On donne les textes suivants extraits de la Sagesse des modernes de Luc Ferry (Texte A) et de L'Inespérée de Christian Bobin (Texte B).
Texte A
Lorsqu'on reproche à l'information de gommer la profondeur historique des drames qu'elle visualise, de quoi parle-t-on au juste ? Croit-on sérieusement que les reportages sur la Bosnie ou sur la Somalie auraient décervelé une population républicaine, consciente et informée, qui de toute éternité aurait brillé par ses compétences incomparables quant à l'histoire politique de ces deux pays ? À quel âge d'or mythique fait-on, ici, référence ? La réalité, de toute évidence, est que l'immense majorité du public ignorait jusqu'à l'existence même de la Bosnie et de la Somalie avant que la télévision ne s'emparât de leur sort. La vraie difficulté est tout autre qu'on ne le suggère lorsqu'on mesure implicitement l'information télévisée à l'aune d'un cours en Sorbonne : elle tient au fait qu'on ne peut, chaque soir, revenir sur l'histoire de l'Europe orientale ou de l'Afrique. Non seulement le public n'est pas le même qu'à l'amphithéâtre Descartes, mais il a la fâcheuse habitude d'être plus changeant encore. Le but essentiel d'une information ne peut être, dès lors, que de sensibiliser, d'abord, puis de donner l'envie ou le courage d'aller y voir de plus près, dans la presse écrite, puis dans les livres.
Texte B
Elle est sale. Même propre elle est sale. Elle est couverte d'or et d'excréments, d'enfants et de casseroles. Elle règne partout. Elle est comme une reine grasse et sale qui n'aurait plus rien à gouverner, ayant tout envahi, ayant tout contaminé de sa saleté foncière. Personne ne lui résiste. Elle règne en vertu d'une attirance éternelle vers le bas, vers le noir du temps. Elle est dans les prisons comme un calmant. Elle est en permanence dans certains pavillons d'hôpitaux psychiatriques. C'est dans ces endroits qu'elle est le mieux à sa place : on ne la regarde pas, on ne l'écoute pas, on la laisse radoter dans son coin, on met devant elle ceux dont on ne sait plus quoi faire. Les jours, dans les hôpitaux comme dans les prisons, sont plus longs que des jours. Il faut bien les passer. On lui fait garder les invalides mentaux, les prisonniers et les vieillards dans les maisons de retraite. Elle a infiniment moins de dignité que ces gens-là, assommés par l'âge, blessés par la Loi ou par la nature. Elle se moque parfaitement de cette dignité qui lui manque. Elle se contente de faire son travail. Son travail, c'est salir la douleur qui lui est confiée et tout agglomérer.
Quel est le thème commun aux deux textes ?
Quelles sont les thèses soutenues dans les textes ?