Les propriétés optiques de certains matériaux peuvent changer radicalement lorsqu'ils sont réduits à l'état de particules de tailles plus petites que les longueurs d'onde de la lumière visible. C'est le cas de l'or.
Vitrail exécuté par la manufacture de Sèvres pour une fenêtre du pavillon de l'Horloge au Louvres (1847)
Ce métal, jaune à l'état de pépite, donne une couleur proche du violet à certains vitraux d'église, dans lesquels il se trouve sous forme de nanoparticules dispersées. Encore plus surprenant, la couleur obtenue dépend de la taille des particules.
Les chimistes ont développé de nombreuses techniques afin de produire des nanoparticules d'or stables et de tailles diverses. La plus utilisée est la méthode développée par John Turkévich en 1951. La méthode de Turkévich propose de produire des nanoparticules d'or, métal de symbole Au, par réaction d'oxydoréduction entre une solution aqueuse d'ions tétrachloroaurate \ce{AuCl_{(aq)}} et une solution aqueuse d'ions citrate \ce{C6H5O7_{(aq)}^{3-}}. La solution d'ions tétrachloroaurate est dans un premier temps portée à ébullition au moyen d'un montage à reflux, puis la solution d'ions citrate est introduite par le haut du réfrigérant. Le reflux est maintenu pendant plusieurs minutes sous vive agitation.
La réaction de Turkévich est modélisée par l'équation de réaction écrite ci-après :
\ce{2 AuCl_{(aq)} + 3 C6H5O7^{3–}_{(aq)} - \gt 2 Au_{(s)} + 3 CO2(aq) + 3 H+_{(aq)} + 8 Cl^{-}_{(aq)} + 3 C5H4O5^{3–}_{(aq)}}
Cette réaction est totale.
Remarque : Outre les nanoparticules d'or, tous les produits formés lors de la réaction de Turkévich sont incolores.
On met en œuvre la méthode de Turkévich à partir de deux mélanges différents de réactifs présentés dans le tableau ci-dessous :
Concentration molaire en ions tétrachloroaurate \ce{AuCl4^{-}_{(aq)}} (en mol.L–1) | Volume de la solution aqueuse d'ions tétrachloroaurate (en ml) | Concentration molaire en ions citrate \ce{C6H5O7^{3-}_{(aq)}} (en mol.L–1) | Volume de la solution aqueuse d'ions citrate (en ml) | |
---|---|---|---|---|
Mélange n°1 | 2{,}5 \times 10^{-4} | 250 | 3{,}4 \times 10^{-2} | 1,4 |
Mélange n°2 | 1{,}0 \times 10^{-3} | 100 | 3{,}0 \times 10^{-2} | 1,0 |
Influence des conditions expérimentales sur la taille moyenne des nanoparticules
En faisant varier le rapport entre la quantité de matière initiale d'ions tétrachloroaurate \ce{AuCl4^{-}_{(aq)}}, notée nClAu (en mol) et la quantité initiale d'ions citrate, notée nCit (en mol), le chimiste G. Frens a réussi à produire en 1973 des nanoparticules d'or de tailles moyennes différentes. Le graphique ci-dessous présente un extrait des résultats des expériences de G. Frens.
Taille des nanoparticules en fonction du rapport entre la quantité de matière initiale d'ions tétrachloroaurate et la quantité initiale d‘ions citrate
D'après G. Frens - Controlled Nucleation for the Regulation of the Particle Size in Monodisperse Gold, Suspensions. Nature, 1973
Stabilité de nanoparticules d'or en solution
Sous l‘effet des forces de Van der Waals, les nanoparticules d'or en solution tendent à s'agglomérer pendant leur formation et à donner ainsi des particules bien plus grosses, lesquelles sédimentent.
Dans la méthode de Turkévich, les ions citrate, ainsi que leur produit d'oxydation les ions acétonedicarboxylate \ce{C5H4O5^{3–}_{(aq)}}, produisent un environnement de charge négative autour des nanoparticules en se fixant à leur surface. La force électrostatique et l'agitation thermique les maintiennent ainsi en suspension, à des distances moyennes suffisantes pour ne plus être sujettes aux forces de Van der Waals.
Il résulte de ce phénomène qu'une trop faible quantité initiale d'ions citrate conduit à des solutions de nanoparticules d'or instables. Lors de ses expériences, Turkévich a obtenu des solutions stables de nanoparticules d'or uniquement lorsque la quantité initiale d‘ions citrate était supérieure au tiers de la quantité nécessaire pour être dans les proportions stœchiométriques avec les ions tétrachloroaurate initialement introduits dans le mélange réactionnel.
Propriétés optiques des nanoparticules d'or
Lorsque des nanoparticules d'or sont soumises à un champ électromagnétique dont la longueur d'onde est beaucoup plus grande que la taille des nanoparticules, il se produit un phénomène de résonance pour une longueur d'onde caractéristique dépendant notamment de leur taille.
Ce phénomène de résonance se traduit dans le spectre d'absorption UV-Visible des nanoparticules d'or en suspension par une bande d'absorption présentant un maximum pour la longueur d'onde de résonance.
Les spectres d'absorption de nanoparticules de tailles diverses sont donnés ci-dessous.
Spectre d'absorption UV-visible pour différentes tailles de nanoparticules d'or
D'après M.A. El-Sayed, S. Link. Size and temperature dependence of the plasmon absorption of colloidal gold nanoparticles. J. Phys. Chem. B. 1999, Vol. 103, pp. 4212-4217.
Cercle chromatique et correspondance entre couleur et longueur d'onde
Sur le cercle chromatique ci-dessous, les couleurs complémentaires sont diamétralement opposées.
On se propose de déterminer le mélange qui permet d'obtenir une solution stable de nanoparticules d'or.
D'après l'équation de la réaction de Turkévich, quelle relation lie les quantités de matière des ions tétrachloroaurate et celle des ions citrate lorsque ces réactifs sont introduits dans les proportions stœchiométriques ?
À partir des documents, à quelle condition sur la quantité de matière des ions citrate la solution de nanoparticules sera-t-elle stable ?
Que peut-on en déduire quant au rapport des quantités de matière \dfrac{n_{AuCl}}{n_{Cit}} ?
Quelle est l'expression de la quantité de matière d'un soluté en fonction de sa concentration et du volume de la solution ?
Par déduction, quelle est la valeur du rapport \dfrac{n_{AuCl}}{n_{Cit}} pour chaque mélange ?
Quel est, donc, le seul mélange qui permet d'obtenir une solution stable ?
On cherche à déterminer la couleur de la solution obtenue.
D'après le document 3, de quoi dépend-elle ?
Sachant que pour la solution préparée \dfrac{n_{ClAu}}{n_{Cit}} = 1{,}3, quelle est la construction correcte donnant la taille des particules ?
D'après le document 3, quelle est l'influence de la taille des particules sur la longueur d'onde correspondant au maximum d'absorption ?
Quelle est la construction correcte donnant la longueur d'onde correspondant au maximum d'absorption pour des particules de taille de 48 nm et 99 nm ?
Dans la solution obtenue, la taille des particules est de 78 nm.
Par déduction, quel est l'encadrement correct de la longueur correspondant au maximum d'absorption de cette solution ?
Quelle est donc la couleur absorbée principalement par la solution ?
Dans le cercle chromatique, comment sont positionnées des couleurs complémentaires ?
Par déduction, quelle est la couleur de la solution ?