Sommaire
IReconnaître une frontière : la frontière germano-polonaise de 1939 à 1990ALa Pologne déchirée entre l'Allemagne nazie et l'URSSBLa reconnaissance de la frontière germano-polonaise au début de la guerre froideCVers une reconnaissance de la frontière germano-polonaise : de l'Ostpolitik à la réunification allemande (1970-1990)IIDépasser les frontières : le droit de la merADe l'unité au partage juridique des espaces maritimesBLa puissance maritime, reflet et projection de la puissance terrestreCLes espaces maritimes : des enjeux géopolitiques majeursLa frontière est une délimitation politique qui sépare deux États. Le tracé et la fixation des frontières sont des enjeux géopolitiques majeurs. Reconnaître une frontière est soit un choix, soit la conséquence de conflits ou de négociations diplomatiques : c'est ce qu'illustre la frontière germano-polonaise, dont le tracé et la reconnaissance ont évolué entre 1939 et 1990. On peut aussi dépasser les frontières : c'est ce qu'illustre le droit de la mer, qui questionne les frontières entre les États.
Pourquoi le tracé de la frontière germano-polonaise a-t-il été l'objet d'un débat marqué par l'instabilité, la conflictualité et la négociation entre 1939 et 1990, entre la Pologne et l'Allemagne, puis entre les deux Allemagnes et les grandes puissances ?
Dans quelle mesure les délimitations des espaces maritimes sont-elles des enjeux géopolitiques majeurs entre les puissances, et quelles sont leurs formes et leurs fonctions ?
Reconnaître une frontière : la frontière germano-polonaise de 1939 à 1990
La Pologne a connu une histoire difficile. Du XVe au XVIIe siècle, la Pologne a été un royaume puissant mais, au XVIIIe siècle, elle est déchirée entre ses trois voisins : l'empire de Russie, le royaume de Prusse et l'empire d'Autriche. En 1795, la Pologne disparaît en tant qu'État. On assiste à une renaissance de la Pologne à l'issue de la Première Guerre mondiale avec la proclamation de son indépendance le 11 novembre 1918. Cette frontière est de nouveau remise en cause lorsque les Allemands envahissent la Pologne en septembre 1939, déclenchant la Seconde Guerre mondiale. La Pologne va alors être divisée entre deux régimes totalitaires : l'Allemagne nazie et l'URSS. La frontière germano-polonaise devient un véritable enjeu au moment de la guerre froide. Elle est enfin reconnue lorsque la réunification des deux Allemagnes est rendue possible.
La Pologne déchirée entre l'Allemagne nazie et l'URSS
Le traité de Versailles de 1919 impose entre la Pologne et l'Allemagne de nouvelles frontières qui sont mal perçues par cette dernière. Après son arrivée au pouvoir en 1933, Hitler remet très vite en question la frontière germano-polonaise. En 1939, l'Allemagne nazie et l'URSS signent un pacte par lequel les deux pays se laissent, en secret, la possibilité de se partager la Pologne.
Les frontières de l'Allemagne et de la Pologne sont un tracé problématique et une source de tensions. En 1919, le traité de Versailles fait de la ville de Dantzig une ville libre sous contrôle de la SDN et crée un couloir pour permettre à la Pologne d'avoir un accès à la mer Baltique, coupant l'Est de l'Allemagne en deux. Ce couloir est une source de mécontentements et de revendications pour les nationalistes allemands, notamment les nazis, et devient un symbole de l'humiliation de l'Allemagne par les Alliés.
De plus, le rattachement de la Haute-Silésie, peuplée d'Allemands, à la Pologne en 1921 aggrave les tensions entre la Pologne et l'Allemagne. Adolf Hitler, arrivé au pouvoir en 1933, se fixe un objectif en politique étrangère : la révision du traité de Versailles, même par la force, à laquelle il ajoute la volonté de construire un « espace vital » à l'est de l'Europe et donc notamment en Pologne.
Quand, en août 1939, l'Allemagne et l'URSS signent un pacte, c'est la stupeur en Europe. Ce pacte germano-soviétique est composé d'un accord de non-agression entre l'Allemagne nazie et l'URSS, mais aussi d'un protocole secret où le partage de la Pologne est clairement envisagé. Le 1er septembre 1939, la Pologne est envahie par l'Allemagne, suivie le 17 septembre par l'URSS. La Pologne est annexée par les deux puissances victorieuses. La Pologne, en tant qu'État, disparaît à nouveau, tout comme la frontière germano-polonaise.
En juin 1941, l'URSS, envahie par l'Allemagne, rejoint le camp des Alliés (Royaume-Uni et États-Unis) et la question polonaise se pose à nouveau.
La reconnaissance de la frontière germano-polonaise au début de la guerre froide
Après la Seconde Guerre mondiale, la frontière germano-polonaise est décidée par des traités, notamment lors de la conférence de Potsdam. L'Allemagne n'existe plus en tant qu'État et elle est occupée par les 4 puissances victorieuses. Lorsque les États-Unis et l'URSS s'opposent et entrent dans la guerre froide, l'Allemagne est divisée en deux. L'URSS, l'Allemagne de l'Est et la Pologne reconnaissent la frontière germano-polonaise, mais l'Allemagne de l'Ouest et les puissances alliées aux États-Unis ne la reconnaissent pas. Cette situation perdure de 1945 à 1969.
Au lendemain de la Seconde Guerre mondiale, des modifications géopolitiques majeures sont opérées. La conférence de Potsdam, en février 1945, définit les frontières provisoires :
- La frontière à l'Est entre la Pologne et l'URSS est fixée sur la ligne Curzon.
- La frontière germano-polonaise est fixée sur la rivière Neisse et le fleuve Oder, ce qui donne la ligne Oder-Neisse (472 kilomètres). Cette frontière est déplacée de près de 200 kilomètres vers l'ouest par rapport à celle de 1939.
L'Allemagne n'existe plus en tant qu'État et elle est occupée par les 4 puissances victorieuses : les États-Unis, l'URSS, le Royaume-Uni et la France.
Les territoires à l'est de la ligne Oder-Neisse sont sous « l'administration de l'État polonais » et non sous sa souveraineté. On assiste à un déplacement massif d'Allemands (environ 7 millions) des territoires sous administration polonaise vers l'Allemagne occupée, mais aussi de Polonais qui vivaient dans les territoires définitivement annexés par l'URSS. L'URSS conserve les territoires (172 000 km²) de son alliance avec l'Allemagne nazie.
Avec la guerre froide, les frontières provisoires deviennent un véritable enjeu, la frontière germano-polonaise incluse. En effet, la Grande Alliance entre les États-Unis et l'URSS s'effondre entre 1945 et 1947 pour laisser la place à une confrontation multidimensionnelle (idéologique, politico-militaire, économique, etc.). L'Europe est divisée en deux blocs. Au lendemain de la première crise de Berlin (1948-1949), l'Allemagne est divisée en deux États :
- l'Allemagne de l'Est (RDA), sous contrôle de l'URSS ;
- l'Allemagne de l'Ouest (RFA), constituée de zones d'occupation américaine, britannique et française, sous contrôle des États-Unis.
La RDA, dans le même camp que la Pologne, par l'accord de Görlitz (1950) signé avec celle-ci, reconnaît cette frontière qui devient celle de « la paix », alors que la RFA en nie l'existence juridique.
Vers une reconnaissance de la frontière germano-polonaise : de l'Ostpolitik à la réunification allemande (1970-1990)
Le chancelier de l'Allemagne de l'Ouest Willy Brandt arrive au pouvoir en 1969. Il mène une Ostpolitik, une politique de détente avec l'URSS et l'Europe de l'Est et de rapprochement entre les deux Allemagnes. Cette politique permet de reconnaître la frontière germano-polonaise. L'arrivée au pouvoir de Gorbatchev en URSS va entraîner la chute de l'URSS et la réunification des deux Allemagnes, avec une reconnaissance définitive de la frontière germano-polonaise.
Le rôle de Willy Brandt (1913-1992) est majeur. En effet, c'est un homme politique social-démocrate (socialiste) et un homme d'État ouest-allemand. De son vrai nom Karl Herbert Frahm, il s'engage très tôt dans les jeunesses socialistes et, à l'arrivée au pouvoir de Hitler en 1933, il émigre. Au lendemain de 1945, il revient en Allemagne et devient un membre actif du parti social-démocrate allemand (SPD), le parti socialiste ouest-allemand. Il gravit les échelons du pouvoir politique :
- maire de Berlin-Ouest (1957-1966) ;
- vice-chancelier et ministre des Affaires étrangères de la RFA de 1966 à 1969 dans un gouvernement de coalition avec la droite ;
- chancelier de 1969 à 1974.
C'est le 1er chancelier social-démocrate depuis 1949, date de la création de la RFA.
Willy Brandt reçoit le prix Nobel de la paix en 1971 pour son Ostpolitik.
L'Ostpolitik est marquée par trois traités :
- Le traité de Moscou en août 1970 avec l'URSS et le traité de Varsovie avec la Pologne en décembre 1970 permettent une reconnaissance de la ligne Oder-Neisse (frontière RDA-Pologne) et la renonciation de la souveraineté allemande sur ces territoires.
- Le traité avec la RDA en 1972, appelé aussi « traité fondamental », acte la reconnaissance mutuelle des deux Allemagnes pour la première fois depuis 1945.
L'Ostpolitik permet une reconnaissance par la RFA de la frontière germano-polonaise fixée sur la ligne Oder-Neisse.
Mikhaïl Gorbatchev arrive au pouvoir en 1985. Sa politique est beaucoup plus souple et permet plus de libertés dans les pays contrôlés par l'URSS.
Des élections semi-libres ont lieu en Pologne et des élections libres ont lieu en Hongrie au printemps 1989.
Dans la nuit du 9 au 10 novembre 1989, c'est la chute du mur de Berlin. Il s'agit de la première étape vers la réunification allemande. Cette réunification se fait en plusieurs étapes :
- D'abord, la reconnaissance des frontières par le traité de Moscou (septembre 1990) - nommé « 4 + 2 » : les quatre puissances occupantes de l'Allemagne depuis 1945 (États-Unis, URSS, Royaume-Uni et France) et les deux Allemagnes. Ce traité marque l'intangibilité des frontières de la future Allemagne réunifiée.
- Ensuite, le traité de la réunification allemande (3 octobre 1990) est signé. Enfin, le dernier traité - le traité germano-polonais (novembre 1990) - clôt cette reconnaissance des frontières issue des accords de 1945.
- Le traité de bon-voisinage entre l'Allemagne et la Pologne (juin 1991) achève la construction de cette nouvelle géopolitique européenne.
La frontière germano-polonaise est officiellement reconnue par l'Allemagne qui est un pays unifié, contrairement à la RFA et la RDA qui n'étaient pas souveraines.
La frontière germano-polonaise démontre bien que les actes de fixation et de reconnaissance des frontières sont l'objet de débats et qu'elles représentent un enjeu majeur du pouvoir.
Raymond Aron (1905-1983), philosophe, sociologue et théoricien français des relations internationales, publie en 1962 Paix et guerre entre les nations. Il présente de manière symbolique les deux représentants majeurs des États dans leurs relations avec les autres : le diplomate et le soldat. La fixation de la frontière germano-polonaise tout au long du XXe siècle est l'illustration de l'oscillation de l'action de ces deux figures symboliques : elle est fixée tantôt par le soldat, tantôt par le diplomate.
Dépasser les frontières : le droit de la mer
Les espaces maritimes représentent 71 % de la surface de la Terre. Dès le XVIIe siècle, on commence à partager juridiquement les espaces maritimes entre les grandes puissances. Les pays qui possèdent des espaces maritimes sont en général des pays déjà très puissants sans ces espaces : les espaces maritimes sont le reflet de leur puissance et permettent de montrer leur capacité à contrôler des territoires éloignés. C'est pour cela que les espaces maritimes sont des enjeux géopolitiques majeurs.
De l'unité au partage juridique des espaces maritimes
Un débat concernant la liberté des espaces maritimes domine l'Europe depuis les XVIe et XVIIe siècles. La question qui se pose est : les mers doivent-elles être libres ou non ? Les espaces maritimes, du fait de leur nature liquide, sont difficilement appropriables et divisibles par les États. Il faut attendre la convention de Montego Bay en 1982 pour établir un cadre juridique international au caractère quasi-universel régissant tous les espaces marins et leurs ressources. On assiste depuis un demi-siècle à un double processus : une appropriation maritime par les puissances terrestres et la protection de la liberté des mers.
De nombreux juristes, issus des puissances maritimes concurrentes et montantes (Pays-Bas et Angleterre), vont nourrir cette réflexion :
- Le juriste hollandais Julius Grotius (1583-1645) publie un ouvrage majeur Mare liberum (De la liberté des mers) en 1604 dans lequel il affirme que les mers sont libres.
- Le juriste anglais John Selden (1584-1654) répond en 1635 avec Mare clausum : au contraire, selon lui, les mers doivent être contrôlées.
- Le Hollandais Cornelius van Bynkershoek (1673-1743) propose en 1702 de limiter la territorialité de la mer à la portée du canon.
On assiste progressivement à la naissance du droit de la mer, c'est-à-dire à un ensemble de règles juridiques internationales relatives à l'utilisation des espaces maritimes et l'exercice de pouvoirs sur ces espaces par les États.
La convention de Montego Bay en 1982 permet d'établir un cadre juridique international quasi-universel sur le sujet. Elle propose un compromis entre la liberté de navigation et l'appropriation des espaces maritimes par les États par un découpage des espaces maritimes. Cette délimitation est effectuée en fonction d'un principe simple : le degré d'appropriation des espaces maritimes est proportionnel à la distance par rapport au trait de côte. Plus la côte est proche, plus la souveraineté étatique est forte et inversement.
La convention de Montego Bay a été ratifiée par 167 États à l'exception des États enclavés, et certains autres États.
Les États-Unis n'ont pas signé la convention de Montego Bay.
La convention de Montego Bay élabore un zonage qui établit des délimitations maritimes plutôt que des frontières : les Zones économiques exclusives (ZEE). Ces ZEE représentent 32 % de l'ensemble maritime (mais 90 % des poissons pêchés) tandis que la haute mer représente 64 % de l'ensemble.
On assiste bien, depuis un demi-siècle, à un double processus : une appropriation maritime par les puissances terrestres et la protection de la liberté des mers.
« La mer est un lieu de relations, la terre un lieu d'obstacles. »
Michel Serres
« Parmi les accords internationaux, la convention de Montego Bay est incontestablement le plus important par ses applications effectives. […] elle a conduit de repenser dans sa totalité le droit à la mer […]. Elle définit les différentes zones constituant l'espace marin et tente d'en déterminer les modes d'usages civils et militaires […]. Elle intègre une base juridique à peu près unanimement acceptée par les États, même par les non-signataires. »
André Vigarié
« Les États et la mer : une bien longue histoire », © Bulletin d'étude de la marine
juin 2005
André Vigarié (1921-2006), est géographe et fondateur de la géographie maritime et portuaire française.
Ce droit de la mer et ce processus de délimitation et de territorialisation des espaces maritimes, associés à la maritimisation de la planète, engendrent des enjeux géopolitiques majeurs.
La puissance maritime, reflet et projection de la puissance terrestre
La puissance maritime des États est le résultat de plusieurs facteurs :
- la possession d'une façade maritime étendue et/ou de nombreuses îles permettant une vaste ZEE ;
- la maîtrise des espaces maritimes par une marine militaire puissante et aux capacités de projection (c'est-à-dire la capacité à intervenir dans des espaces éloignés) ;
- des moyens économiques solides.
« Les États sont pris entre deux tensions contradictoires : se protéger et se projeter. À l'inverse d'une frontière terrestre, la mer impose une discontinuité avec les autres États. […] La frontière maritime, rempart naturel, est aussi floue et perméable. […] Au-delà de la ZEE débutent la haute mer et les eaux internationales. Pour les États, il s'agit d'un espace de projection vers l'extérieur […]. »
Antoine Frémont
« Géographie des espaces maritimes », © Documentation photographique, n° 8104
mars-avril 2015
La puissance maritime est le fruit de plusieurs composantes, autant maritimes que terrestres. On assiste à une division inégale des espaces maritimes par les grandes puissances à travers la délimitation des ZEE. Les principales puissances sont les États-Unis (12,2 millions de km2), la France (10,1 millions de km2), l'Australie (9 millions de km2) et la Russie (7,7 millions de km2). L'étendue de la ZEE est due à deux facteurs :
- une façade maritime vaste ;
- la possession d'îles ou d'archipels.
La France est classée en 2e position grâce à ses territoires d'outre-mer (DROM-COM).
La puissance maritime est le reflet de l'inégale maîtrise des mers et des océans par les États, par la voie de leur flotte militaire. Les grandes puissances mondiales ont peu ou moins de difficultés à faire respecter leur souveraineté maritime, car elles possèdent des flottes militaires.
10 États disposent de 84 % de la flotte militaire mondiale. Les États-Unis affichent une écrasante supériorité avec 11 porte-avions et 14 sous-marins lanceurs de missiles nucléaires.
A contrario, les États fragiles (en guerre civile ou minés par de graves difficultés économiques et sociales) ont des espaces maritimes peu ou mal contrôlés.
En Somalie, depuis les années 2000, la piraterie se développe.
Enfin les rivalités de puissance entre les États se projettent sur les espaces maritimes et créent de nouvelles tensions. La montée en puissance de la Chine s'incarne tant en termes d'ambitions que de moyens militaires.
Il y a les revendications envers le Japon concernant les îles Senkaku ; celles concernant les îles Paracels, occupées par la Chine mais revendiquées par le Vietnam, et enfin les îles Spratleys, revendiquées par la Chine et les États limitrophes (Vietnam, Malaisie, Philippines).
L'Asie est aussi la région du monde dont les dépenses militaires maritimes ont connu la plus forte croissance : celles de la Chine (2 porte-avions et 4 sous-marins lanceurs de missiles nucléaires), des autres États de la région (Japon, Taïwan, Inde, etc.) et de leur allié, les États-Unis, qui ont opéré depuis les présidences de Barack Obama un transfert de leurs forces de l'Europe et du Proche et Moyen-Orient vers l'Asie.
Les espaces maritimes : des enjeux géopolitiques majeurs
Les espaces maritimes présentent des enjeux géopolitiques en raison de leur potentialité en matière de circulation et de richesses halieutiques et minérales.
Comme le rappelle le philosophe – et marin de formation - Michel Serres (1930-2019), « la mer rapproche, la terre sépare ». Depuis quelques décennies, la mondialisation met en valeur les espaces maritimes. Par la mise en place d'un système de production et de distribution mondialisé mais dont les différentes étapes de fabrication et d'assemblage sont localisées dans des lieux variés et éloignés, les espaces maritimes deviennent des espaces de circulation d'exception. Ils permettent le parcours de longues distances sans obstacles, mises à part des tempêtes. Ainsi, 90 % des échanges mondiaux s'effectuent par voie maritime et 99 % des flux d'Internet passent par les câbles sous-marins. Le véritable défi réside aussi dans la sécurisation des voies maritimes et des seuils stratégiques (détroits et canaux) et dans l'aménagement des littoraux.
Détroit de Malacca depuis Singapour et les aménagements portuaires à Singapour.
© Photos TST, juillet 2019
La mondialisation reposant sur la mise en relation des territoires, les littoraux sont donc des espaces privilégiés et stratégiques à condition qu'ils soient bien connectés à leur hinterland (arrière-pays) et à leur avant-pays par la mise en place d'infrastructures adaptées - terre-pleins (avancées de portions de terre sur la mer) ; ports et zones industrialo-portuaires – permettant la constitution de façades maritimes dynamiques. Ainsi, dans le monde, 25 ports polarisent 50 % des flux.
Les enjeux sont également liés aux ressources à exploiter, présentes et à venir. En effet, la mer, c'est d'abord du poisson. Les ressources halieutiques - activités liées à la pêche - sont estimées à 90 millions de tonnes de poissons pêchés dans le monde, principalement dans les océans Pacifique et Atlantique nord. Les ressources sont également énergétiques : les espaces maritimes représentent 22 % des réserves de pétrole et 30 % des réserves de gaz. Les gisements offshore (en pleine mer) de plus en plus profonds sont permis grâce aux progrès des forages. On comprend mieux l'importance de la possession d'une ZEE la plus vaste possible : son potentiel en richesses est d'autant plus élevé que la zone sera étendue et permettra une projection sécurisée vers la haute mer. Ainsi la délimitation du zonage des espaces maritimes constitue un enjeu capital ainsi qu'une source de tensions et de conflits entre les États.