Sommaire
I1946-1958 : la IVe RépubliqueALes débuts de la IVe RépubliqueBL'instabilité ministérielleC1954-1962 : la crise algérienne1Les débuts de la guerre d'Algérie2La fin de la IVe République et la fin de la guerreIILes débuts de la Ve RépubliqueALa mise en place d'un nouveau régimeBLes transformations de l'économie et de la sociétéCMai 68 : la fin des années de GaulleIIILe rôle de la France dans la construction européenne de 1947 à 1970ALes débuts de la construction européenneBLes tensions en France autour du projet européenAprès la Seconde Guerre mondiale, la France se lance dans la décolonisation et s'engage dans la construction européenne alors que la guerre froide divise le monde. La crise algérienne ébranle la IVe République. En 1958, un nouveau régime est mis en place, c'est le début de la Ve République.
Quelle est la nouvelle place de la France dans le monde lorsqu'elle cesse d'être une puissance coloniale ? Quelles sont ses évolutions politiques de 1945 à 1970 ?
1946-1958 : la IVe République
Après la Seconde Guerre mondiale, la IVe République se met en place. Des tensions ponctuent les années 1947-1958, notamment à cause de la décolonisation et de la guerre froide. La crise algérienne va mettre fin à la IVe République.
Les débuts de la IVe République
Après la Seconde Guerre mondiale, la France est gouvernée par le GPRF (Gouvernement provisoire de la République française) présidé par de Gaulle. La IVe République est proclamée en 1946, avec une nouvelle constitution. Un nouveau président de la République est élu en 1947.
Le GPRF (Gouvernement provisoire de la République française) s'installe au pouvoir dès août 1944, au moment de la Libération, sous la présidence du général de Gaulle. La situation est provisoire puisque l'Assemblée n'a pas encore rédigé de constitution. Les ministres sont issus des rangs de la Résistance. Ce gouvernement rétablit l'ordre dans un pays divisé par l'épuration et engage de nombreuses réformes afin de reconstruire et de moderniser le pays. Très vite, des dissensions apparaissent. Le général de Gaulle souhaite un exécutif fort alors que l'Assemblée constituante, dominée par la gauche, veut revenir au schéma de la Constitution de la IIIe République et d'une Assemblée toute-puissante. En désaccord avec les choix de la majorité des partis politiques, de Gaulle démissionne en janvier 1946.
Deux assemblées constituantes et deux référendums sont nécessaires à l'adoption de la IVe République, promulguée le 27 octobre 1946, avec une nouvelle constitution.
La IVe République est une république parlementaire constituée :
- du Parlement, composé d'une chambre haute et de l'Assemblée nationale, qui concentre l'essentiel des pouvoirs ;
- de l'Assemblée nationale, qui peut renverser le gouvernement ;
- du président du Conseil, chef du gouvernement, qui dispose du pouvoir exécutif et doit disposer d'une majorité parlementaire pour gouverner.
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Après avoir été ministre dans le deuxième gouvernement du général de Gaulle, Vincent Auriol est élu président de la République en 1947. C'est un homme de gauche, membre de la SFIO (Section française de l'Internationale ouvrière). Il met en place un gouvernement dit « d'accord général » associant tous les partis représentés à l'Assemblée nationale.
L'instabilité ministérielle
La IVe République est marquée par une grande instabilité ministérielle. La décolonisation en cours et le contexte de la guerre froide attisent les tensions au sein du gouvernement. Les problèmes s'accumulent.
En France, 24 gouvernements se succèdent de 1947 à 1958.
Les premières tensions apparaissent au sein du gouvernement à cause de la décolonisation. Certains souhaitent maintenir la colonisation tandis que d'autres dénoncent les mesures violentes adoptées dans les colonies :
- en Indochine française, la répression de l'insurrection générale au Tonkin avec le bombardement de Haïphong le 23 novembre 1946 ;
- la répression du soulèvement de Madagascar en mars et avril 1947.
Les tensions naissent également dans le contexte de la guerre froide :
- Au gouvernement, certains sont défavorables à la « doctrine Truman » d'assistance économique et militaire à la Grèce et à la Turquie du 11 mars 1947.
- L'entente des partis de la gauche prend fin en mai 1947 après le renvoi des ministres communistes qui soutiennent la politique internationale du bloc soviétique en Asie.
À partir de 1952, le gouvernement oscille entre :
- le centre droit : le gouvernement Pinay de 1952 ;
- le centre gauche : les gouvernements de Pierre Mendès France et de Guy Mollet en 1954 et 1956.
Malgré les fréquents changements de gouvernement durant la IVe République, on observe une certaine permanence des politiques entreprises. Cette permanence s'explique par un faible renouvellement du personnel politique et administratif.
1954-1962 : la crise algérienne
La France refuse d'accorder l'indépendance à l'Algérie. On parle de « crise algérienne » qui débouche sur une longue guerre de 1954 à 1962. Cette crise est à l'origine de la fin de la IVe République.
Les débuts de la guerre d'Algérie
La France accorde difficilement l'indépendance aux pays colonisés. Avec l'Algérie, qui n'est pas une colonie ordinaire et qui a un statut particulier, la situation s'envenime. Une violente guerre éclate, même si la France refuse de parler de « guerre ». Le conflit ne se termine qu'en 1962.
L'Algérie est la plus vieille colonie française. C'est une colonie de peuplement. Elle a un statut administratif particulier. Elle est considérée comme faisant partie intégrante du territoire national et son administration dépend du ministère de l'Intérieur et non du ministère des Colonies. Elle est composée de trois départements. Une importante communauté européenne, les pieds-noirs, y habite.
En 1954, les pieds-noirs sont environ 800 000 sur une population totale de 9 millions d'habitants.
Cependant, l'Algérie colonisée est une société très inégalitaire. Les richesses sont accaparées par la minorité européenne. Le système électoral favorise les Européens. De nombreux Algériens souhaitent donc l'indépendance. Dès 1945, des émeutes éclatent mais sont durement réprimées, notamment à Sétif et à Guelma, où la répression fait plusieurs milliers de morts.
En 1954, alors que la France a accordé l'indépendance à d'autres colonies, la guerre d'Algérie éclate. Le 1er novembre 1954, une vague d'attentats touche de nombreux Européens d'Algérie. Ce jour est appelé la « Toussaint rouge ». Ces attentats sont revendiqués par le Front de libération nationale, le FLN. Des actions de guérilla et de terrorisme menées par les « fellagas » (nom donné aux combattants algériens) se répètent.
Les pieds- noirs s'opposent radicalement à toute possibilité de négociation de l'indépendance, alors que de plus en plus d'Algériens soutiennent le FLN.
Certains Algériens se rangent cependant du côté des Français, ce sont les harkis.
La France refuse toute négociation.
« L'Algérie, c'est la France, et non un pays étranger que nous protégeons. »
François Mitterrand, ministre de l'Intérieur
La France n'envoie dans un premier temps que des renforts policiers. Elle dépêche l'armée à partir de 1956. Celle-ci est composée essentiellement d'« appelés » (Français qui font leur service militaire) et elle intervient dans le but officiel de « maintenir l'ordre ». La France ne parle pas de guerre, mais d' « événements ».
À la fin des années 1950, plus de 400 000 soldats français sont présents en Algérie.
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La fin de la IVe République et la fin de la guerre
Le général de Gaulle est rappelé au pouvoir en mai 1958 pour régler la crise. C'est la fin de la IVe République. Des négociations pour la paix s'amorcent mais la guerre continue. La paix revient seulement en 1962 avec les accords d'Évian de mars 1962 : l'indépendance de l'Algérie devient effective en juillet.
Les Français d'Algérie s'inquiètent. Ils craignent une négociation de la France avec le FLN. Ils se soulèvent le 13 mai 1958 à Alger (putsch d'Alger). Soutenus par l'armée, ils forment un Comité de salut public présidé par le général Massu.
Le général de Gaulle, qui reste un homme respecté depuis ses actions pendant la Seconde Guerre mondiale, est appelé par le gouvernement. Il accepte à condition d'obtenir les pleins pouvoirs et de faire voter une nouvelle constitution pour mettre en place un exécutif fort. La crise algérienne est si importante que tous les partis politiques se rallient à son idée. Le président de la République, René Coty, lui demande donc de former un nouveau gouvernement. C'est la fin de la IVe République.
Les combats ne cessent pourtant pas tout de suite en Algérie. Il faut quatre ans pour que les négociations de paix aboutissent, de Gaulle étant lui-même contre l'indépendance de l'Algérie. Il cède toutefois. Les accords d'Évian sont signés en mars 1962, et l'Algérie est enfin indépendante en juillet 1962.
L'indépendance est vécue comme une trahison pour les pieds-noirs et les harkis.
Les débuts de la Ve République
Dès 1958, une nouvelle constitution est mise en place, c'est le début de la Ve République. La France connaît alors des transformations économiques et sociales. Toutefois, une importante crise éclate à la fin des années 1960 : c'est la crise de Mai 68. De Gaulle démissionne.
La mise en place d'un nouveau régime
La Ve République est un nouveau régime politique qui repose sur une nouvelle constitution. L'exécutif est renforcé pour mieux contrôler les prises de décisions.
La nouvelle Constitution donnant naissance à la Ve République est rédigée pendant l'été 1958 sous la direction de Michel Debré, garde des Sceaux. Elle s'inspire directement du discours de Bayeux prononcé en 1946 par le général de Gaulle. Le président de la République est désormais au centre des institutions et l'exécutif est renforcé. Le président de la République, élu au suffrage universel à partir de 1965, a beaucoup de pouvoir.
La nouvelle Constitution est adoptée par les Français par référendum en septembre 1958.
L'État contrôle étroitement les médias qui sont réunis en 1964 dans l'ORTF (Office de radiodiffusion-télévision française).
Les transformations de l'économie et de la société
Des transformations économiques importantes permettent à la France de bénéficier d'une forte croissance. La société est également transformée par des actions de l'État.
La France connaît une véritable mutation économique dans les années 1960 :
- Sa monnaie, le franc, est beaucoup plus stable.
- L'agriculture se modernise.
- Les industries, stimulées par le marché commun de la CEE, sont plus compétitives.
La société connaît également des transformations. Elle entre dans l'ère de la consommation et des loisirs. Les missions de l'État sont importantes :
- dans le domaine de la culture, avec la création des maisons de la culture par André Malraux ;
- dans le domaine de l'éducation, où l'âge limite de la scolarité obligatoire passe de 14 à 16 ans et où des collèges d'enseignement technique et des collèges d'enseignement général sont créés ;
- dans le domaine de la santé avec la création des centres hospitaliers universitaires en 1958 ;
- dans le domaine des transports avec la création du Concorde et le projet du TGV.
Mai 68 : la fin des années de Gaulle
La mauvaise répartition des bénéfices de la croissance économique entraîne une crise sociale qui fragilise l'État en mai 1968. Des grèves sans précédent paralysent le pays. De Gaulle démissionne en 1969.
La croissance économique augmente les inégalités sociales en accentuant les écarts de richesse. Une partie des classes moyennes se sent exclue des bénéfices des Trente Glorieuses et revendique une meilleure redistribution économique.
Graffiti de Mai 68
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En mai 1968, les étudiants sont dans la rue, une vague de grèves paralyse le pays :
- Le 2 mai, la faculté de Nanterre est fermée suite à plusieurs incidents.
- Le 3 mai, un meeting organisé par les étudiants contestataires tourne à l'affrontement avec les forces de l'ordre.
- Le 6 mai, les manifestations étudiantes débutent dans le Quartier latin.
- Dans la nuit du 10 au 11 mai, c'est la première nuit des barricades.
- Le 13 mai, la crise étudiante devient également sociale avec le début des grèves et des occupations d'usines.
- Le 27 mai 1968, c'est la signature des accords de Grenelle entre le gouvernement et les syndicats après de longues négociations.
Les accords de Grenelle permettent une augmentation de 35 % du SMIC (salaire minimum) et de 10 % des salaires réels.
De Gaulle annonce qu'il dissout l'Assemblée nationale et met en place de nouvelles élections législatives en juin pour redonner une légitimité au pouvoir de la République. Les Français expriment alors dans les urnes leur attachement au régime et à leur président en lui redonnant une très large majorité. La crise de Mai 68 est terminée.
De Gaulle organise également un référendum sur la décentralisation du pouvoir en avril 1969 en annonçant qu'il démissionnera si le non l'emporte. C'est le non qui l'emporte : de Gaulle démissionne.
Le rôle de la France dans la construction européenne de 1947 à 1970
La France est un des pays fondateurs de l'Union européenne, mais la construction européenne génère des tensions en France.
Les débuts de la construction européenne
La France est un des pays fondateurs de l'Union européenne. Après la Seconde Guerre mondiale, la France devient un acteur important de la construction européenne. Deux hommes politiques français participent à cette construction et font partie des Pères fondateurs de l'Union européenne : Robert Schuman et Jean Monnet.
Le 7 mai 1950, c'est Robert Schuman qui lance l'idée de rassembler le charbon et l'acier au niveau européen. Le traité de la Communauté européenne du charbon et de l'acier (CECA) est ratifié en décembre 1951. La CECA est la première des institutions européennes. Elle donne naissance à ce que l'on appelle aujourd'hui « l'Union européenne ». Ses membres fondateurs sont la France, l'Allemagne de l'Ouest, l'Italie, les Pays-Bas, la Belgique et le Luxembourg. Elle a pour ambition d'empêcher un nouveau conflit en rendant « non seulement impensable, mais matériellement impossible » une nouvelle guerre entre la France et l'Allemagne.
« La paix mondiale ne saurait être sauvegardée sans des efforts créateurs à la mesure des dangers qui la menacent. »
Robert Schuman, ministre français des Affaires étrangères
9 mai 1950
Le 25 mars 1957, la conférence de Messine aboutit à la signature des traités de Rome. Le premier traité institue la Communauté économique européenne (CEE). L'objectif est de mettre en place un marché commun assurant la libre circulation des marchandises et des capitaux, permettant la libre circulation des personnes et le développement des politiques communes.
La signature du traité de Rome en 1957
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Un second traité concerne la mise en place de la Communauté européenne de l'énergie atomique (EURATOM). Ce traité est un échec en raison des politiques nationales énergétiques divergentes.
Les tensions en France autour du projet européen
La construction de l'Union européenne n'est pas soutenue par tous en France. Le projet de Communauté européenne de défense (CED) provoque des tensions au sein du gouvernement français. De Gaulle, qui revient au pouvoir en 1958, accepte l'idée de l'Union européenne mais constitue un frein pour sa construction.
Le projet de Communauté européenne de défense (CED) suppose le réarmement allemand, ce qui fait peur après la Seconde Guerre mondiale. Le 19 février 1952, l'Assemblée approuve le principe de la CED en l'assortissant de nombreuses réserves. Face aux résistances partisanes et aux désaccords, le projet de CED est définitivement abandonné en 1954.
De Gaulle est un souverainiste mais il accepte l'idée d'une construction européenne. À son retour au pouvoir en 1958, il ne remet pas en cause les aspects économiques des traités de Rome car il estime que le marché commun pourra dynamiser l'économie française. En 1963, il signe le traité de l'Élysée avec le chancelier Konrad Adenauer qui scelle la réconciliation entre les deux pays et fait du couple franco-allemand un acteur essentiel de la construction européenne.
Cependant, il n'hésite pas à imposer ses choix à la CEE quand il estime que cela sert les intérêts de la France. Son attitude vis-à-vis des autres pays européens est ainsi guidée par ses ambitions pour la France.
De Gaulle refuse par deux fois l'adhésion de la Grande-Bretagne à la communauté européenne (en 1963 et en 1967) car il l'estime trop proche des États-Unis.
En 1965, le président de la Commission européenne Walter Hallstein souhaite mettre en place l'abandon de l'unanimité dans la prise de décisions au profit de la majorité qualifiée. De Gaulle s'oppose fermement à cette modification, il n'accepte pas que la France applique des décisions qu'elle n'aurait pas approuvées et qui auraient été prises à la majorité qualifiée.
De Gaulle quitte les institutions européennes pendant six mois : c'est la « politique de la chaise vide ». Il bloque ainsi le fonctionnement de la CEE. Il obtient satisfaction avec le compromis de Luxembourg en 1966.