Sommaire
ILes débuts de la crise aux États-UnisALe krach boursier du 24 octobre 1929BLes conséquences de la crise aux États-UnisCLe New DealIIUne crise mondiale et ses conséquencesAL'extension de la crise économique au reste du mondeBLa montée d'un chômage de masseCLes bouleversements politiques1La naissance de régimes autoritaires et la montée de l'extrême droite2En France, l'expérience du Front populaireLa crise économique de 1929 commence aux États-Unis et s'étend ensuite au reste du monde. On parle de grande dépression. C'est la plus importante crise économique et sociale du XXe siècle au niveau mondial. Les répercussions de la crise ne sont pas qu'économiques et sociales, elles sont également politiques. En effet, le chômage de masse et la misère des plus démunis provoquent la montée du populisme et des régimes autoritaires partout dans le monde.
Quel est l'impact de la crise économique de 1929 sur l'ensemble du monde ?
Les débuts de la crise aux États-Unis
Après la Première Guerre mondiale, les États-Unis connaissent une période de grande prospérité. Cependant, la surproduction industrielle, la spéculation boursière et le crédit gangrènent le système nord-américain. Les ménages s'endettent pour pouvoir investir massivement en bourse. Le jeudi 24 octobre 1929, la Bourse de Wall Street s'emballe. C'est le début d'une crise dont les conséquences économiques sont très graves. La politique du New Deal mise en place par le président Roosevelt ne parvient pas à minimiser ses effets.
Le krach boursier du 24 octobre 1929
Le jeudi 24 octobre 1929, la Bourse de Wall Street s'emballe et un important krach boursier a lieu. Tout le monde cherche alors à vendre ses actions au plus vite. Les banques font faillite. Cet événement va devenir la plus grande crise économique de l'histoire occidentale.
Les actionnaires sont inquiets de la baisse de la valeur de leurs investissements, une baisse de 43 % en quelques jours. Ils vendent leurs actions en masse.
Environ 13 millions d'actions sont mises sur le marché.
Les banques tentent de soutenir les cours de la bourse, mais la valeur des actions s'effondre et le krach est inévitable, entraînant avec lui l'économie américaine. Les banques font faillite.
- 600 établissements font faillite en 1929.
- 1 300 établissements font faillite en 1930.
- 2 300 établissements font faillite en 1931.
Ceux qui ont tout perdu en bourse ne peuvent plus honorer les échéances de leurs prêts. La crise économique devient une véritable crise sociale.
Le « jeudi noir » à Wall Street
© Wikipédia
Les conséquences de la crise aux États-Unis
Les conséquences de la crise aux États-Unis sont très importantes. Le pays connaît une déflation : on observe une diminution générale et durable des prix. Le chômage s'accroît et les manifestations de mécontentement se multiplient.
La déflation est la réduction des salaires et des dépenses pour assainir l'économie. Cette politique économique a un effet pervers et conduit à une diminution des prix sur une longue durée.
© Wikipédia
La production et la consommation diminuent de façon spectaculaire car l'argent manque.
22 000 entreprises ferment en 1929, 26 000 en 1930, et 28 000 en 1931.
Le revenu national américain chute de plus de moitié et un chômage de masse touche le pays.
Un quart de la population active des États-Unis est au chômage.
L'assurance chômage n'existant pas, les chômeurs vivent de la charité publique. Un cercle de décroissance s'installe : le chômage entraîne une baisse de revenus qui accentue encore la baisse de la consommation, qui elle-même entraîne une baisse des prix qui va provoquer de nouvelles fermetures d'usines et de nouveaux licenciements.
Les grèves et les manifestations se multiplient.
Manifestation de chômeurs à Chicago en 1934
© Larousse
Les agriculteurs sont particulièrement touchés, les prix agricoles diminuent de 57 % environ entre juin 1929 et décembre 1932.
« La banque ce n'est pas la même chose que les hommes. Il se trouve que chaque homme dans une banque hait ce que la banque fait, et cependant la banque le fait. La banque est plus que les hommes, je vous le dis. C'est le monstre. C'est les hommes qui l'ont créé, mais ils sont incapables de le diriger. »
John Steinbeck
Les Raisins de la colère
1939
Le New Deal
Aux élections présidentielles de novembre 1932, c'est le président démocrate Franklin Delano Roosevelt qui est élu. Il lance alors le New Deal (« nouvelle donne ») le 4 mars 1933 pour sortir de la crise. L'État devient de plus en plus interventionniste. Les résultats du New Deal restent insuffisants.
« Nous ne pouvons faire l'économie de l'honnêteté face à la situation de notre pays aujourd'hui. Cette grande nation résistera, comme elle a résisté, se relèvera et prospérera. […] Cette nation demande de l'action, et de l'action maintenant. Notre première tâche, la plus importante, est de remettre les gens au travail. […] Cela peut être accompli en partie par un recrutement direct du gouvernement, en traitant le problème comme nous traiterions l'urgence d'une guerre, mais en accomplissant dans le même temps, grâce à ces emplois, les grands projets dont nous avons besoin pour stimuler et réorganiser l'utilisation de nos immenses ressources naturelles. […] Nous devons agir. Nous devons agir vite. »
Franklin Delano Roosevelt
Discours d'investiture
4 mars 1933
Le New Deal est un concept issu du titre d'un livre de l'économiste américain Stuart Chase, publié en 1932. Le gouvernement intervient massivement dans les politiques économiques et sociales.
Cette démarche sera plus tard théorisée par l'économiste britannique John Maynard Keynes (Théorie générale de l'emploi, de l'intérêt et de la monnaie, 1936), d'où son nom actuel de keynésianisme.
Entouré de son Brain Trust, une équipe informelle de jeunes intellectuels et universitaires, Roosevelt œuvre pour un programme de lois interventionnistes destinées à financer des grands travaux sur fonds publics.
Le programme finance l'aménagement hydraulique de la vallée du Tennessee.
Les lois interventionnistes entraînent des transformations majeures au sein de la société américaine :
- Le 12 mai 1933, l'Agricultural Adjustment Act (AAA) a pour objectif de relever les prix agricoles afin de soutenir le niveau de vie des fermiers. Il s'agit de réduire les cultures et les élevages en échange de subventions.
- Le 16 juin 1933, le National Industrial Recovery Act (NIRA) vise à diminuer les heures de travail dans l'industrie et à augmenter les salaires.
En 1935, le bilan reste mitigé, le pouvoir d'achat stagne. Plusieurs lois sont proposées au Congrès, dont les plus importantes concernent le monde syndical et la sécurité sociale. Critiqué par une majorité de la population, Roosevelt juge nécessaire d'accentuer l'aspect social du New Deal. L'intervention de l'État prend le pas sur le libéralisme. C'est à Washington que tout se fait, ou presque : les mesures d'urgence sont préparées à la Maison-Blanche, le Congrès se contente de les adopter.
Une crise mondiale et ses conséquences
La crise économique s'étend au reste du monde. Elle entraîne la montée du chômage et d'importants bouleversements politiques. On parle de cette période comme de la Grande Dépression.
L'extension de la crise économique au reste du monde
Les avoirs américains rapatriés aux États-Unis en urgence mettent en crise les systèmes bancaires et boursiers européens. Dès le début des années 1930, l'Europe et l'Océanie sont touchées. Les pays d'Europe ne tardent pas à connaître la crise, même si la France résiste d'abord bien à ses effets.
Les paiements en or sont stoppés. Les monnaies sont dépréciées. Les pays exportateurs de matières premières et de denrées agricoles sont les plus durement frappés : ils n'ont plus de débouchés, les prix s'effondrent. Les importations des pays cessent, ce qui entrave l'économie des États industriels exportateurs et compromet leur reprise économique.
Dans tous les pays, le PIB chute au moment de la crise.
L'Europe, notamment la France, résiste mieux à la crise. Au début des années 1930, la France semble prospère :
- Les réserves d'or sont importantes.
- Les industries modernes et dynamiques se développent (sidérurgie, constructions mécaniques, constructions électriques, etc.).
La France a un marché intérieur peu intégré au commerce mondial, ce qui retarde l'impact de la crise américaine de deux ans. Les revenus commerciaux et industriels chutent :
- d'un quart en 1931 ;
- de moitié en 1935.
La montée d'un chômage de masse
Partout, les chiffres du chômage sont en hausse, ce qui entraîne des émeutes et des manifestations. On parle de chômage de masse.
En 1932, on compte près de 40 millions de chômeurs.
En France, les salariés du secteur public et les retraités sont les plus durement touchés par la crise. Les femmes et les étrangers sont très fragilisés. Près de 500 000 chômeurs sont déclarés en 1935, mais ce chiffre ne prend pas en compte les femmes et les étrangers. On évalue le nombre réel à un million de personnes. Un fort sentiment d'insécurité s'installe. Des émeutes et des manifestations ont lieu un peu partout.
Les effets de la crise en France
Les bouleversements politiques
La crise provoque des bouleversements politiques : la naissance de régimes autoritaires et la montée de l'extrême droite. La France réussit à s'unir pour un temps derrière l'union des partis de la gauche, le Front populaire.
La naissance de régimes autoritaires et la montée de l'extrême droite
Le populisme est la réponse au chômage et à la misère dans de nombreux pays. Des régimes autoritaires voient le jour en Amérique latine. En Europe, on observe la montée de l'extrême droite, particulièrement en Allemagne où le nazisme profite de la crise pour s'implanter dans le paysage politique.
Populisme
Le populisme est un discours politique qui s'adresse aux classes populaires. Ce discours critique le système en place et ses représentants.
Le populisme repose sur un homme fort et un discours tourné vers les foules. En politique, le populisme fonctionne particulièrement bien en temps de crise, les classes populaires ont besoin de solution à leurs problèmes. C'est la raison pour laquelle des régimes autoritaires sont peu à peu mis en place en Amérique latine.
Carte des régimes autoritaires en Amérique latine dans les années 1930
© L'Histoire
L'Argentine, le Brésil, l'Équateur, le Guatemala, Panama, le Pérou, le Salvador et le Venezuela sont victimes de coups d'États entre 1930 et 1933.
Le 3 novembre 1930, Getulio Vargas réalise un coup d'État au Brésil. Il fonde l'Estado Novo (« État nouveau »), régime corporatiste, en 1937.
Les coups d'États militaires ou les coups de force politiques se multiplient à travers le monde :
- la révolution bolchévique ;
- le fascisme italien ;
- la dictature de Primo de Rivera (1923-1930) en Espagne ;
- la dictature de Pilsudski (1929-1935) en Pologne.
L'Allemagne est l'un des pays les plus touchés par la crise. En effet, sa situation financière est déjà fragile, elle doit se reconstruire et verser des indemnités de guerre pour payer la reconstruction des autres pays après la Première Guerre mondiale. L'augmentation du chômage favorise la montée en puissance du parti nazi et de son leader, Adolf Hitler.
L'Allemagne se ferme bien. Elle devient l'alliée économique de pays ruraux d'Europe de l'Est et d'Amérique latine où les régimes sont les plus autoritaires.
En France, l'expérience du Front populaire
En France, la crise économique favorise la progression du Front populaire qui remporte les élections législatives de mai 1936. Une série de mesures sociales sont prises, comme les accords de Matignon, qui sont très populaires. Malgré des résultats positifs, le Front populaire ne parvient pas à résorber la crise. Léon Blum démissionne en juin 1937.
Entre 1920 et 1940, la durée moyenne d'un gouvernement français est de sept mois. Les institutions sont de plus en plus dysfonctionnelles. Des scandales financiers compromettant des hommes politiques choquent la population.
L'affaire Stavisky, scandale politico-financier, cristallise l'exaspération contre le régime et débouche sur une émeute le 6 février 1934.
© Wikimédia Commons
Le Front populaire naît du rapprochement des partis de gauche après l'émeute du 6 février 1934. Dès le 12 février, les syndicats s'associent à la SFIO et aux communistes pour organiser une journée de grève et de manifestations. En juillet 1934, les partis de gauche parviennent à un accord. Le Front populaire se constitue en 1935 pour élaborer un programme autour de trois revendications : le pain, la paix et la liberté.
Front populaire
Le Front populaire est une coalition de partis de gauche qui réunit les trois principaux partis de la gauche : la SFIO, le parti radical et le parti communiste. D'autres mouvements en font partie.
Le Front populaire remporte les élections législatives de mai 1936.
La chambre élue en 1936
© Wikipédia
Léon Blum devient président du Conseil. Cette victoire déclenche un immense espoir parmi les travailleurs. La joie des travailleurs se traduit par une vague de grèves sans précédent qui secoue tous les secteurs d'activité. Les occupations d'usines prennent des allures de fêtes populaires.
Au moment des grèves, 2 millions de personnes cessent de travailler.
L'État devient médiateur pour trouver un accord entre représentants de la CGT et patrons. Le 7 juin 1936, les accords de Matignon sont signés. Ils prévoient des hausses de salaires, la généralisation des conventions collectives, le renforcement du droit syndical dans les entreprises.
« Article 1 - La délégation patronale admet l'établissement immédiat de contrats collectifs de travail.
Article 3 - L'observation des lois s'imposant à tous les citoyens, les employeurs reconnaissent la liberté d'opinion, ainsi que le droit pour les travailleurs d'adhérer librement et d'appartenir à un syndicat professionnel […] Les employeurs s'engagent à ne pas prendre en considération le fait d'appartenir ou de ne pas appartenir à un syndicat pour arrêter leurs décision en ce qui concerne l'embauchage, la conduite ou la répartition du travail, les mesures de discipline ou de congédiement. […]
Article 4 - Les salaires réels pratiqués pour tous les ouvriers à la date du 25 mai 1936 seront, du jour de la reprise du travail, rajustés suivant une échelle décroissante commençant à 15 % pour les salaires les moins élevés pour arriver à 7 % pour les salaires les plus élevés […].
Article 5 – […] dans chaque établissement comprenant plus de dix ouvriers, […] il sera institué deux titulaires ou plusieurs délégués ouvriers (titulaires ou suppléants) suivant l'importance de l'établissement. Ces délégués ont qualités pour présenter à la direction les réclamations individuelles qui n'auraient pas été directement satisfaites, visant l'application des lois, décrets, règlements du Code du travail […]
Article 6 - La délégation patronale s'engage à ce qu'il ne soit pris aucune sanction pour faits de grève. »
Les accords de Matignon
7 juin 1936
Quelques jours après ces accords, l'Assemblée vote les 15 jours de congés payés et la semaine de 40 heures. Des mesures touchent également le domaine de la culture et de l'éducation :
- obligation scolaire portée à 14 ans ;
- création d'un secrétariat d'État aux sports et aux loisirs ;
- action en faveur du développement de la culture dans les couches populaires.
Dès l'automne 1936, des dissensions apparaissent entre les partis du Front populaire. La politique économique est un échec :
- hausse des prix qui annule la hausse des salaires ;
- augmentation du déficit commercial.
Léon Blum démissionne en juin 1937.