Dans quelle mesure peut-on parler d'instabilité relative concernant la IVe République ?
Quel contexte explique le départ des ministres communistes de la IVe République ?
Combien de gouvernements se succèdent en France de 1946 à 1958 ?
Quelles sont les deux raisons qui permettent de nuancer l'instabilité de la IVe République ?
La contestation originelle envers la IVe République à laquelle s'ajoute la crise coloniale que doit traverser la France explique l'instabilité relative d'un régime marqué cependant par une certaine permanence administrative.
Si la nouvelle Constitution est une œuvre de compromis élaborée par le PCF, la SFIO et le MRP, elle est d'abord catégoriquement rejetée par de Gaulle dans son discours de Bayeux de 1946. La Constitution de 1946 ramenait à un régime d'assemblée du type de celui de la IIIe République pourtant massivement rejeté en 1945, et condamnait la IVe République à retomber dans l'instabilité ministérielle chronique synonyme d'impuissance : 24 gouvernements de 1947 à 1958, de durées très inégales (un jour à 16 mois). De plus le consensus fragile qui avait présidé à la naissance de la IVe République s'est effondré dès 1947 dans le contexte de la guerre froide, avec l'exclusion des ministres communistes. À la contestation politique s'ajoute la contestation économique et sociale. En effet, la croissance retrouvée a été irrégulière et inégale selon les secteurs, et s'est accompagnée de fortes tendances à l'inflation. La hausse des prix a débouché sur le déficit extérieur, l'affaiblissement du franc et les dévaluations. Dans le monde ouvrier, les tensions ont culminé en 1947-1948 avec les grèves très dures déclenchées par le PCF et la CGT. Dans les années 1950, c'est la révolte des commerçants, artisans, petits exploitants, mobilisés par Pierre Poujade, fondateur de l'Union de défense des commerçants et artisans (UDCA). La politique étrangère de la République est largement contestée au niveau de l'alignement de la diplomatie française sur celle des États-Unis, dont l'aide financière est devenue indispensable à la reconstruction et à la modernisation. La France adhère en effet à l'Alliance atlantique, accepte le leadership américain et accueille sur son territoire les bases et le Quartier général de l'OTAN.
Mais c'est surtout la crise coloniale qui déstabilise le plus la nouvelle république. Dès 1945, la IVe République substitue l'Union française à l'Empire, sans remettre en cause sa domination et sans vraiment prendre en compte les aspirations profondes des populations indigènes. En 1946, elle accepte de négocier avec les nationalistes vietnamiens (accords Hô-Sainteny), puis s'engage dans une guerre coloniale à l'issue incertaine. En Algérie, elle cède à la pression des colons qui refusaient l'application du statut de 1947. Elle réprime dans le sang la révolte des nationalistes malgaches. Enfin, elle fait interner Bourguiba, le chef du Néo-Destour tunisien, et exile à Madagascar le sultan du Maroc, Mohamed V, qui soutient le Parti de l'Istiqlal. En 1954, la IVe République essuie une humiliante défaite militaire à Diên Biên Phu qui met fin à la colonisation française en Indochine. La même année, en Algérie, elle fait face à une insurrection armée déclenchée par les nationalistes du Front national de libération (FLN). Après la crise de Suez (1956) qui décrédibilise la France auprès des pays du tiers-monde, la fin de la guerre d'Algérie précipite l'échec de la IVe République.
Malgré le changement fréquent de gouvernements durant la IVe République, on observe une certaine permanence administrative qui assure une stabilité des politiques mises en place. Cette permanence s'explique par un faible renouvellement du personnel politique et administratif. La politique économique fondée sur la modernisation des outils de production est également régulière. Les mêmes hommes politiques reviennent souvent dans les mêmes ministères malgré les changements de gouvernement. Ainsi Robert Schuman et Georges Bidault alternent au ministère des Affaires étrangères pendant dix ans. Le ministère des Travaux publics n'est occupé que par trois ministres en 8 ans. Enfin, les hauts fonctionnaires, le plus souvent formés à l'ENA, restent en poste malgré les changements de gouvernement. Paul Delouvrier ou Jean Monnet exercent de manière continue de hautes responsabilités au sein de l'État. Les experts qui conseillent les décideurs politiques sont aussi maintenus dans leurs fonctions et contribuent à la stabilité de l'action de l'État. Ce sont souvent des ingénieurs issus de l'École polytechnique ou de l'École centrale qui ne sont guère concernés par les changements de gouvernements.
- Dès ses débuts, la IVe République est contestée aussi bien au niveau politique qu'aux niveaux économique et social.
- La gestion de la crise coloniale accélère la chute du régime.
- Hommes politiques et hauts fonctionnaires ont été les garants d'une certaine stabilité dans les politiques économiques et sociales menées.