Sommaire
ILes formes du récit de voyageALes témoignages réelsBLes récits fictifsCLe voyage en poésieIILes raisons de voyagerADécouvrir et étudier des terres inexplorées et inconnuesBRaconter ses aventures et ses péripétiesCRencontrer l'autre et se rencontrer soi-mêmeLe voyage fascine les hommes. Il permet la découverte de trésors : de l'or, des épices, des bois précieux et rares, etc. Depuis l'Antiquité, les explorateurs ont le désir d'aller vers l'inconnu, de découvrir des lieux lointains et insoupçonnés. De nombreux textes littéraires retranscrivent les voyages réels ou s'en inspirent pour raconter des aventures qui font rêver les lecteurs.
Comment les voyages changent-ils la vision du monde et l'homme ? De quelle manière la littérature donne-t-elle à lire ces différentes aventures ?
Les formes du récit de voyage
Le récit de voyage est un genre littéraire à part entière. Il a une dimension informative et scientifique en donnant à voir la réalité. Le récit de voyage accorde également une grande place à l'imaginaire. Dans les formes du récit de voyage, on distingue les témoignages réels des récits fictifs. Par ailleurs, le thème du voyage est également très présent dans la poésie.
Les témoignages réels
Depuis les grandes découvertes jusqu'à nos jours, les techniques de navigation (caravelles, cartes, astrolabes, boussoles, compas, etc.) ont progressé et ont favorisé les voyages d'exploration. Les explorateurs recensent leur voyage dans des journaux de bord, des lettres ou des carnets de voyage. Leurs écrits ont une valeur documentaire et de témoignage historique.
Journal de bord
Le journal de bord raconte au présent et au jour le jour les étapes du voyage. Les faits s'organisent de manière chronologique. Le journal de bord est rédigé à la première personne du singulier, « je ».
Dans son journal de bord (La Découverte de l'Amérique, Journal de bord et autres récits, 1492-1493), Christophe Colomb raconte au jour le jour la traversée de l'Atlantique et la découverte de cette nouvelle terre.
Le journal de bord est souvent adressé aux souverains qui ont envoyé l'explorateur en mission.
Dans le journal de bord, l'auteur donne son point de vue, raconte les péripéties de son voyage et la découverte d'un monde nouveau. Il décrit les paysages, les personnes rencontrées, leurs habitudes, leurs modes de vie, etc.
Lettre
La lettre est un compte rendu rédigé par l'explorateur. Il fait part de ses découvertes et des événements marquants de son voyage.
Dans Lettre à l'intendant Luis de Santander et à leurs majestés (1493), Christophe Colomb annonce la découverte de l'île San Salvador.
L'explorateur adresse le plus souvent sa lettre à ceux qui lui ont permis de partir. Il utilise le « je » pour se représenter et le « vous » pour s'adresser à ses destinataires. La lettre contient la date et le lieu d'écriture, la signature de l'auteur, la formule d'adresse, la formule d'envoi et de politesse.
Carnet de voyage
Le carnet de voyage est un moyen de partager son voyage et de faire vivre ses aventures en mêlant texte, croquis, dessins, photographies.
Le peintre Eugène Delacroix, lors d'un voyage au Maroc (1832), tient un carnet de voyage dans lequel se mêlent textes, dessins, croquis. Il ne le publiera pas de la sorte mais il s'en inspirera pour ses tableaux.
Le voyageur écrit très rapidement ses impressions, rédige en quelques mots et dessine rapidement ce qu'il voit, les personnes qu'ils rencontrent.
Le voyageur privilégie la spontanéité et reprend son travail après coup pour l'approfondir, pour le compléter, pour rendre compte de l'expérience vécue avec plus de précision et d'exactitude.
Les récits fictifs
Le roman d'aventures appartient à la catégorie du récit fictif. Il s'inspire très souvent des grandes découvertes et des aventures des explorateurs. On y trouve des personnages types. Le schéma narratif est souvent le même, le cadre est exotique.
À partir du XIXe siècle, le monde commence à être de mieux en mieux connu grâce aux évolutions scientifiques et aux différentes expéditions effectuées depuis plusieurs siècles. L'ensemble du globe terrestre est quasiment cartographié.
Les progrès scientifiques se développent de plus en plus, ouvrent de nouveaux horizons et champs de découverte. La science est considérée comme une manière d'explorer le monde.
Les auteurs s'emparent de ces innovations pour nourrir leurs œuvres et développer de plus en plus le roman d'aventures.
Roman d'aventures
Le roman d'aventures est un récit ou roman qui se base sur l'action et multiplie les péripéties. Il repose sur le suspense plutôt que sur la psychologie des personnages. Le héros, souvent masculin, est confronté à une situation périlleuse à laquelle il doit faire face, de façon souvent rocambolesque.
Dans le roman d'aventures, on trouve des personnages types :
- Le héros est souvent jeune. Il doit tout apprendre et tout découvrir. L'aventure lui donne l'occasion de s'améliorer et de faire ses preuves.
- Les adjuvants aident le héros dans ses aventures.
- Les opposants cherchent à empêcher le héros de mener à bien ses aventures.
Dans Sa Majesté des mouches, écrit par William Golding en 1954, le héros Ralph a pour adjuvant Porcinet et pour opposant le chef de l'autre groupe, Jack Merridew.
Les aventures du héros suivent souvent le même schéma narratif :
- une situation de départ malheureuse ;
- l'élément déclencheur de l'action ;
- les péripéties ;
- l'élément de résolution ;
- la situation finale, souvent heureuse.
Dans L'Île au trésor de Robert Louis Stevenson, publié en 1883, le schéma narratif est le suivant :
- Jim Hawkins trouve une carte au trésor ayant appartenu à un pirate : c'est la situation de départ et ce qui va déclencher l'action.
- Un équipage est affrété pour partir à la recherche du trésor : ce sont les péripéties.
- Jim trouve le trésor grâce à Benn Gun, un pirate habitant sur l'île et qui détenait le butin depuis longtemps : c'est la solution.
- Jim rentre à Bristol, ayant laissé une partie du trésor sur l'île : c'est la situation finale.
Le cadre du roman d'aventures est souvent exotique. C'est un lieu de dépaysement ou de rêve comme le montre la description des lieux. L'atmosphère peut devenir inquiétante comme dans les récits d'anticipation.
Dans le récit d'aventure, la place de l'imaginaire et des merveilles est importante. Les auteurs sont fascinés et émerveillés par les terres lointaines qu'ils découvrent et qu'ils visitent. Très enthousiastes, ils déforment souvent la réalité dans leur récit en donnant des descriptions invraisemblables et merveilleuses. Elles sont détachées de la réalité et s'inspirent parfois fortement de récits mythologiques.
Dans Le Livre des merveilles (1298), Marco Polo fait part de sa surprise face aux hommes cannibales qu'ils rencontrent. Au lieu de voir en eux les traits caractéristiques de la population asiatique, Marco Polo trouve que ces personnes ressemblent toutes au chien Cerbère, le gardien des Enfers dans la mythologie.
Au XIIIe siècle, Marco Polo ouvre à nouveau les routes de l'Orient pour se rendre en Chine. Il en fait un récit qui émerveille les Européens, qui suscite l'envie de visiter cette terre lointaine et surprenante.
« L'île d'Angagnia est grande, les habitants y vivent en bêtes, ils sont sauvages et très cruels, ils adorent les idoles et vivent de chair, de riz et de lait ; ils mangent aussi de la chair humaine. Les hommes sont mal bâtis, car ils ont la tête faite comme celle d'un chien, de même que les dents et les yeux. »
Marco Polo
Le Livre des merveilles
1298
Marco Polo fait part de sa surprise face à ces hommes cannibales qui « mangent aussi de la chair humaine ». Il trouve leur physique étrange. Au lieu d'y voir les traits caractéristiques de la population asiatique, Marco Polo trouve que ces personnes ressemblent toutes au chien Cerbère, le gardien des Enfers dans la mythologie.
Le voyage en poésie
Les poètes expriment également leur lien au voyage. Ils donnent à lire, dans leurs poèmes, le bonheur du voyage et tout ce qu'ils peuvent découvrir dans ces nouveaux lieux mais également le manque de la terre laissée.
Si le poète peut exprimer son bonheur et sa joie de voyager, son impatience de découvrir de nouveaux horizons, s'il peut rendre compte de toutes les richesses qu'il découvre lors de ses voyages, toutes les nouvelles choses dont il n'a pas l'habitude comme les pierres précieuses, les épices, les décors des habitations, le poète exprime également sa tristesse et sa nostalgie de la terre laissée.
« Heureux qui, comme Ulysse, a fait un beau voyage,
Ou comme celui-là qui conquit la toison,
Et puis est retourné, plein d'usage et de raison,
Vivre entre ses parents le reste de son âge !
Quand reverrais-je, hélas ! de mon petit village
Fumer la cheminée, et en quelle saison
Reverrai-je le clos de ma pauvre maison,
Qui m'est une province, et beaucoup d'avantage ?
Plus me plaît le séjour qu'ont bâti mes aïeux
Que des palais romains le front audacieux ;
Plus que le marbre dur me plaît l'ardoise fine,
Plus mon Loire gaulois que le Tibre latin,
Plus mon petit Liré que le mont Palatin,
Et que l'air marin la douceur angevine. »
Joachim Du Bellay
Les Regrets, XXXI
1558
Du Bellay reconnaît toutes les beautés qu'il a pu découvrir à Rome et dans sa région (« palais romains », « le marbre », « le Tibre latin », « le mont Palatin »). En se comparant à Ulysse et à sa toison, le poète sait qu'il a fait « un beau voyage » mais sa terre natale lui manque. Il éprouve de la nostalgie.
Les raisons de voyager
Les hommes ont toujours été attirés par les voyages pour plusieurs raisons : découvrir des terres inexplorées et inconnues, raconter des aventures, rencontrer l'autre et apprendre à mieux se connaître.
Découvrir et étudier des terres inexplorées et inconnues
Les explorateurs sont attirés par les terres inexplorées et inconnues. Ils décrivent alors les nouvelles terres, les produits qu'ils y découvrent et les habitants de ces régions.
La découverte des terres inconnues et lointaines constitue un des buts du voyage pour l'explorateur. Il observe précisément tout ce qu'il voit comme les paysages, les villes, les denrées alimentaires, les bijoux, les objets de décoration, les hommes. Dans ses écrits, l'explorateur-écrivain décrit tous les éléments pour ne pas les oublier, pour transmettre ses connaissances, pour témoigner de ce qu'il a vu. Il peut ainsi décrire les lieux où il a été.
Poussé par la soif de l'or, Hernán Cortés découvre le Mexique en 1519.
« Je dois d'abord décrire la ville de Mexico, où se trouve située cette ville et celles que j'ai citées et comment est composé l'Empire de Muteczuma. […]
Cette ville a un grand nombre de places, où se tiennent des marchés quotidiens ; l'une de ces places est deux fois grande comme celle de la ville de Salamanque, place entourée de portiques où chaque jour se presse une foule de soixante-dix mille acheteurs et vendeurs. On trouve là tous les genres de marchandises et de produits que peut offrir ce monde : victuailles de toutes sortes, bijoux d'or et d'argent, ustensiles de plomb, de cuivre, d'étain et de laiton ; autres objets de pierres, d'or, de plumes et de coquilles. »
Hernán Cortés
La Conquête du Mexique
1519-1526
Hernán Cortés décrit la ville de Mexico pour la faire découvrir à son lecteur. Il donne des éléments sur ses caractéristiques (places, marchés) en les comparant à des choses connues des Européens (Salamanque). L'auteur énumère tout ce qu'il voit : « victuailles de toutes sortes, bijoux d'or et d'argent, ustensiles de plomb, de cuivre, d'étain et de laiton ; autres objets de pierres, d'or, de plumes et de coquilles. » Le lecteur peut ainsi se les représenter.
L'explorateur-écrivain peut également décrire les produits qu'il a découverts.
Jean de Léry est un protestant qui habite en Bourgogne. Il fuit les persécutions en allant découvrir et visiter le Brésil en 1556.
« Quant aux plantes et herbes dont je veux aussi faire mention je commencerai par celles qui, à cause de leurs fruits et de leurs effets, me semblent les plus excellentes. Premièrement, la plante qui produit le fruit nommé par les sauvages ananas, est de forme semblable aux glaïeuls, et encore ayant les feuilles un peu courbées et cannelées tout autour, elles s'approchent plus de celles de l'aloès. […] Et du reste, quand ces ananas sont venus à maturité, étant de couleur jaune azuré, ils ont un et elle odeur de framboise que non seulement en allant par les bois et les autres lieux où ils croissent, on les sent de fort loin, mais aussi leur goût fondant dans la bouche est naturellement si doux qu'il n'y a confiture de ce pays qui les surpasse : je soutiens que c'est le plus excellent fruit de l'Amérique. »
Jean de Léry
Histoire d'un voyage fait en la terre de Brésil, autrement dite Amérique
1578
Jean de Léry décrit précisément l'ananas : la plante qui le produit et le fruit lui-même. Pour cela, il utilise des comparaisons afin que le lecteur puisse bien s'imaginer la plante et le fruit. L'auteur donne aussi son avis quant au goût délicieux du fruit.
Enfin, on trouve de nombreuses descriptions des indigènes, c'est-à-dire des populations qui vivent sur les terres que les explorateurs découvrent.
« Les Sauvages de l'Amérique habitant la terre du Brésil nommés Tupinambas, avec lesquels j'ai demeuré et fréquenté environ un an, n'étant point plus grands, plus gros, ou plus petits de stature que nous sommes en l'Europe, ils n'ont le corps ni monstrueux, ni prodigieux à notre égard : au contraire, ils sont plus forts, plus robustes et replets, plus dispos, moins sujets à maladie : et même il n'y a presque point de boiteux, de manchots, d'aveugles, de borgnes, contrefaits, ni d'estropiés entre eux. »
Jean de Léry
Histoire d'un voyage fait en la terre de Brésil, autrement dite Amérique
1578
Jean de Léry nomme les habitants rencontrés au Brésil, les « Tupinambas ». Il propose d'eux une description précise en comparant chaque point aux Européens. L'auteur donne des éléments sur leur physique (taille, apparence) et sur leur résistance très bonne aux maladies.
Raconter ses aventures et ses péripéties
Raconter ses aventures et ses péripéties est une autre motivation du voyage.
Les écrivains relatent leurs aventures, les péripéties de leur voyage, les peurs qu'ils ont pu avoir pour les faire partager au lecteur, pour les informer sur le déroulement du voyage.
Amerigo Vespucci donne son nom à l'Amérique qu'il est allé explorer. Dans cette lettre à Lorenzo di Pierfrancesco de Médicis, il raconte son voyage et ses difficultés.
« Voici ce que fut ce voyage. […] Nous naviguâmes deux mois et trois jours avant qu'une terre nous apparût. Ce que nous subîmes dans ce désert marin, quels dangers de naufrage, quelles souffrances physiques nous affrontâmes, quelles angoisses nous accablèrent l'esprit, je le laisse deviner à ceux qui par l'expérience savent le mieux ce que signifient la quête de l'inconnu et la recherche de ce dont on ne sait s'il existe. Pour tout dire en un mot, sachez que sur soixante-sept jours de navigation, nous en eûmes, d'affilée, quarante de pluie, de tonnerre et d'éclairs, obscurs points que jamais nous ne vîmes, de jour, le soleil, et de nuit, un ciel serein. »
Amerigo Vespucci
Lettre à Lorenzo di Pierfrancesco de Médicis
1503
Vespucci raconte les conditions très difficiles de son voyage : la durée (« deux mois et trois jours »), le désespoir de son équipage par l'accumulation des problèmes rencontrés (« quels dangers de naufrage, quelles souffrances physiques nous affrontâmes, quelles angoisses nous accablèrent l'esprit ») ainsi que les intempéries : quarante jours d'une météo très mauvaise rendent la navigation éprouvante.
Rencontrer l'autre et se rencontrer soi-même
Rencontrer l'autre, et par la même occasion apprendre à mieux se connaître soi, est une autre raison pour voyager.
La rencontre avec l'autre n'est pas évidente, le voyageur se sent différent de la personne rencontrée. Rencontrer l'autre, c'est accepter les différences et c'est ainsi apprendre à mieux se connaître soi en s'ouvrant à une autre vision de l'homme. La rencontre avec l'autre doit dépasser le regard intéressé, les préjugés et accepter la différence.
Lorsque Christophe Colomb arrive sur l'île d'Hispaniola, il se l'approprie immédiatement en installant le drapeau de la couronne espagnole. Il souhaite également s'emparer de leurs richesses (or, pierres précieuses, épices, etc.) : les Indiens n'y prêtent pas attention car ils en ont l'habitude à la différence des Européens qui convoitent ce genre de richesses. Christophe Colomb est donc intéressé car il veut tirer profit de sa rencontre. (La Découverte de l'Amérique, Journal de bord et autres récits, 1492-1493, Christophe Colomb)
L'explorateur éprouve souvent de l'incompréhension face à l'habitant du Nouveau Monde. Il ne comprend pas ses traditions, son mode de vie, ses croyances, son physique, sa façon de penser. Il le considère comme un monstre.
« Ils ont une autre coutume horrible, abominable, bien digne de châtiment et que nous n'avons observée nulle part ; c'est que, chaque fois qu'ils ont quelque chose à demander à leurs idoles, afin qu'elles soient propices à leurs prières, ils prennent des jeunes garçons et des jeunes filles, des hommes et des femmes aussi, dont ils ouvrent la poitrine, dont ils arrachent le cœur et les entrailles qu'ils brûlent devant leurs faux dieux, leur en offrant la fumée en sacrifice. »
Hernán Cortés
La Conquête du Mexique
1519-1526
Hernán Cortés observe les Aztèques. Il ne partage pas leur façon de prier, il critique et condamne leur pratique de sacrifice en les faisant passer pour des monstres. Il juge également leurs dieux en les qualifiant de « faux » comme si le sien était le bon, le vrai. Voir l'autre uniquement avec un œil négatif et inquisiteur lui permet de justifier sa volonté de les dominer et de s'emparer de leurs richesses. C'est une façon de se déculpabiliser et de ne pas reconnaître son geste comme mauvais.
Il est préférable de reconnaître la différence qui permet d'évoluer soi-même, de faire des comparaisons et d'accepter l'autre entièrement pour ce qu'il est. En cela, la communication est très importante car elle garantit plus d'objectivité et d'équité.
« "Mais cet homme si riche dont tu me parles, ne meurt-il point ?" "Bien sûr qu'il meurt, répondis-je, comme les autres." Sur quoi, comme ce sont de grands discoureurs et qu'ils soutiennent fort bien une conversation jusqu'au bout, il me demanda aussitôt : "Et quand il est mort, à qui va tout le bien qu'il laisse ?" "À ses enfants s'il en a, à défaut à ses frères et sœurs, ou à ses plus proches parents." "Vraiment, dit alors mon vieillard, nullement lourdaud comme vous en jugerez, je comprends à présent que vous autres Mairs, c'est-à-dire de Français, êtes de grands fous. Car avez-vous besoin de vous donner tant de peine pour traverser la mer […] pour amasser des richesses pour vos enfants ou ceux qui vous survivront ?" »
Jean de Léry
Histoire d'un voyage fait en la terre de Brésil, autrement dite Amérique
1578
Le dialogue permet à Jean de Léry et au vieillard brésilien de mieux se comprendre. Le vieillard s'étonne de cet amas de richesses pour les descendants et encore plus que les Européens viennent les chercher en terres si lointaines. Il ne juge pas, il cherche seulement à comprendre. Cet échange invite aussi Jean de Léry et le lecteur à réfléchir sur leur rapport aux biens matériels.