent un vaste campus européen et permettent aux étudiants de partager leur cursus, d'avoir accès aux ressources et aux bibliothèques de chacune des universités (travaux de recherche).
Le dynamisme de ces aires métropolitaines repose sur l'efficacité des infrastructures de transport transfrontalières. Les mobilités sont d'autant plus nombreuses qu'elles sont facilitées par la création de réseaux de transport en commun, qui évitent la saturation des voies routières et autoroutières.
Dès 1997, le tramway de Saarbrücken en Allemagne a été prolongé sous forme de tram-train vers Sarreguemines en France, ce qui permet de relier les deux centres-villes.
Tram-train de la Saarbahn à Sarreguemines
© Wikimedia Commons
Les régions transfrontalières moins dynamiques
Les régions transfrontalières les moins dynamiques se trouvent dans le Sud ou dans les régions ultra-périphériques. Elles sont pénalisées par un PIB/habitant moins important, un taux de chômage qui peut être élevé, le vieillissement marqué de leur population ainsi qu'une ruralité plus prononcée.
Les régions transfrontalières du Sud
Les régions transfrontalières du Sud, entre la France et l'Espagne et entre la France et l'Italie, ont des économies moins performantes et doivent faire face à une pluralité de difficultés. Le dynamisme n'est pas très important même si des projets existent entre les pays. Les régions littorales de ces régions transfrontalières sont favorisées.
- Les Alpes et les Pyrénées constituent des barrières naturelles avec des points de passage peu nombreux.
- La situation socio-économique n'est pas favorable aux échanges. Les régions françaises frontalières de l'Espagne et de l'Italie sont marquées par une tendance au vieillissement de leur population et un taux de chômage plus élevé. De nombreux territoires sont marqué par le faible peuplement et la ruralité. La situation du marché du travail en Espagne et en Italie est un autre frein pour les flux de travailleurs français vers les régions frontalières de ces pays.
Seulement 5 000 Français de Nouvelle-Aquitaine ou d'Occitanie travaillent en Espagne.
Moins de 500 Français travaillent en Italie.
La frontière franco-italienne est la seule où il y a plus de flux de travailleurs en direction de la France que de flux au départ de la France.
Des échanges existent cependant entre les territoires ruraux de ces régions, notamment pour prévenir les risques naturels.
En 2013, suite à des inondations liées à la crue de la Garonne (qui prend sa source en Espagne), les communes françaises et espagnoles de la région ont signé une convention de coopération transfrontalière pour l'achat groupé d'équipements de surveillance des cours d'eau afin de mieux prévenir les risques d'inondation.
Des projets pour la protection de l'environnement, la promotion du tourisme vert et de l'agriculture existent également.
La réserve naturelle nationale de Ristolas-Mont Viso dans le parc naturel régional du Queyras
© Wikiwand
Le Parc naturel régional du Queyras, en France, coopère depuis plusieurs décennies avec quatre parcs naturels situés du côté italien du massif pour le développement du tourisme vert.
Les zones littorales de ces régions transfrontalières sont les plus propices aux flux et mobilités transfrontalières. Ce sont des territoires plus peuplés, plus urbanisés et mieux équipés en infrastructures de transport. Les échanges transfrontaliers y sont quotidiens.
Le littoral catalan entre la France et l'Espagne est dynamique. Les villes de Perpignan et Gérone sont reliées par un réseau LGV.
© Wikipédia
Les régions ultra-périphériques
Les régions ultra-périphériques sont les territoires ultra-marins français. Ils ont pour la plupart des frontières maritimes avec d'autres États. Des programmes de financement existent pour développer des échanges avec les pays transfrontaliers. Ces régions transfrontalières restent toutefois peu dynamiques.
Les territoires ultra-marins bénéficient du programme Interreg. C'est le cas pour les territoires ultra-marins dans l'océan Indien, dans les Caraïbes ou en Amazonie.
Dans l'océan Indien, le plan Interreg 2014-2020 finance la coopération transfrontalière entre les territoires des Comores, de Madagascar, de Maurice et des Seychelles.
Des projets sont mis en place dans certaines régions transfrontalières.
L'île de Saint-Martin est un territoire ultra-marin français. Le Nord est une Collectivité d'outre-mer (COM) française qui a le statut de région ultra-périphérique de l'Union européenne. Des tentatives ont lieu pour développer une coopération transfrontalière avec la partie sud, Sint Maarten, qui appartient aux Pays-Bas :
- Un programme de prévention contre le risque cyclonique a été mis en place, avec l'installation d'un réseau de radars météorologiques.
- Les deux régions coopèrent dans le développement des énergies propres, en exploitant le potentiel géothermique de l'île.
Toutefois, ces régions restent assez peu dynamiques. Les principaux défis que ces territoires doivent relever sont :
- leur éloignement ;
- leur insularité et leur manque d'espace, accru par leurs reliefs montagneux ;
- leur climat (ce sont des territoires soumis au risque de cyclone) ;
- leur forte dépendance économique vis-à-vis de la métropole pour l'approvisionnement en marchandises ;
- leur économie trop tournée vers l'agriculture et surtout vers le tourisme, pénalisée par le manque d'industries.