Au XVIIIe siècle, qu'est-ce qui explique l'engouement du public français pour le théâtre ?
Quelle figure comique reprennent Marivaux et Beaumarchais ?
Que dénoncent les nouvelles comédies ?
De quel drame bourgeois Diderot est-il l'auteur ?
Que propose Diderot à travers l'invention du drame bourgeois ?
Quel nouveau genre théâtral émerge au XVIIIe siècle ?
Le XVIIIe siècle s'ouvre par un retour au classicisme du siècle précédent. Mais rapidement émergent des formes nouvelles, une volonté de renouveler les genres. L'engouement du public vient tout d'abord de cette nouveauté. Dans un second temps, la dimension plus satirique et sociale des comédies permet d'attirer un public plus large qui peut mieux s'identifier aux intrigues des pièces.
L'engouement du public vient tout d'abord d'une réflexion sur le théâtre qui se développe à cette époque et qui cherche à renouveler les formes : on voit notamment se développer des genres qui associent texte et musique, comme le vaudeville ou l'opéra comique, et ravivent l'intérêt des spectateurs de tous horizons. Beaucoup d'auteurs s'intéressent à cette question et produisent des écrits théoriques. Diderot notamment, auteur du Paradoxe du Comédien, s'interroge sur les enjeux de l'écriture dramatique : à travers ce dialogue argumentatif, il affirme la nécessité de relier les intrigues théâtrales avec leur contexte social. Dans cette optique, il en faveur de l'idée de représenter non plus exclusivement des personnages nobles comme dans la tragédie classique, mais des figures de bourgeois qui feraient face à des situations du quotidien. En conséquence, la fréquentation des théâtres s'élargit, les bourgeois peuvent désormais s'y retrouver. Par ailleurs, pour Diderot, les pièces de théâtre devraient être écrites en prose, privilégier le registre pathétique au registre tragique, et s'achever de manière joyeuse, dans le triomphe de la vertu face à l'adversité : la tragédie devient plus domestique, plus courante et se transforme en un drame bourgeois qui est l'ancêtre du mélodrame du XIXe siècle. Les titres des pièces de Diderot illustrent bien cette volonté de peindre la vie bourgeoise de tous les jours : Le Père de Famille ou Le Fils naturel montrent un ancrage dans la cellule intime de la famille, hors des sphères du pouvoir au cœur des tragédies antiques. Les pièces semblent donc plus accessibles à un public qui peut davantage s'identifier aux personnages et se reconnaître dans les enjeux de l'intrigue.
De ce fait, le théâtre se démocratise et se saisit d'enjeux sociaux plus actuels dans lesquels le public peut mieux se reconnaître. Le rire de la comédie devient plus subtil, la comédie est plus sérieuse et affirme fortement sa visée satirique et moralisatrice. Les auteurs parviennent à contourner la censure royale de 1701 pour faire passer des messages engagés qui prennent une résonance prérévolutionnaire. Le couple comique maître-valet, déjà très présent chez Molière, permet une réflexion sur les inégalités de cette société de privilèges. Marivaux et Beaumarchais, les deux dramaturges emblématiques du siècle des Lumières, thématisent tout particulièrement cette relation du serviteur au maître. Dans L'Île des esclaves, comédie en prose, Marivaux réutilise le traditionnel duo comique maître-valet pour inviter ses spectateurs à échanger leurs rôles sociaux. Mais c'est surtout la figure très contestataire de Figaro chez Beaumarchais qui invite à l'adhésion d'une partie de la population jusqu'ici peu concernée par le théâtre : à travers la figure du valet amoureux, le dramaturge dénonce les abus des nobles et les inégalités de caste. On retrouve cette contestation chez un auteur comme Schiller, représentant du mouvement allemand Sturm und Drang ("Tempête et élan") : dans Les Brigands, le dramaturge critique les abus de la tyrannie, les préjugés de caste et l'inégalité. Toutes les classes sociales peuvent désormais se retrouver dans les pièces représentées ce qui se traduit par une forte fréquentation des théâtres, qui se multiplient.
- Les penseurs du XVIIIe invitent à un renouveau des genres du théâtre (Diderot).
- Le drame bourgeois représente des personnages et des enjeux plus quotidiens et réalistes qui invitent à l'identification du spectateur.
- La fréquentation des théâtres se démocratise du fait de la dimension contestataire et sociale des nouvelles comédies.