Sommaire
ILes fondements de l'intervention de l'ÉtatAPourquoi et comment les pouvoirs publics interviennent-ils ?1Les raisons de l'intervention publique2Les moyens de l'intervention publiqueBLes fonctions économiques de l'État1La fonction d'allocation des ressources2La fonction de répartition des revenus3La fonction de stabilisationCDifférents niveaux d'interventionIIComment le budget de l'État permet-il d'agir sur l'économie ?ALes dépenses publiques1Le budget public2La structure des dépenses publiques3La croissance des dépenses publiquesBLes prélèvements obligatoiresCDéficit et dette1Définitions2Les effets de l'emprunt publicIIILes politiques conjoncturelles : un moyen de régulation de l'activité économiqueALes grands déséquilibres macroéconomiques1La dynamique de la demande globale2Le chômage3L'inflation4Déséquilibre extérieurBLes politiques conjoncturelles1Les objectifs et les différents types de politiques conjoncturelles2Les politiques budgétaires3Les politiques monétaires4Les politiques conjoncturelles en union monétaireL'existence de défaillances de marché rend nécessaire l'intervention de l'État. Les fonctions de l'État, soit l'allocation de ressources, la stabilisation de l'économie et la fonction de répartition, fondent son intervention sur le plan économique mais aussi en termes de justice sociale. L'État peut ainsi utiliser son budget pour financer la production non marchande. Les prélèvements obligatoires permettent par ailleurs de modifier les incitations des agents. Enfin, les politiques conjoncturelles permettent de réguler les grands déséquilibres macroéconomiques.
Les fondements de l'intervention de l'État
Pourquoi et comment les pouvoirs publics interviennent-ils ?
Les raisons de l'intervention publique
Les fonctions mêmes de l'État ont évolué au cours du temps, ce qui a modifié progressivement les raisons de son intervention.
Les marchés ne peuvent exister sans un cadre institutionnel, notamment sans l'existence de droits de propriété. De plus, laissé à la seule initiative des acteurs privés, le fonctionnement du marché fait état de diverses défaillances conduisant à une situation peu avantageuse économiquement et socialement parlant.
Le marché est ainsi impuissant à :
- Fournir des biens collectifs comme la santé et l'éducation, car le rendement privé est inférieur au rendement social.
- Prendre en charge les besoins des individus défavorisés.
- Prendre en charge les externalités comme la pollution.
- Assurer une allocation optimale des ressources.
- Réguler des déséquilibres macroéconomiques comme le chômage.
L'État remplit ainsi des missions d'intérêt général, assurées par les services publics à la charge des administrations publiques ou de certaines entreprises (privées ou publiques).
Les missions de service public permettent ainsi de pallier en partie les défaillances de marché et leur incapacité à produire des biens collectifs.
Service public
Le service public désigne toute activité économique d'intérêt général s'exerçant sous l'égide des pouvoirs publics.
Par exemple, l'éducation et l'électricité sont des services publics.
L'intervention de l'État s'est accrue depuis le XIXe siècle. "L'État gendarme" assurait jusqu'au début du XXe siècle des fonctions régaliennes (justice, protection du territoire) et prenait en charge certains biens collectifs comme l'éducation ou la santé.
L'intervention de l'État dans le domaine économique et social s'est donc faite au cours du XXe siècle avec le développement de l'État-providence : il prend ainsi en charge le bien-être matériel des populations. L'État-providence se rattache à la mise en œuvre et au déploiement des mécanismes de la protection sociale, mais également à son intervention pour stimuler la croissance économique et réduire les inégalités.
À partir des années 1980, on assiste à un désengagement progressif de l'État dans un contexte simultané de mondialisation, de construction européenne et de retour des idées libérales.
Les moyens de l'intervention publique
La puissance publique peut intervenir :
- Par des mesures budgétaires : l'État va utiliser les dépenses et les recettes publiques.
- Par des mesures réglementaires, qui vont influer sur les choix des agents.
L'intervention publique modifie ainsi le comportement des agents à plus ou moins long terme par l'incitation ou la contrainte.
En France, le schéma national des infrastructures de 2010 a donné la priorité au transport ferroviaire. Les investissements publics devaient donc favoriser le transport ferroviaire de marchandises et le déploiement du réseau. Cette orientation des dépenses de l'État était nécessaire afin d'assurer le développement de ces infrastructures. En effet, d'une part, ce développement nécessite des investissements très lourds que les entreprises peuvent difficilement se permettre. D'autre part, ces choix d'investissements sont déterminés par la prise en compte du bien-être général à long terme, notamment dans la prise en compte des enjeux environnementaux (les transports collectifs ferroviaires étant moins polluants que les voitures individuelles). Ces investissements n'auraient donc pas été effectués par des entreprises, car celles-ci recherchent le profit et non le bien-être général, et raisonnent plus à court terme qu'à long terme.
La pollution constitue une externalité négative qui n'est pas prise en charge par le marché. Pour y remédier, les pouvoirs publics peuvent imposer des contraintes, comme par exemple la normalisation des pots d'échappement sur les véhicules. Ils peuvent aussi inciter les agents économiques à réduire leur pollution, en proposant par exemple des primes lors de l'installation de panneaux photovoltaïques.
Les fonctions économiques de l'État
Les fonctions économiques de l'État sont :
- La fonction d'allocation pour pallier les défaillances de marché
- La fonction de répartition des revenus dans un souci de justice sociale
- La fonction de stabilisation afin de lutter contre les déséquilibres macroéconomiques
La fonction d'allocation des ressources
L'État doit permettre de rétablir une allocation optimale des ressources. Il peut ainsi modifier l'affectation des ressources entre les agents, conformément à l'objectif d'intérêt général pour remédier aux défaillances de marché et rétablir une concurrence juste.
Dans le cas des biens publics, comme l'éclairage public, le marché est défaillant à fournir les biens aux consommateurs : personne ne veut payer l'éclairage public pour tout le monde. Il est donc optimal que ce soit l'État qui prenne en charge cette production et alloue les ressources nécessaires à l'éclairage public, en prélevant équitablement une partie du coût auprès des citoyens via les impôts.
La fonction de répartition des revenus
Le fonctionnement du marché peut aboutir à des situations économiques et sociales qui ne sont pas jugées équitables par la société. La fonction de répartition des revenus consiste donc à lutter contre les inégalités et à assurer les individus contre un certain nombre de risques sociaux. Cette fonction s'exerce par une réglementation attenante aux revenus primaires telle que l'instauration d'un salaire minimum, et par le biais des revenus de transferts issus des prélèvements obligatoires (impôts et cotisations sociales).
On distingue deux logiques :
- Logique assurantielle : appelée aussi système bismarckien, du nom du chancelier allemand qui fonde entre 1880 et 1890 un système d'assurance. Dans ce système, les prestations sociales sont contributives : la protection sociale est obligatoire et fondée sur le travail, elle repose sur le versement de cotisations sociales, proportionnelles au salaire. Seuls ceux qui travaillent ont ainsi droit à une protection sociale.
- Logique assistancielle : appelée également système beveridgien, du nom de l'économiste britannique qui, à la demande du gouvernement en 1942, a proposé une refonte du système de protection sociale. Dans ce système, la protection sociale est universelle : l'ensemble de la population est protégé et le financement se fait par l'impôt. Le montant des prestations n'est pas fondé sur le risque de perte de revenus, mais sur le besoin des individus.
En France, le système de protection sociale est mixte.
Les risques sociaux sont par exemple la maladie, les accidents de travail, la vieillesse, le chômage ou encore la maternité.
La fonction de stabilisation
La fonction de stabilisation assigne à l'État la tâche de lutter contre les déséquilibres macroéconomiques (au niveau de l'activité économique nationale tout entière) liés à l'instabilité de l'activité économique. Les principaux déséquilibres sont :
- L'inflation, une hausse générale et durable des prix.
- Le chômage, le fait qu'une partie de la population active soit inoccupée.
- La récession, une diminution du PIB.
- Le déficit courant, lorsque le solde de la balance des transactions courantes est négatif.
Cette fonction a pris son sens lorsque certains économistes comme John Maynard Keynes ont mis en évidence l'intérêt de l'intervention de l'État pour corriger les déséquilibres macroéconomiques que le marché ne pouvait résoudre. Avant la Grande Dépression des années 1930, les économistes considéraient majoritairement que le marché était autorégulateur. La crise de 1929 et ses conséquences économiques, sociales et politiques ont suscité une demande d'intervention de l'État de la part des agents économiques. Keynes a alors progressivement imposé l'idée que des politiques conjoncturelles relançant la demande pouvaient venir en aide aux économies déprimées.
Balance des transactions courantes
La balance des transactions courantes, ou compte de transactions courantes, est un compte statistique qui retrace l'ensemble des échanges de biens et de services entre un pays donné et l'étranger. Ce compte regroupe la balance commerciale (import et export de biens), les échanges de services, de revenus et de transferts courants (par exemple, la contribution de la France au budget de l'Union européenne est un transfert courant de la France vers l'extérieur).
Ne pas confondre solde commercial et solde courant :
- Le solde commercial correspond au solde de la balance commerciale, c'est-à-dire les échanges de marchandises (de biens matériels) entre un pays et le reste du monde.
- La balance de transactions courantes (solde courant) est composée de la balance commerciale, mais aussi des balances de services, revenus et transferts courants.
Différents niveaux d'intervention
En Europe, l'intervention publique se fait à plusieurs niveaux de la collectivité :
- État central
- Collectivités territoriales (régions, départements et communes)
- Instances européennes
Les niveaux de pouvoir se différencient par leurs domaines de compétences et par leur degré d'autonomie.
En France, les compétences des administrations publiques sont délimitées par l'État au travers des lois de décentralisation. Ces compétences relèvent soit de la contrainte (imposée par l'État et supportée par les collectivités) soit d'une relative autonomie (gestion de l'économie locale).
L'Union européenne dispose de compétences exclusives (lorsqu'elle seule peut légiférer dans un domaine), partagées (lorsqu'elle partage avec l'État le droit de légiférer dans un domaine) et d'appui (lorsqu'elle ne peut que soutenir ou compléter la législation d'un État dans un domaine).
Comment le budget de l'État permet-il d'agir sur l'économie ?
Les dépenses publiques
Le budget public
Le budget public est constitué des dépenses et recettes publiques des :
- Administrations publiques centrales (APUC), l'État et l'administration centrale, dont le budget est voté annuellement sous forme d'une loi des finances par le Parlement. C'est ce que l'on appelle le budget de l'État, au sens strict.
- Administrations publiques locales (APUL), les communes, départements et régions, qui votent annuellement leur budget.
- Administrations de sécurité sociale (ASSO), dont le budget (Projet de loi de financement de la Sécurité sociale) est voté annuellement par le Parlement.
Avec la décentralisation, une partie du budget des administrations centrales a été déplacée vers les administrations locales en même temps que les compétences étaient transférées de l'État central vers les collectivités locales. L'État pilote une partie des investissements réalisés par les APUL via les subventions.
Les dépenses des administrations publiques sont financées :
- Par des recettes publiques, essentiellement constituées des impôts, taxes et cotisations sociales
- Par des emprunts publics
En 2013, les dépenses publiques ont représenté 57 % du PIB, et les recettes publiques 53 % du PIB. Lorsque, sur une année, les dépenses publiques sont supérieures aux recettes publiques, l'État est en situation de déficit. En 2013, le déficit public a donc été d'environ 4 % du PIB. Pour compenser ce décalage, il s'endette : la France a ainsi accumulé une dette publique d'environ 2000 milliards d'euros, soit approximativement le montant du PIB annuel.
Au niveau européen, le Pacte de stabilité et de croissance (PSC) impose à terme aux États membres d'avoir des budgets proches de l'équilibre, voire excédentaires. Le PSC prévoit ainsi des "limites" : le déficit public ne devrait pas excéder 3 % du PIB. Face à la récurrence des déficits publics et aux difficultés conjoncturelles, l'Union européenne concède des dépassements, moyennant une discipline budgétaire et un objectif de réduction des déficits publics.
La structure des dépenses publiques
Les dépenses publiques sont l'ensemble des dépenses engagées pour couvrir les dépenses courantes d'administration, pour les services publics et la redistribution.
Répartition par nature de la dépense publique
Rapport sur la dépense publique et son évolution, 2013
On peut noter que les dépenses des ASSO sont les dépenses les plus importantes : en France, ces administrations sont principalement la Sécurité sociale constituée de quatre branches (maladie, vieillesse, famille, accidents du travail) et l'Unédic (chargée de l'assurance-chômage, en relation avec Pôle emploi). Au sein de ces dépenses, la vieillesse et la maladie représentent respectivement 45 % et 27 % des prestations sociales selon un rapport de la DRESS en 2013.
Les dépenses publiques permettent de soutenir la consommation et l'investissement, notamment par le biais des revenus de transfert distribués par les ASSO. Les revenus de transfert visent une redistribution équitable des revenus dans la société, afin de permettre à tous d'avoir accès aux normes minimales de consommation.
Les dépenses publiques donnent souvent lieu à une production non marchande, une production de services qui ne sont pas vendus à prix de marché. Ainsi, l'activité des administrations publiques est une production qui n'est pas vendue, mais offerte aux citoyens. C'est le cas des services d'administration centrale (les ministères, par exemple) mais aussi des agents de l'Éducation nationale ou de la Défense nationale : les citoyens n'achètent pas sur un marché l'éducation publique ou la protection des armées.
La croissance des dépenses publiques
Les dépenses publiques des États ont fortement augmenté au cours du XXe siècle. On le mesure par leur poids dans le PIB : en 1912, les dépenses publiques représentaient 13 % du PIB français, alors qu'en 2010, elles représentaient 57 %.
Cette forte croissance des dépenses publiques au cours de la seconde moitié du XXe siècle s'explique avant tout par l'augmentation des dépenses publiques d'éducation, de retraite et de santé. Ces deux dernières augmentent avec le vieillissement de la population.
Les prélèvements obligatoires
En 2013, les recettes publiques représentaient 53 % du PIB. Pour l'essentiel, elles sont constituées de prélèvements obligatoires : en 2013, ils représentaient 44 % du PIB, soit plus de 80 % des recettes publiques.
Prélèvements obligatoires
Les prélèvements obligatoires sont des versements effectués par les agents économiques aux administrations publiques (l'État, les APUL et les ASSO), ils sont constitués d'impôts et de cotisations sociales.
Les prélèvements obligatoires sont des recettes fiscales qui constituent la majeure partie des recettes publiques. Le taux de prélèvements obligatoires dépend surtout de la conjoncture économique.
Ces prélèvements sont sans contrepartie directe, c'est-à-dire que la consommation d'un service public ne dépend pas des montants versés. Les impôts, sauf exception, ne sont pas affectés à une dépense particulière. Les cotisations sociales, en revanche, ouvrent des droits à des prestations sociales et sont versées aux ASSO.
On distingue les impôts directs et indirects :
- Les impôts directs sont ceux qui sont supportés et payés directement par la même personne.
- Les impôts indirects sont payés à l'État par un agent, mais c'est un autre agent qui doit en supporter le coût.
La TVA est collectée par l'État auprès des vendeurs, mais ceux-ci la répercutent sur le prix de vente. Ce sont donc les consommateurs qui supportent le coût de la TVA. La TVA est donc bien un impôt indirect.
Les prélèvements obligatoires peuvent être :
- Forfaitaires : ce sont des sommes fixes, indépendantes des ressources du contribuable et donc des capacités productives. Exemple : la redevance télévisuelle.
- Proportionnels : ils taxent les revenus (comme la Cotisation sociale généralisée) ou la consommation (comme la TVA) selon un taux unique. Le montant est donc proportionnel aux ressources ou aux dépenses.
- Progressifs : l'impôt progressif est un impôt dont le taux augmente avec la valeur de l'élément qui est taxé (on appelle cet élément "l'assiette taxée").
C'est par exemple le cas de l'impôt sur le revenu, qui se calcule par "tranches", et qui fonctionne de la même façon pour tous les ménages :
- Si le ménage gagne moins de 9690 € par an, le taux d'imposition est de 0 % : il n'est pas taxé.
- Si le ménage gagne entre 9690 et 26 674 € par an, les premiers 9690 € de revenu ne sont pas taxés ; les euros de revenu supplémentaires sont taxés à 14 %.
- Si le ménage gagne entre 26 674 et 71 754 € par an, les premiers 9690 € de revenu ne sont pas taxés ; les 26 674 - 9690 = 16 948 € suivants sont taxés à 14 % ; les euros de revenu restant sont taxés à 30 %.
Taux de prélèvements obligatoires
\text{Taux de prélèvements obligatoires = }\dfrac{\text{Prélèvements obligatoires}}{PIB} \times 100
Le taux de prélèvements obligatoires en France en 2013 était de 46 %.
Les recettes non fiscales de l'État constituent une partie des recettes publiques et ne sont pas issues des prélèvements obligatoires. Elles sont par exemple constituées des amendes.
Déficit et dette
Définitions
Déficit public
Le déficit public correspond au solde négatif du budget de l'ensemble des administrations publiques (l'État, les collectivités territoriales et les administrations de Sécurité sociale). Les dépenses publiques sont supérieures aux recettes publiques.
En 2013, le déficit public de la France s'élève à 4,3 % du PIB, soit 87,6 milliards d'euros selon l'INSEE.
Dette publique
La dette publique est l'ensemble des emprunts contractés par l'État (généralement pour couvrir le déficit public), les administrations publiques locales et les administrations de la Sécurité sociale.
En 2013, la dette publique de la France représentait 93,5 % du PIB. L'INSEE annonçait 95,2 % à la fin du troisième trimestre 2014 (soit plus de 2000 milliards d'euros).
Les effets de l'emprunt public
Le déficit public peut être financé de différentes façons :
- La création monétaire : on parle dans ce cas de monétisation du déficit, dont le risque principal est l'inflation. En Europe, le traité de Maastricht interdit à la Banque centrale de financer directement les gouvernements.
- Les impôts
- L'emprunt public : le gouvernement émet des titres de créances (les bons du Trésor par exemple) et les vend à des investisseurs, leur donnant droit pendant une période donnée à des versements en capital et des intérêts. Les emprunts successifs alimentent la dette publique.
Lorsque la dette est soutenable, l'endettement peut jouer un rôle positif sur la croissance en dynamisant l'offre et la demande.
Il peut aussi créer un effet d'éviction : l'épargne disponible se déplace vers le secteur public, au détriment des autres agents économiques, ce qui peut peser sur les investissements.
Lorsque la dette n'est pas soutenable, les gouvernements risquent de ne plus être capables de rembourser, au risque de faire défaut, c'est-à-dire de se déclarer dans l'incapacité de rembourser ses dettes (ce qui revient à la faillite d'un État).
La soutenabilité de la dette dépend à la fois de la croissance (qui fait augmenter les recettes) et des taux d'intérêt que l'État se voit appliquer. Une augmentation des taux d'intérêt peut créer un effet boule de neige, puisqu'ils sont une charge pesant dans le budget de l'État. Si les taux d'intérêt augmentent, le poids de cette charge fait augmenter le déficit public, et menace la soutenabilité de la dette. Alors, les créanciers perdent confiance dans la capacité de l'État à rembourser ses dettes, et pour compenser le risque de crédit, augmentent encore les taux d'intérêt. Cet effet est accéléré lorsque les taux d'intérêt payés sont supérieurs au taux de croissance du PIB, car dans ce cas, la dette croît plus rapidement que la richesse du pays.
La dégradation des finances publiques, la faiblesse de la croissance et l'incapacité des États à faire baisser le ratio dette publique / PIB peut provoquer une crise des dettes souveraines (ce sont les dettes émises ou garanties par les États), c'est-à-dire une crise de confiance en la capacité des États à continuer de garantir leurs dettes.
Les politiques conjoncturelles : un moyen de régulation de l'activité économique
Les grands déséquilibres macroéconomiques
La dynamique de la demande globale
Demande globale
La demande globale est constituée de la demande intérieure et de la demande extérieure. Elle comprend donc la demande totale du secteur public et privé (consommation finale, consommation intermédiaire, investissement), aussi bien exprimée par les agents à l'intérieur du pays que par les agents extérieurs (les exportations).
L'équilibre emplois/ressources
Avec X les exportations, C et I la consommation et l'investissement des agents privés (entreprises, ménages) en biens et services, G les dépenses des APU en biens et services, et M les importations. VS représente les variations de stocks.
\text{PIB + M = C + G + I + X ± VS}
- La demande intérieure est constituée de C, G et I.
- L'offre intérieure est composée par le PIB.
- L'offre et la demande extérieure sont représentées respectivement par M et X.
L'étude de cet équilibre permet de formuler des hypothèses :
- Si la demande intérieure est supérieure à l'offre intérieure : cela peut se traduire par M > X.
- Si la demande globale augmente plus rapidement que l'offre globale : cela peut d'une part se traduire par une hausse des prix et des tensions inflationnistes, mais, d'autre part, cela pourrait traduire une reprise de l'activité à la période suivante.
- Si la demande globale est inférieure à l'offre globale, cela revient à une augmentation des stocks. À la période suivante, cela peut conduire à un ralentissement de l'activité et au chômage.
Le chômage
Chômage
Le chômage désigne l'état des personnes sans emploi, disponibles pour travailler et recherchant activement un emploi.
Deux grands indicateurs de mesure du chômage coexistent en France :
- Les critères retenus par l'INSEE correspondent à la définition du BIT (Bureau international du travail) : sont au chômage les individus en âge de travailler, n'ayant pas exercé d'activité au cours de la semaine précédant l'enquête, et recherchant activement un emploi (ils doivent préciser la nature de l'emploi cherché et les démarches effectives effectuées).
-
Pour Pôle emploi, les chômeurs correspondent aux DEFM (Demandeurs d'emploi en fin de mois). Ce sont les personnes sans emploi, inscrites sur les listes de Pôle emploi, immédiatement disponibles, et tenues d'accomplir des actes positifs de recherche d'emploi.
Ces deux indicateurs ne mesurent donc pas la même chose, et il peut y avoir des écarts entre les deux.
Lorsque le nombre de chômeurs diminue, cela peut signifier qu'une partie des personnes au chômage ont retrouvé un emploi, mais cela peut aussi être dû au fait que certains chômeurs cessent de chercher un emploi. Ces derniers ne sont plus des chômeurs, mais des inactifs. On les appelle cependant souvent les "chômeurs découragés".
On trouve deux explications majeures à l'existence d'un chômage de masse :
- Pour les économistes classiques, le marché du travail devrait fonctionner comme un marché concurrentiel. Le niveau d'emploi correspondrait à un salaire d'équilibre résultant de la confrontation de l'offre et de la demande ; le chômage serait alors un phénomène volontaire, lié au refus des individus de diminuer leurs revendications salariales (c'est-à-dire le refus de travailler pour un salaire plus faible). L'existence d'un salaire minimum est un frein au fonctionnement du marché et fait apparaître un chômage involontaire : des individus seraient prêts à travailler pour un salaire plus bas, mais les employeurs n'ont pas le droit de les payer ainsi.
- Pour les économistes keynésiens, le marché du travail n'est pas un marché comme les autres. Lorsque la demande de biens et services diminue, lors d'une récession par exemple, les entreprises diminuent la production et le nombre d'embauches. Le chômage est involontaire et lié au faible niveau d'activité économique. Keynes préconise ainsi des politiques volontaristes de la demande pour soutenir l'activité et l'emploi.
Taux de chômage
\text{Taux de chômage =}\dfrac{\text{Chômeurs}}{\text{Population active totale}} \times100
Keynes parle d'un équilibre de sous-emploi. En effet, selon lui, la demande effective dépend de la demande anticipée de biens et services par les entrepreneurs. Cette demande détermine un niveau de production et d'investissement permettant de fixer un niveau d'emploi. Or, pour Keynes, la demande anticipée dépend de la conjoncture et du climat de confiance des entrepreneurs (il introduit ainsi des variables psychologiques).
Si la demande effective est faible, le niveau de production se fixe à un niveau qui ne correspond pas au plein-emploi.
L'inflation
Inflation
L'inflation correspond à une hausse durable et généralisée des prix.
Déflation
La déflation correspond à une baisse des prix.
L'inflation est mesurée par l'Indice des prix à la consommation (IPC). Cet instrument statistique est édité chaque mois. C'est une moyenne pondérée des prix d'un panier de biens consommés par les ménages et regroupés en différents postes. La pondération correspond à la part de chacun dans la consommation moyenne des Français.
L'inflation peut être liée à :
- Une augmentation de la demande : si la demande devient supérieure à l'offre, cela se traduit par une hausse des prix.
- Une augmentation des coûts de production des entreprises : si les coûts de production augmentent, les entreprises répercutent cette hausse sur les prix.
- L'augmentation du prix des importations (on parle alors d'inflation importée). C'est par exemple le cas si le prix des matières premières, comme le pétrole, augmente : cela fait augmenter le prix de tous les biens qui en sont constitués.
- Une création excessive de monnaie : si le niveau de monnaie en circulation augmente, les commerçants peuvent augmenter leurs prix sans diminuer le pouvoir d'achat des consommateurs.
L'inflation a plusieurs conséquences :
- Elle diminue la valeur de la monnaie. Si un bien qui coûtait 1 € coûte désormais 2 €, cela signifie qu'une unité de monnaie ne peut plus acheter un bien, mais seulement un demi-bien : la monnaie perd de sa valeur réelle.
- Si les salaires n'augmentent pas au même rythme que les prix, l'inflation rogne le pouvoir d'achat des consommateurs.
- L'inflation dégrade la compétitivité-prix d'une économie nationale et provoque un ralentissement des exportations et une augmentation des importations, car les produits nationaux coûtent relativement plus cher que les produits du reste du monde.
- Elle altère les anticipations des agents sur les prix futurs.
- Elle est favorable aux débiteurs (ceux qui ont des dettes), car elle diminue le taux d'intérêt réel : l'État voit ainsi ses recettes progresser et sa dette diminuer en cas d'inflation. L'inflation fait diminuer la valeur de la monnaie et le débiteur peut donc rembourser sa dette avec de la monnaie qui vaut moins que la monnaie avec laquelle il a emprunté.
La déflation est également un phénomène risqué pour l'économie. Elle augmente le pouvoir d'achat et stimule la consommation à court terme, mais elle a aussi des conséquences économiques négatives importantes :
- Les consommateurs vont avoir tendance à repousser leurs achats, car ils anticipent que les prix vont continuer à baisser. Cela contribue à diminuer la demande et à ralentir l'activité économique, ce qui entretient la spirale déflationniste.
- La déflation augmente les taux d'intérêt réels. Les dettes doivent être remboursées dans une monnaie qui vaut plus que celle avec laquelle on avait emprunté.
Ne pas confondre déflation et désinflation. La désinflation correspond à un ralentissement de l'inflation, alors que la déflation correspond à une baisse des prix.
L'expérience de la période qui a précédé la crise de 2007-2008 montre que la mesure de l'inflation rend mal compte des déséquilibres monétaires : il conviendrait de prendre en compte le prix des actifs et pas seulement les prix à la consommation.
Déséquilibre extérieur
Le solde des flux extérieurs (échanges monétaires avec le reste du monde) est mesuré principalement par le solde des transactions courantes de la balance des paiements (aussi appelé "balance courante").
La balance des paiements est constituée de trois grands comptes :
- Le compte de transactions courantes, qui recense les échanges internationaux de biens et services (c'est la balance commerciale), de revenus et de transferts courants.
- Le compte financier, qui recense les investissements réalisés à l'étranger et ceux des entreprises étrangères sur le territoire national.
- Le compte de capital, qui recense les transferts de capitaux entre la France et l'étranger.
Un déséquilibre extérieur négatif (les flux entrants sont supérieurs aux flux sortants) peut provenir du dynamisme de la demande intérieure (augmentation des flux entrants) mais également de la faible compétitivité de l'économie (diminution des flux sortants).
Solde commercial
Le solde commercial de la balance des transactions courantes correspond au solde de la balance commerciale. C'est le solde entre les exportations et les importations de biens et services.
Solde courant
Le solde courant donne lieu à un déficit ou un excédent courant, c'est-à-dire un solde positif ou négatif de la balance des transactions courantes. Il se traduit par la capacité ou le besoin de financement de l'économie. Un déficit courant signifie qu'une économie doit faire appel à l'extérieur : elle consomme et investit plus qu'elle ne produit.
Taux de couverture
Le taux de couverture est le rapport entre les exportations et les importations d'un pays. Il peut être relatif à un produit ou à l'ensemble des échanges de biens et services. Il mesure l'équilibre des échanges extérieurs.
\text{Taux de couverture} =\dfrac{\text{Exportations}}{\text{Importations}}\times100
Déséquilibre extérieur
Le déséquilibre extérieur représente la différence entre les exportations et les importations. On utilise principalement le solde courant pour estimer le déséquilibre extérieur.
Le solde du commerce extérieur est la différence entre la valeur des exportations et celle des importations entre deux pays ou deux zones. Il peut être relatif à un produit ou à l'ensemble des échanges de produits (biens et services). C'est le rapport entre ces deux valeurs que mesure le taux de couverture.
Les politiques conjoncturelles
Les objectifs et les différents types de politiques conjoncturelles
Les politiques conjoncturelles des États suivent différents objectifs, que l'on peut résumer par la représentation graphique du "carré magique".
Le carré magique est une représentation imaginée par l'économiste britannique Nicholas Kaldor (1908 - 1986) afin de visualiser les objectifs de la politique conjoncturelle d'un pays. De par sa fonction de stabilisation, l'État poursuit quatre objectifs qu'il voudrait combiner : une croissance économique forte, un solde du commerce extérieur positif, des taux de chômage et d'inflation faibles.
Politiques conjoncturelles
Les politiques conjoncturelles sont des politiques de court terme et correspondent aux mesures prises par les autorités publiques sur les "grands équilibres" (taux de chômage, d'inflation, de croissance et solde extérieur).
Les politiques conjoncturelles sont dites :
- Expansionnistes (ou de relance) lorsqu'elles visent à renforcer la croissance et soutenir l'emploi.
- Restrictives (de rigueur, ou d'austérité) lorsqu'elles visent la réduction du déficit extérieur, de l'inflation mais également la maîtrise de l'endettement public.
Toutefois, les économies contemporaines mènent simultanément les deux types de mesures : les politiques sont donc affaire de dosage entre des objectifs parfois contradictoires.
Ces politiques doivent donc s'apprécier au travers de l'objectif et des canaux de transmission par lesquelles les politiques conjoncturelles agissent sur les déséquilibres.
Les politiques de la demande, d'inspiration keynésienne, ont pour objectif de stimuler la consommation des ménages et l'investissement des entreprises, afin de relancer la demande globale et de résorber le chômage. Ces politiques marquent la période des Trente Glorieuses, caractérisée par une forte inflation.
Les politiques de l'offre, d'inspiration libérale, visent davantage à soutenir l'offre, c'est-à-dire à rétablir la compétitivité des entreprises. Cela peut passer par des mesures d'allègement fiscal, des investissements dans la formation, une réduction du coût du travail, etc. Elles visent aussi à lutter contre l'inflation. Les années 1970 ont marqué un changement d'orientation des politiques économiques, avec l'apparition de la "stagflation" (c'est-à-dire à la fois un ralentissement de la croissance et une forte inflation) et l'insuffisance des politiques keynésiennes (incapables de résorber le chômage en période de stagflation).
Ne pas confondre politiques conjoncturelles et politiques structurelles. La politique conjoncturelle agit à court terme, alors que la politique structurelle vise à modifier sur le moyen et long terme les structures de l'économie.
Le dosage des politiques monétaires et budgétaires correspond à ce que l'on appelle la policy mix et correspond à une stratégique macroéconomique globale.
De plus, pour de nombreux économistes, politique de l'offre et politique de la demande sont par ailleurs loin d'être incompatibles.
Les politiques économiques conjoncturelles ne se distinguent pas uniquement selon leurs buts, mais aussi selon leurs moyens : c'est la distinction entre politique monétaire et politique budgétaire.
Les politiques budgétaires
Politique budgétaire
La politique budgétaire est une politique conjoncturelle qui cherche à agir sur l'activité économique en modulant les recettes et les dépenses de l'État.
On distingue les politiques budgétaires de relance et de rigueur :
- Une politique budgétaire expansionniste (relance) consiste à augmenter les dépenses publiques afin de stimuler la demande des ménages et l'investissement public. La demande intérieure augmente, d'où une augmentation de la production des entreprises, qui devrait se traduire par une hausse de l'emploi. Elle a pour effet immédiat une augmentation du déficit public.
- Une politique budgétaire de rigueur consiste à réduire les dépenses publiques et permet de lutter contre l'inflation et d'éviter également un creusement des déficits publics.
On parle de politique contra-cyclique lorsqu'une politique vise à inverser la conjoncture économique.
En période de ralentissement de la croissance, une politique budgétaire expansive doit permettre de relancer l'activité.
L'État peut ainsi mener des politiques de la demande : augmentation des salaires, notamment le salaire minimum pour soutenir la consommation, diminution de la fiscalité, investissements publics, etc.
Il peut également mener des politiques de l'offre comme l'allègement de certaines charges pour permettre aux entreprises d'être plus compétitives (et d'embaucher) ou encore le financement de la recherche et du développement.
La politique budgétaire est confrontée à plusieurs contraintes :
- La contrainte extérieure : la relance de la demande intérieure peut s'orienter en partie vers l'offre extérieure, c'est-à-dire faire progresser les importations. C'est particulièrement le cas dans une économie dont l'appareil productif est peu compétitif. L'augmentation des importations pèse alors sur le déficit extérieur.
- La contrainte budgétaire : les politiques de relance budgétaire augmentent le déficit public, lequel alimente la dette publique et augmente la charge de la dette.
Les politiques monétaires
Politique monétaire
La politique monétaire est une politique qui, pour agir sur la masse monétaire, augmente ou diminue le taux d'intérêt.
La politique monétaire est menée par les banques centrales. On distingue deux types de politiques monétaires :
- Une politique monétaire expansionniste qui consiste à augmenter la masse monétaire, l'objectif étant de stimuler l'activité économique. Cette politique passe par une baisse des taux d'intérêt directeurs, donc une diminution "du coût de l'argent". En effet, en diminuant les taux directeurs auxquels elle prête aux banques commerciales, la Banque centrale diminue le coût du crédit pour les banques commerciales. Celles-ci peuvent à leur tour diminuer les taux d'intérêt (et donc le coût des crédits) qu'elles accordent aux agents économiques (ménages et entreprises). L'investissement des entreprises et la consommation des ménages devraient donc augmenter, ce qui doit permettre, à terme, une croissance de l'emploi et de la production. Une création excessive de monnaie peut toutefois conduire à de l'inflation.
- Une politique monétaire restrictive qui diminue au contraire la masse monétaire, l'objectif principal étant de lutter contre l'inflation. Cette politique passe donc par une hausse des taux d'intérêt directeurs, qui limite ainsi l'octroi de crédits par les banques, entraînant une baisse de la demande et de l'investissement. Le risque est qu'en diminuant ainsi la demande, la croissance ralentisse.
Les politiques conjoncturelles en union monétaire
Les politiques budgétaires sont du ressort des États. Cependant, dans la zone euro, le Pacte de stabilité et de croissance (PSC) limite les possibilités de relance budgétaire, puisque le déficit des États doit rester sous les 3 % de PIB.
Les politiques monétaires sont elles aussi contraintes. L'union monétaire a conduit les membres de la zone euro à abandonner leur politique monétaire au profit d'une politique monétaire commune conduite par la Banque centrale européenne. L'objectif principal de la BCE est la lutte contre l'inflation. Elle a pour moyen le taux d'intérêt directeur, qui est le coût du crédit qu'elle accorde aux banques commerciales. Cependant, la crise actuelle a poussé la BCE à outrepasser ces règles. La BCE est intervenue pour sauver des banques de la faillite et limiter la récession en zone euro, et elle a mis en œuvre des politiques dites "non conventionnelles", c'est-à-dire passant par d'autres moyens que les taux d'intérêt directeurs : elle a notamment racheté des obligations d'États en difficulté (mécanisme appelé quantitive easing)
La Fed (la Banque centrale des USA), elle, poursuit un triple objectif : lutter contre l'inflation, assurer la croissance et le plein-emploi.
La difficulté de la politique monétaire commune en zone euro est que les différents pays de cette zone ont des caractéristiques différentes, et notamment des taux d'inflation différents. Les différents pays ont donc besoin de politiques monétaires différentes, adaptées à leur situation particulière.
Ainsi, le PSC et la politique monétaire commune rendent difficile la mise en place de politiques budgétaires de relance de la demande. Cela peut mettre en difficulté les pays où la croissance est faible et le taux de chômage élevé.