Sommaire
IQu'est-ce que la connaissance ?ALa notion de « société de la connaissance »BLa notion de communauté savante, communauté scientifique en histoire des sciencesCLes acteurs et les modalités de la circulation de la connaissanceIIProduire et diffuser des connaissancesALes grandes étapes de l'alphabétisation des femmes du XVIe siècle à nos jours dans le mondeBRecherche et échanges de scientifiques sur la question de la radioactivitéIIILa connaissance, enjeu politique et géopolitiqueALes services secrets soviétiques et américains durant la guerre froideBCirculation des étudiants et transferts de technologie en IndeIVLe cyberespace : conflictualité et coopération entre les acteursALe cyberespace, entre réseaux et territoiresBCyberdéfense, entre coopération européenne et souveraineté nationale : le cas français Ce contenu a été rédigé par l'équipe éditoriale de Kartable.
Dernière modification : 28/08/2025 - Conforme au programme 2025-2026
Qu'est-ce que la connaissance ?
La notion de « société de la connaissance »
La « société de la connaissance » fait référence à un ouvrage de 1969 de l'universitaire américain Peter Drucker dans lequel ce dernier imagine un modèle où le savoir et l'innovation technologique sont au cœur du développement économique et géopolitique. L'essor des nouvelles technologies de l'information et de la communication (NTIC) a transformé l'accès et la diffusion du savoir, donnant une importance majeure au capital humain et à la créativité.
L'innovation se matérialise aujourd'hui par des outils comme les MOOC, des plateformes collaboratives (Wikipédia) ou ChatGPT, qui démocratisent l'accès à l'information. Cependant, cette diffusion massive par des acteurs de plus en plus nombreux pose des problèmes de fiabilité, favorise la circulation de fausses informations et accentue les inégalités d'accès entre pays riches et pays en développement.
La notion de communauté savante, communauté scientifique en histoire des sciences
Depuis le Moyen Âge, la construction du savoir s'est progressivement détachée de la théologie pour se spécialiser, notamment grâce à l'imprimerie au XVe siècle et à l'émergence des académies dès le XVIIe siècle. La république des lettres, communauté de savants humanistes de la Renaissance au XVIIIe siècle, illustre la dimension collective de la démarche scientifique et la collaboration à l'échelle européenne.
La communauté scientifique se caractérise par des valeurs partagées telles que l'universalisme, le désintéressement, l'esprit critique et l'évaluation par les pairs. Des institutions emblématiques, comme la Royal Society de Londres, ont réuni des savants (Newton, d'Alembert, Lavoisier, etc.) qui ont contribué à la diffusion et à l'enrichissement du savoir.
Les acteurs et les modalités de la circulation de la connaissance
Les acteurs de la circulation de la connaissance sont nombreux.
- Les universités et institutions religieuses sont les premiers lieux de construction du savoir dès le Moyen Âge.
- Dès les XVIIe et XVIIIe siècles, les académies et sociétés savantes ont joué un rôle central dans la diffusion du savoir au-delà des frontières nationales.
- Enfin aux XIXe et XXe siècles, les entreprises et institutions d'État sont devenus des acteurs-clés. Elles ont contribué à la spécialisation croissante du savoir, au développement du secteur privé (la recherche et le développement des entreprises) et des grandes institutions de recherche (CNRS, CNES, etc.).
Les modalités de diffusion évoluent dans le temps.
- D'abord, l'imprimerie a permis une diffusion massive des œuvres, renforcée par des échanges intellectuels et des traductions.
- Le travail en équipe et les collaborations transnationales se sont renforcés, facilitant la circulation du savoir scientifique à l'échelle mondiale.
- Aujourd'hui, les technologies numériques (MOOC, encyclopédies en ligne, IA) permettent une diffusion rapide et accessible de la connaissance, tout en posant des défis en matière de vérification et de qualité des informations, de transformation dans la structure de l'emploi, sans même évoquer les problèmes existentiels liés à l'apparition d'une super-IA.
Produire et diffuser des connaissances
Les grandes étapes de l'alphabétisation des femmes du XVIe siècle à nos jours dans le monde
Dans l'Occident médiéval, l'alphabétisation a longtemps été réservée au clergé et à une élite. À partir du XVIe siècle, la réforme protestante puis la réforme catholique favorisent la création d'écoles et de congrégations pour l'éducation des filles (les Ursulines en 1535).
En France, le XIXe siècle marque le début d'un enseignement public. La loi Falloux (1850) crée des écoles de filles dans les communes de plus de 800 habitants. La démocratisation des sociétés et la généralisation des systèmes scolaires, illustrées notamment par les lois de Jules Ferry en France, permettent une progression notable de l'alphabétisation des femmes. Au XXe siècle, le taux d'alphabétisation augmente fortement dans tous les pays industrialisés.
Aujourd'hui, les inégalités persistent à l'échelle mondiale : sur 754 millions d'adultes analphabètes dans le monde, deux tiers sont des femmes. Des figures contemporaines comme Malala Yousafzai (militante pakistanaise pour les droits des femmes) témoignent des obstacles actuels et de l'importance de l'éducation pour l'autonomisation des femmes, dont toutes les études montrent pourtant qu'il s'agit là d'un levier essentiel pour le développement.
Recherche et échanges de scientifiques sur la question de la radioactivité
La radioactivité est découverte accidentellement par Henri Becquerel en 1896 et étudiée par Marie et Pierre Curie. En 1898, le couple identifie deux nouveaux éléments (radium et polonium) et invente le terme « radioactivité », ouvrant la voie à des avancées majeures en physique et en chimie (les trois chercheurs sont prix Nobel de physique en 1903 et Marie Curie prix Nobel de chimie en 1911). Leurs travaux illustrent l'importance de la coopération et du travail en équipe dans la recherche scientifique, avec des échanges internationaux marqués par des conférences (les conférences Solvay) et le soutien des institutions.
La recherche sur la radioactivité conduit, au fil des décennies, à des applications en médecine avec la radiothérapie et, de manière plus controversée, à l'armement nucléaire (projet Manhattan et utilisation des bombes atomiques pendant la Seconde Guerre mondiale). Ces « avancées » provoquent une transformation radicale des rapports entre recherche fondamentale, financement étatique et implications militaires.
La connaissance, enjeu politique et géopolitique
Les services secrets soviétiques et américains durant la guerre froide
Le renseignement au service des États est une forme de connaissance qui représente un enjeu politique et géopolitique majeur.
Pendant la guerre froide, disposer d'informations sur l'adversaire était un atout géopolitique majeur. Les services secrets, fondés sur le triptyque « savoir-comprendre-agir », opéraient sur plusieurs temporalités pour anticiper crises et guerres.
- En URSS, des organismes successifs (NKVD, puis KGB en 1954 et le GRU) ont permis de collecter des renseignements stratégiques, notamment en infiltrant le programme nucléaire américain Manhattan grâce à agents secrets comme le physicien Klaus Fuchs.
- Les États-Unis se dotent également d'organismes de renseignements : création de la CIA (1947) et de la NSA (1952). Ces agences et la coopération anglo-américaine (exemple du décryptage d'Enigma, la machine à encoder allemande de la Seconde Guerre mondiale, ou du programme Echelon), ont progressivement permis de rattraper leur retard initial en renseignement.
Le monde du renseignement permet aux deux blocs de s'affronter indirectement de 1947 à 1991.
Lors de la crise de Cuba, ce sont les photos aériennes prises par avion-espion U2 qui ont donné au président Kennedy les preuves dont il avait besoin pour dénoncer le projet soviétique à l'ONU.
Circulation des étudiants et transferts de technologie en Inde
La circulation et la formation des étudiants ainsi que les transferts de technologie sont une forme de connaissance directement liée à la puissance économique. Ils participent à la montée en compétences d'un pays et à son insertion dans les réseaux de la mondialisation.
Dès son indépendance en 1947, l'Inde s'affirme comme une puissance émergente en misant sur l'éducation et l'innovation. Doté d'un poids démographique gigantesque (avec 1,4 milliards d'habitants, c'est la première population du monde depuis 2023) et confronté à des fragilités structurelles et socio-économiques, le pays a encouragé ses étudiants à étudier à l'étranger (brain drain) : 300 000 étudiants indiens partent ainsi chaque année, essentiellement vers les pays anglophones. Ce phénomène, bien qu'il implique une fuite des cerveaux, a aussi permis la constitution d'une diaspora hautement qualifiée, notamment dans la Silicon Valley, qui joue un rôle de passerelle avec les entreprises et les universités étrangères.
L'Inde développe massivement son système d'enseignement supérieur pour retenir ces talents : le pays passe de 27 établissements en 1950 à 789 en 2018. Cette stratégie, combinée à d'importants investissements dans la recherche et des politiques, favorise l'implantation d'entreprises étrangères (zones économiques spéciales, avantages fiscaux). Les GAFAM et de nombreuses entreprises européennes ou japonaises y installent aujourd'hui des centres de Recherche et Développement. Elles permettent à l'Inde de devenir un acteur majeur dans les secteurs des technologies de l'information et des transferts de technologie, renforçant ainsi sa puissance économique. Aujourd'hui, le pays se positionne comme un hub technologique mondial, en particulier dans les domaines du numérique, de la pharmacie et de l'ingénierie.
Le cyberespace : conflictualité et coopération entre les acteurs
Le cyberespace, entre réseaux et territoires
Le cyberespace trouve son origine dans la création d'Internet, d'abord conçu sous forme d'Arpanet, un système de communication résistant aux attaques nucléaires, puis évoluant dans les années 1990-2000 en un réseau mondial complexe. C'est donc un espace informationnel.
Bien qu'immatériel, il repose sur une infrastructure matérielle – fibres optiques, serveurs, data centers – et sur la numérisation de l'information.
Cet environnement interconnecté est animé par divers acteurs :
- Les États qui y déploient leur puissance (ils possèdent une part importante des data centers).
- Les grandes entreprises multinationales (GAFAM aux États-Unis, BATX en Chine, mais aucun acteur majeur européen).
- Des acteurs issus du dark web (hackers, hacktivistes, organisations criminelles ou terroristes).
Le cyberespace est également un théâtre de tensions avec des menaces variées telles que le sabotage, l'espionnage numérique et la subversion, qui impactent à la fois les enjeux géopolitiques et économiques.
En 2010, le ver informatique « Stuxnet » a été découvert par les Iraniens : il était conçu pour saboter les installations nucléaires du pays.

Le cyberspace, un territoire sans frontières, aux nombreux acteurs et menaces
Cyberdéfense, entre coopération européenne et souveraineté nationale : le cas français
Face aux menaces qui émanent du cyberespace, les États reconnaissent la nécessité de se protéger via des stratégies de cyberdéfense. D'autant que les plus virulentes des menaces cyber émanent d'Etats autoritaires (Chine, Russie, Corée du Nord) engagés dans une lutte globale contre l'Occident.
À l'échelle mondiale et européenne, diverses initiatives, comme le forum mondial sur la gouvernance d'Internet, la création de l'ENISA et le Cybersecurity Act, témoignent d'une volonté de coopération, même si celle-ci reste limitée par un vide juridique propre aux conflits numériques. Aucune organisation consacrée à la cybersécurité n'existe à l'échelon international.
En France, longtemps en retard dans ce secteur, la stratégie de cyberdéfense est une priorité nationale. Elle repose sur une doctrine officielle de lutte informatique offensive (LIO) et implique plusieurs acteurs-clés. Cette approche vise à sécuriser les infrastructures critiques, contrôler les flux d'information et, en cas d'attaque, être capable de riposter, dans le but de préserver la souveraineté numérique de l'État. Elle est un enjeu majeur de puissance. En 2017 est ainsi créé le COMCYBER, le commandement de la Cyberdéfense française.