01 76 38 08 47
Logo Kartable
AccueilParcourirRechercheSe connecter

Pour profiter de 10 contenus offerts.

Logo Kartable
AccueilParcourirRechercheSe connecter

Pour profiter de 10 contenus offerts.

  1. Accueil
  2. Première L
  3. Français
  4. Dissertation type bac : Le plaisir de lire un roman vient-il de la rencontre avec les personnages ?

Le plaisir de lire un roman vient-il de la rencontre avec les personnages ? Dissertation type bac

Ce contenu a été rédigé par l'équipe éditoriale de Kartable.

Dernière modification : 24/10/2018 - Conforme au programme 2018-2019

Amérique du Nord, 2014, voies S et ES

Vous répondrez à la question en vous fondant sur les textes du corpus ainsi que sur les textes et œuvres que vous avez étudiés et lus.

Selon vous, le plaisir de lire un roman peut-il tenir seulement à la possibilité d'y rencontrer des personnages d'exception ?

Document 1

Texte A : Honoré de Balzac, Le Père Goriot

1835

Vautrin, personnage mystérieux, et Rastignac, jeune noble désargenté, s'apprêtent à s'affronter en duel, pour une affaire d'argent. Rastignac, subjugué par Vautrin, accepte de l'écouter.

Vous voudriez bien savoir qui je suis, ce que j'ai fait, ou ce que je fais, reprit Vautrin. Vous êtes trop curieux, mon petit. Allons, du calme. Vous allez en entendre bien d'autres ! J'ai eu des malheurs. Écoutez-moi d'abord, vous me répondrez après. Voilà ma vie antérieure en trois mots. Qui suis-je ? Vautrin. Que fais-je ? Ce qui me plaît. Passons. Voulez-vous connaître mon caractère ? Je suis bon avec ceux qui me font du bien ou dont le cœur parle au mien. À ceux-là tout est permis, ils peuvent me donner des coups de pied dans les os des jambes sans que je leur dise : Prends garde ! Mais, nom d'une pipe ! Je suis méchant comme le diable avec ceux qui me tracassent, ou qui ne me reviennent pas. Et il est bon de vous apprendre que je me soucis de tuer un homme comme de ça ! dit-il en lançant un jet de salive. Seulement je m'efforce de le tuer proprement, quand il le faut absolument. Je suis ce que vous appelez un artiste. J'ai lu les Mémoires de Benvenuto Cellini1 , tel que vous me voyez, et en italien encore ! J'ai appris de cet homme-là, qui était un fier luron, à imiter la Providence2 qui nous tue à tort et à travers, et à aimer le beau partout où il se trouve. N'est-ce pas d'ailleurs une belle partie à jouer que d'être seul contre tous les hommes et d'avoir la chance ? J'ai bien réfléchi à la constitution actuelle de votre désordre social. Mon petit, le duel est un jeu d'enfant, une sottise. Quand de deux hommes vivants l'un doit disparaître, il faut être imbécile pour s'en remettre au hasard. Le duel ? croix ou pile3 ! Voilà. Je me mets cinq balles de suite dans un as de pique en renfonçant chaque nouvelle balle sur l'autre, et à trente-cinq pas encore ! Quand on est doué de ce petit talent-là, l'on peut se croire sûr d'abattre son homme. Eh bien ! J'ai tiré sur un homme à vingt pas, je l'ai manqué. Le drôle n'avait jamais manié de sa vie un pistolet. Tenez ! dit cet homme extraordinaire en défaisant son gilet et montrant sa poitrine velue comme le dos d'un ours, mais garnie d'un crin fauve qui causait une sorte de dégoût mêlé d'effroi, ce blanc-bec m'a roussi le poil, ajouta-t-il en mettant le doigt de Rastignac sur un trou qu'il avait au sein. Mais dans ce temps-là j'étais un enfant, j'avais votre âge, vingt et un ans. Je croyais encore à quelque chose, à l'amour d'une femme, un tas de bêtises dans lesquelles vous allez vous embarbouiller. Nous nous serions battus, pas vrai ? Vous auriez pu me tuer. Supposez que je sois en terre, où seriez-vous ? Il faudrait décamper, aller en Suisse, manger l'argent de papa, qui n'en a guère. Je vais vous éclairer, moi, la position dans laquelle vous êtes ; mais je vais le faire avec la supériorité d'un homme qui, après avoir examiné les choses d'ici-bas, a vu qu'il n'y avait que deux partis à prendre : ou une stupide obéissance ou la révolte. Je n'obéis à rien, est-ce clair ? Savez-vous ce qu'il vous faut, à vous, au train dont vous allez ? Un million, et promptement ; sans quoi, avec notre petite tête, nous pourrions aller flâner ans les filets de Saint-Cloud4, pour voir s'il y a un Être-Suprême5. Ce million, je vais vous le donner.

1 Benvenuto Cellini : célèbre artiste de la Renaissance, connu pour sa vie hardie et mouvementée
2 providence : nom donné au destin
3 croix ou pile : pile ou face
4 aller flâner dans les filets de Saint-Cloud : se jeter à la Seine. À la hauteur de Saint-Cloud, des filets tendus dans la Seine recueillaient les corps des noyés qui descendaient le fleuve
5 Être-Suprême : nom donné à Dieu

Document 2

Texte B : Alexandre Dumas, Le Comte de Monte-Cristo

1846

Jeune marin promis à un bel avenir, Edmond Dantès, victime d'un complot, a été injustement enfermé dans un cachot pendant quatorze ans. Évadé et devenu très riche, il vit sous le nom de "Comte de Monte-Cristo" et organise sa vengeance. Il se présente à l'un de ceux qui ont participé au complot, Monsieur de Villefort.

- Monsieur, dit Villefort, vous me confondez1, sur ma parole, et je n'ai jamais entendu parler personne comme vous faites.
- C'est que vous êtes constamment resté enfermé dans le cercle des conditions générales, et que vous n'avez jamais osé vous élever d'un coup d'aile dans les sphères supérieures que Dieu a peuplées d'être invisibles ou exceptionnels.
- Et vous admettez, monsieur, que ces sphères existent, et que les êtres exceptionnels et invisibles se mêlent à nous ?
- Pourquoi pas ? est-ce que vous voyez l'air que vous respirez et sans lequel vous ne pourriez pas vivre ?
- Alors, nous ne voyons pas ces êtres dont vous parlez ?
- Si fait, vous les voyez quand Dieu permet qu'ils se matérialisent ; vous les touchez, vous les coudoyez, vous leur parlez et ils vous répondent.
- Ah ! dit Villefort en souriant, j'avoue que je voudrais bien être prévenu quand un de ces êtres se trouvera en contact avec moi.
- Vous avez été servi à votre guise, monsieur ; car vous avez été prévenu tout à l'heure, et maintenant encore, je vous préviens.
- Ainsi, vous-même ?
- Je suis un de ces êtres exceptionnels, oui, monsieur, et je crois que, jusqu'à ce jour, aucun homme ne s'est trouvé dans une position semblable à la mienne. Les royaumes des rois sont limités, soit par des montagnes, soit pas des rivières, soit par un changement de mœurs, soit par une mutation de langage. Mon royaume, à moi, est grand comme le monde, car je ne suis ni Italien, ni Français, ni Indou, ni Américain, ni Espagnol : je suis cosmopolite. Nul pays ne peut dire qu'il m'a vu naître. Dieu seul sait quelle contrée me verra mourir. J'adopte tous les usages, je parle toutes les langues. Vous me croyez Français, vous, n'est-ce pas, car je parle le français avec la même facilité et la même pureté que vous ? eh bien ! Ali, mon Nubien2, me croit Arabe ; Bertuccio, mon intendant, me croit Romain ; Haydée, mon esclave, me croit Grec. Donc vous comprenez, n'étant d'aucun pays, ne demandant protection à aucun gouvernement, ne reconnaissant aucun homme pour mon frère, pas un seul des scrupules qui arrêtent les puissants ou des obstacles qui paralysent les faibles ne me paralyse ou ne m'arrête. Je n'ai que deux adversaires ; je ne dirai pas deux vainqueurs, car avec de la persistance je les soumets : c'est la distance et le temps. Le troisième, et le plus terrible, c'est ma condition d'homme mortel. Celle-là seule peut m'arrêter dans le chemin où je marche, et avant que j'aie atteint le but auquel je tends : tout le reste, je l'ai calculé. Ce que les hommes appellent les chances du sort, c'est-à-dire la ruine, le changement, les éventualités, je les ai toutes prévues ; et si quelques-unes peuvent m'atteindre, aucune ne peut me renverser. À moins que je meure, je serai toujours ce que je suis ; voilà pourquoi je vous dis des choses que vous n'avez jamais entendues, même de la bouche des rois, car les rois ont besoin de vous et les autres hommes en ont peur.

1 confondez : troublez, déconcertez
2 Nubien : homme de Nubie, région d'Afrique du Nord

Document 3

Texte C : Victor Hugo, Les Misérables

1862

M. Madeleine se tourna, et reconnut Javert. Il ne l'avait pas aperçu en arrivant.

Javert continua :

- C'est la force. Il faudrait être un terrible homme pour faire la chose de lever une voiture comme cela sur son dos.

Puis regardant fixement M. Madeleine, il poursuivit en appuyant sur chacun des mots qu'il prononçait :

- Monsieur Madeleine, je n'ai jamais connu qu'un seul homme capable de faire ce que vous demandez là.

Madeleine tressaillit.

Javert ajouta avec un air d'indifférence, mais sans quitter des yeux Madeleine :

- C'était un forçat.
- Ah ! dit Madeleine.
- Du bagne de Toulon.

Madeleine devint pâle.

Cependant la charrette continuait à s'enfoncer lentement. Le père Fauchelevent râlait et hurlait :

- J'étouffe ! Ça me brise les côtes ! Un cric ! quelque chose ! Ah !

Madeleine regarda autour de lui :

- Il n'y a donc personne qui veuille gagner vingt louis et sauver la vie à ce pauvre vieux ?

Aucun des assistants ne remua. Javert reprit :

- Je n'ai jamais connu qu'un homme qui pût remplacer un cric. C'était ce forçat.
- Ah ! voilà que ça m'écrase ! cria le vieillard.

Madeleine leva la tête, rencontra l'œil de faucon de Javert toujours attaché sur lui, regarda les paysans immobiles, et sourit tristement. Puis, sans dire une parole, il tomba à genoux, et avant même que la foule eût eu le temps de jeter un cri, il était sous la voiture. Il y eut un affreux moment d'attente et de silence.

On vit Madeleine presque à plat ventre sous ce poids effrayant essayer deux fois en vain de rapprocher ses coudes de ses genoux. On lui cria : - Père Madeleine ! Retirez-vous de là ! - Le vieux Fauchelevent lui-même lui dit : - Monsieur Madeleine ! Allez-vous-en ! C'est qu'il faut que je meure, voyez-vous ! Laissez-moi ! Vous allez vous faire écraser aussi ! - Madeleine ne répondit pas.

Les assistants haletaient. Les roues avaient continué de s'enfoncer, et il était déjà devenu presque impossible que Madeleine sortît de dessous la voiture. Tout à coup on vit l'énorme masse s'ébranler, la charrette se soulevait lentement, les roues sortaient à demi de l'ornière. On entendit une voix étouffée qui criait : - Dépêchez-vous ! Aidez ! C'était Madeleine qui venait de faire un dernier effort. Ils se précipitèrent. Le dévouement d'un seul avait donné de la force et du courage à tous. La charrette fut enlevée par vingt bras. Le vieux Fauchelevent était sauvé. Madeleine se releva. Il était blême1, quoique ruisselant de sueur. Ses habits étaient déchirés et couverts de boue. Tous pleuraient. Le vieillard lui baisait les genoux et l'appelait le bon Dieu. Lui, il avait sur le visage je ne sais quelle expression de souffrance heureuse et céleste, et il fixait son œil tranquille sur Javert qui le regardait toujours.

1 blême : pâle

Document 4

Texte D : Pierre Souvestre et Marcel Allain, Fantômas : l'agent secret

1910

Bobinette, une espionne, découvre la véritable identité de celui pour qui elle croit travailler : le clochard Vagualame…

- Vagualame, qui êtes-vous ? dites-le-moi…
- Qui je suis ! pardieu !... tu le demandes ? tu veux le savoir ? Eh bien ! qu'il soit fait suivant ta volonté !... C'est ta dernière volonté !... Qui je suis ?... regarde !

Lentement, d'un mouvement digne et sûr, Vagualame déroulait la longue cape dans laquelle il était enveloppé. Il arrachait son chapeau qu'il jetait à ses pieds et, les bras croisés, fixant Bobinette, il l'apostrophait :

- Ose dire mon nom ! Ose me nommer !...

Devant Bobinette se dressait une terrifiante silhouette.

Le mendiant de tout à l'heure, sa cape enlevée, dépouillé de son chapeau, apparaissait soudain non plus comme un vieillard au corps tassé, mais comme un homme à coup sûr jeune, vigoureux, superbement musclé. Il était vêtu, ganté plutôt, d'un maillot collant de laine noire qui, des pieds jusqu'au cou, le gainait étroitement…

Bobinette ne pouvait apercevoir son visage : celui-ci était dissimulé par une longue cagoule noire enveloppant entièrement sa tête ; seuls les yeux, d'où sortaient deux reflets fauves, deux regards de feu, lumineux, impressionnants dans leur fixité, étaient apparents…

Cette vision de cet homme, sans visage, sans ressemblance avec un autre homme, la vision de cette apparition, au masque anonyme, au corps de statue, de cet être qui n'était aucun être reconnaissable, avait quelque chose de si précis en son mystère que Bobinette, un quart de seconde, l'ayant contemplée, hurla d'une voix rauque, inhumaine, mourante :

- Fantômas ! ah ! vous êtes Fantômas !

…L'orage redoublait de violence, la tempête déchaînée multipliait ses hurlements sinistres, la nuit se faisait plus sombre, la pluie plus lourde, le vent plus impétueux !

- Fantômas ! vous êtes Fantômas !

Bobinette répétait inlassablement son exclamation.

Et telle était sa surprise, tel était son émoi de se trouver réellement en présence de l'insaisissable, de l'inidentifiable bandit qu'elle oubliait presque ses horribles menaces ; hébétée, anéantie, incapable d'une pensé consciente.

- Fantômas ! vous êtes Fantômas !

Comme à dessein, comme jouissant du trouble de la pauvre fille, le bandit ne se hâtait point de répondre.

- Eh bien, oui ! faisait-il enfin, je suis Fantômas !... Je suis celui que le monde entier recherche, que nul n'a jamais vu, pour personne, parce que la nuit, parce que le crime n'ont point de visage !... Je suis la puissance illimitée ; je suis celui qui se raille1 de tous les pouvoirs, de toutes les forces, de tous les efforts ! Je suis le maître de tous, de tout, de l'heure, du temps ! Je suis la Mort ! Bobinette, tu l'as dit, je suis Fantômas !...

1 se railler : se moquer

Pour quelles raisons peut-on affirmer que le personnage de Vautrin est exceptionnel ?

Texte A : Honoré de Balzac, Le Père Goriot

1835

Vautrin, personnage mystérieux, et Rastignac, jeune noble désargenté, s'apprêtent à s'affronter en duel, pour une affaire d'argent. Rastignac, subjugué par Vautrin, accepte de l'écouter.

Vous voudriez bien savoir qui je suis, ce que j'ai fait, ou ce que je fais, reprit Vautrin. Vous êtes trop curieux, mon petit. Allons, du calme. Vous allez en entendre bien d'autres ! J'ai eu des malheurs. Écoutez-moi d'abord, vous me répondrez après. Voilà ma vie antérieure en trois mots. Qui suis-je ? Vautrin. Que fais-je ? Ce qui me plaît. Passons. Voulez-vous connaître mon caractère ? Je suis bon avec ceux qui me font du bien ou dont le cœur parle au mien. À ceux-là tout est permis, ils peuvent me donner des coups de pied dans les os des jambes sans que je leur dise : Prends garde ! Mais, nom d'une pipe ! Je suis méchant comme le diable avec ceux qui me tracassent, ou qui ne me reviennent pas. Et il est bon de vous apprendre que je me soucis de tuer un homme comme de ça ! dit-il en lançant un jet de salive. Seulement je m'efforce de le tuer proprement, quand il le faut absolument. Je suis ce que vous appelez un artiste. J'ai lu les Mémoires de Benvenuto Cellini1 , tel que vous me voyez, et en italien encore ! J'ai appris de cet homme-là, qui était un fier luron, à imiter la Providence2 qui nous tue à tort et à travers, et à aimer le beau partout où il se trouve. N'est-ce pas d'ailleurs une belle partie à jouer que d'être seul contre tous les hommes et d'avoir la chance ? J'ai bien réfléchi à la constitution actuelle de votre désordre social. Mon petit, le duel est un jeu d'enfant, une sottise. Quand de deux hommes vivants l'un doit disparaître, il faut être imbécile pour s'en remettre au hasard. Le duel ? croix ou pile3 ! Voilà. Je me mets cinq balles de suite dans un as de pique en renfonçant chaque nouvelle balle sur l'autre, et à trente-cinq pas encore ! Quand on est doué de ce petit talent-là, l'on peut se croire sûr d'abattre son homme. Eh bien ! J'ai tiré sur un homme à vingt pas, je l'ai manqué. Le drôle n'avait jamais manié de sa vie un pistolet. Tenez ! dit cet homme extraordinaire en défaisant son gilet et montrant sa poitrine velue comme le dos d'un ours, mais garnie d'un crin fauve qui causait une sorte de dégoût mêlé d'effroi, ce blanc-bec m'a roussi le poil, ajouta-t-il en mettant le doigt de Rastignac sur un trou qu'il avait au sein. Mais dans ce temps-là j'étais un enfant, j'avais votre âge, vingt et un ans. Je croyais encore à quelque chose, à l'amour d'une femme, un tas de bêtises dans lesquelles vous allez vous embarbouiller. Nous nous serions battus, pas vrai ? Vous auriez pu me tuer. Supposez que je sois en terre, où seriez-vous ? Il faudrait décamper, aller en Suisse, manger l'argent de papa, qui n'en a guère. Je vais vous éclairer, moi, la position dans laquelle vous êtes ; mais je vais le faire avec la supériorité d'un homme qui, après avoir examiné les choses d'ici-bas, a vu qu'il n'y avait que deux partis à prendre : ou une stupide obéissance ou la révolte. Je n'obéis à rien, est-ce clair ? Savez-vous ce qu'il vous faut, à vous, au train dont vous allez ? Un million, et promptement ; sans quoi, avec notre petite tête, nous pourrions aller flâner ans les filets de Saint-Cloud4, pour voir s'il y a un Être-Suprême5. Ce million, je vais vous le donner.

1 Benvenuto Cellini : célèbre artiste de la Renaissance, connu pour sa vie hardie et mouvementée
2 providence : nom donné au destin
3 croix ou pile : pile ou face
4 aller flâner dans les filets de Saint-Cloud : se jeter à la Seine. À la hauteur de Saint-Cloud, des filets tendus dans la Seine recueillaient les corps des noyés qui descendaient le fleuve
5 Être-Suprême : nom donné à Dieu

Quelles sont les deux caractéristiques d'un personnage exceptionnel pour Dumas ?

Texte B : Alexandre Dumas, Le Comte de Monte-Cristo

1846

Jeune marin promis à un bel avenir, Edmond Dantès, victime d'un complot, a été injustement enfermé dans un cachot pendant quatorze ans. Évadé et devenu très riche, il vit sous le nom de "Comte de Monte-Cristo" et organise sa vengeance. Il se présente à l'un de ceux qui ont participé au complot, Monsieur de Villefort.

- Monsieur, dit Villefort, vous me confondez1, sur ma parole, et je n'ai jamais entendu parler personne comme vous faites.
- C'est que vous êtes constamment resté enfermé dans le cercle des conditions générales, et que vous n'avez jamais osé vous élever d'un coup d'aile dans les sphères supérieures que Dieu a peuplées d'être invisibles ou exceptionnels.
- Et vous admettez, monsieur, que ces sphères existent, et que les êtres exceptionnels et invisibles se mêlent à nous ?
- Pourquoi pas ? est-ce que vous voyez l'air que vous respirez et sans lequel vous ne pourriez pas vivre ?
- Alors, nous ne voyons pas ces êtres dont vous parlez ?
- Si fait, vous les voyez quand Dieu permet qu'ils se matérialisent ; vous les touchez, vous les coudoyez, vous leur parlez et ils vous répondent.
- Ah ! dit Villefort en souriant, j'avoue que je voudrais bien être prévenu quand un de ces êtres se trouvera en contact avec moi.
- Vous avez été servi à votre guise, monsieur ; car vous avez été prévenu tout à l'heure, et maintenant encore, je vous préviens.
- Ainsi, vous-même ?
- Je suis un de ces êtres exceptionnels, oui, monsieur, et je crois que, jusqu'à ce jour, aucun homme ne s'est trouvé dans une position semblable à la mienne. Les royaumes des rois sont limités, soit par des montagnes, soit pas des rivières, soit par un changement de mœurs, soit par une mutation de langage. Mon royaume, à moi, est grand comme le monde, car je ne suis ni Italien, ni Français, ni Indou, ni Américain, ni Espagnol : je suis cosmopolite. Nul pays ne peut dire qu'il m'a vu naître. Dieu seul sait quelle contrée me verra mourir. J'adopte tous les usages, je parle toutes les langues. Vous me croyez Français, vous, n'est-ce pas, car je parle le français avec la même facilité et la même pureté que vous ? eh bien ! Ali, mon Nubien2, me croit Arabe ; Bertuccio, mon intendant, me croit Romain ; Haydée, mon esclave, me croit Grec. Donc vous comprenez, n'étant d'aucun pays, ne demandant protection à aucun gouvernement, ne reconnaissant aucun homme pour mon frère, pas un seul des scrupules qui arrêtent les puissants ou des obstacles qui paralysent les faibles ne me paralyse ou ne m'arrête. Je n'ai que deux adversaires ; je ne dirai pas deux vainqueurs, car avec de la persistance je les soumets : c'est la distance et le temps. Le troisième, et le plus terrible, c'est ma condition d'homme mortel. Celle-là seule peut m'arrêter dans le chemin où je marche, et avant que j'aie atteint le but auquel je tends : tout le reste, je l'ai calculé. Ce que les hommes appellent les chances du sort, c'est-à-dire la ruine, le changement, les éventualités, je les ai toutes prévues ; et si quelques-unes peuvent m'atteindre, aucune ne peut me renverser. À moins que je meure, je serai toujours ce que je suis ; voilà pourquoi je vous dis des choses que vous n'avez jamais entendues, même de la bouche des rois, car les rois ont besoin de vous et les autres hommes en ont peur.

1 confondez : troublez, déconcertez
2 Nubien : homme de Nubie, région d'Afrique du Nord

En quoi ce passage est-il source de plaisir pour le lecteur ?

Texte B : Alexandre Dumas, Le Comte de Monte-Cristo

1846

Jeune marin promis à un bel avenir, Edmond Dantès, victime d'un complot, a été injustement enfermé dans un cachot pendant quatorze ans. Évadé et devenu très riche, il vit sous le nom de "Comte de Monte-Cristo" et organise sa vengeance. Il se présente à l'un de ceux qui ont participé au complot, Monsieur de Villefort.

- Monsieur, dit Villefort, vous me confondez1, sur ma parole, et je n'ai jamais entendu parler personne comme vous faites.
- C'est que vous êtes constamment resté enfermé dans le cercle des conditions générales, et que vous n'avez jamais osé vous élever d'un coup d'aile dans les sphères supérieures que Dieu a peuplées d'être invisibles ou exceptionnels.
- Et vous admettez, monsieur, que ces sphères existent, et que les êtres exceptionnels et invisibles se mêlent à nous ?
- Pourquoi pas ? est-ce que vous voyez l'air que vous respirez et sans lequel vous ne pourriez pas vivre ?
- Alors, nous ne voyons pas ces êtres dont vous parlez ?
- Si fait, vous les voyez quand Dieu permet qu'ils se matérialisent ; vous les touchez, vous les coudoyez, vous leur parlez et ils vous répondent.
- Ah ! dit Villefort en souriant, j'avoue que je voudrais bien être prévenu quand un de ces êtres se trouvera en contact avec moi.
- Vous avez été servi à votre guise, monsieur ; car vous avez été prévenu tout à l'heure, et maintenant encore, je vous préviens.
- Ainsi, vous-même ?
- Je suis un de ces êtres exceptionnels, oui, monsieur, et je crois que, jusqu'à ce jour, aucun homme ne s'est trouvé dans une position semblable à la mienne. Les royaumes des rois sont limités, soit par des montagnes, soit pas des rivières, soit par un changement de mœurs, soit par une mutation de langage. Mon royaume, à moi, est grand comme le monde, car je ne suis ni Italien, ni Français, ni Indou, ni Américain, ni Espagnol : je suis cosmopolite. Nul pays ne peut dire qu'il m'a vu naître. Dieu seul sait quelle contrée me verra mourir. J'adopte tous les usages, je parle toutes les langues. Vous me croyez Français, vous, n'est-ce pas, car je parle le français avec la même facilité et la même pureté que vous ? eh bien ! Ali, mon Nubien2, me croit Arabe ; Bertuccio, mon intendant, me croit Romain ; Haydée, mon esclave, me croit Grec. Donc vous comprenez, n'étant d'aucun pays, ne demandant protection à aucun gouvernement, ne reconnaissant aucun homme pour mon frère, pas un seul des scrupules qui arrêtent les puissants ou des obstacles qui paralysent les faibles ne me paralyse ou ne m'arrête. Je n'ai que deux adversaires ; je ne dirai pas deux vainqueurs, car avec de la persistance je les soumets : c'est la distance et le temps. Le troisième, et le plus terrible, c'est ma condition d'homme mortel. Celle-là seule peut m'arrêter dans le chemin où je marche, et avant que j'aie atteint le but auquel je tends : tout le reste, je l'ai calculé. Ce que les hommes appellent les chances du sort, c'est-à-dire la ruine, le changement, les éventualités, je les ai toutes prévues ; et si quelques-unes peuvent m'atteindre, aucune ne peut me renverser. À moins que je meure, je serai toujours ce que je suis ; voilà pourquoi je vous dis des choses que vous n'avez jamais entendues, même de la bouche des rois, car les rois ont besoin de vous et les autres hommes en ont peur.

1 confondez : troublez, déconcertez
2 Nubien : homme de Nubie, région d'Afrique du Nord

En quoi M. Madeleine est-il héroïque ?

Texte C : Victor Hugo, Les Misérables

1862

M. Madeleine se tourna, et reconnut Javert. Il ne l'avait pas aperçu en arrivant.

Javert continua :

- C'est la force. Il faudrait être un terrible homme pour faire la chose de lever une voiture comme cela sur son dos.

Puis regardant fixement M. Madeleine, il poursuivit en appuyant sur chacun des mots qu'il prononçait :

- Monsieur Madeleine, je n'ai jamais connu qu'un seul homme capable de faire ce que vous demandez là.

Madeleine tressaillit.

Javert ajouta avec un air d'indifférence, mais sans quitter des yeux Madeleine :

- C'était un forçat.
- Ah ! dit Madeleine.
- Du bagne de Toulon.

Madeleine devint pâle.

Cependant la charrette continuait à s'enfoncer lentement. Le père Fauchelevent râlait et hurlait :

- J'étouffe ! Ça me brise les côtes ! Un cric ! quelque chose ! Ah !

Madeleine regarda autour de lui :

- Il n'y a donc personne qui veuille gagner vingt louis et sauver la vie à ce pauvre vieux ?

Aucun des assistants ne remua. Javert reprit :

- Je n'ai jamais connu qu'un homme qui pût remplacer un cric. C'était ce forçat.
- Ah ! voilà que ça m'écrase ! cria le vieillard.

Madeleine leva la tête, rencontra l'œil de faucon de Javert toujours attaché sur lui, regarda les paysans immobiles, et sourit tristement. Puis, sans dire une parole, il tomba à genoux, et avant même que la foule eût eu le temps de jeter un cri, il était sous la voiture. Il y eut un affreux moment d'attente et de silence.

On vit Madeleine presque à plat ventre sous ce poids effrayant essayer deux fois en vain de rapprocher ses coudes de ses genoux. On lui cria : - Père Madeleine ! Retirez-vous de là ! - Le vieux Fauchelevent lui-même lui dit : - Monsieur Madeleine ! Allez-vous-en ! C'est qu'il faut que je meure, voyez-vous ! Laissez-moi ! Vous allez vous faire écraser aussi ! - Madeleine ne répondit pas.

Les assistants haletaient. Les roues avaient continué de s'enfoncer, et il était déjà devenu presque impossible que Madeleine sortît de dessous la voiture. Tout à coup on vit l'énorme masse s'ébranler, la charrette se soulevait lentement, les roues sortaient à demi de l'ornière. On entendit une voix étouffée qui criait : - Dépêchez-vous ! Aidez ! C'était Madeleine qui venait de faire un dernier effort. Ils se précipitèrent. Le dévouement d'un seul avait donné de la force et du courage à tous. La charrette fut enlevée par vingt bras. Le vieux Fauchelevent était sauvé. Madeleine se releva. Il était blême1, quoique ruisselant de sueur. Ses habits étaient déchirés et couverts de boue. Tous pleuraient. Le vieillard lui baisait les genoux et l'appelait le bon Dieu. Lui, il avait sur le visage je ne sais quelle expression de souffrance heureuse et céleste, et il fixait son œil tranquille sur Javert qui le regardait toujours.

1 blême : pâle

Quels sont les deux adjectifs qui permettent de caractériser les personnages de Victor Hugo ?

Texte C : Victor Hugo, Les Misérables

1862

M. Madeleine se tourna, et reconnut Javert. Il ne l'avait pas aperçu en arrivant.

Javert continua :

- C'est la force. Il faudrait être un terrible homme pour faire la chose de lever une voiture comme cela sur son dos.

Puis regardant fixement M. Madeleine, il poursuivit en appuyant sur chacun des mots qu'il prononçait :

- Monsieur Madeleine, je n'ai jamais connu qu'un seul homme capable de faire ce que vous demandez là.

Madeleine tressaillit.

Javert ajouta avec un air d'indifférence, mais sans quitter des yeux Madeleine :

- C'était un forçat.
- Ah ! dit Madeleine.
- Du bagne de Toulon.

Madeleine devint pâle.

Cependant la charrette continuait à s'enfoncer lentement. Le père Fauchelevent râlait et hurlait :

- J'étouffe ! Ça me brise les côtes ! Un cric ! quelque chose ! Ah !

Madeleine regarda autour de lui :

- Il n'y a donc personne qui veuille gagner vingt louis et sauver la vie à ce pauvre vieux ?

Aucun des assistants ne remua. Javert reprit :

- Je n'ai jamais connu qu'un homme qui pût remplacer un cric. C'était ce forçat.
- Ah ! voilà que ça m'écrase ! cria le vieillard.

Madeleine leva la tête, rencontra l'œil de faucon de Javert toujours attaché sur lui, regarda les paysans immobiles, et sourit tristement. Puis, sans dire une parole, il tomba à genoux, et avant même que la foule eût eu le temps de jeter un cri, il était sous la voiture. Il y eut un affreux moment d'attente et de silence.

On vit Madeleine presque à plat ventre sous ce poids effrayant essayer deux fois en vain de rapprocher ses coudes de ses genoux. On lui cria : - Père Madeleine ! Retirez-vous de là ! – Le vieux Fauchelevent lui-même lui dit : - Monsieur Madeleine ! Allez-vous-en ! C'est qu'il faut que je meure, voyez-vous ! Laissez-moi ! Vous allez vous faire écraser aussi ! – Madeleine ne répondit pas.

Les assistants haletaient. Les roues avaient continué de s'enfoncer, et il était déjà devenu presque impossible que Madeleine sortît de dessous la voiture. Tout à coup on vit l'énorme masse s'ébranler, la charrette se soulevait lentement, les roues sortaient à demi de l'ornière. On entendit une voix étouffée qui criait : - Dépêchez-vous ! Aidez ! C'était Madeleine qui venait de faire un dernier effort. Ils se précipitèrent. Le dévouement d'un seul avait donné de la force et du courage à tous. La charrette fut enlevée par vingt bras. Le vieux Fauchelevent était sauvé. Madeleine se releva. Il était blême1, quoique ruisselant de sueur. Ses habits étaient déchirés et couverts de boue. Tous pleuraient. Le vieillard lui baisait les genoux et l'appelait le bon Dieu. Lui, il avait sur le visage je ne sais quelle expression de souffrance heureuse et céleste, et il fixait son œil tranquille sur Javert qui le regardait toujours.

1 blême : pâle

Quels sont les deux adjectifs qui permettent de caractériser le personnage de Fantômas ?

Texte D : Pierre Souvestre et Marcel Allain, Fantômas : l'agent secret

1910

Bobinette, une espionne, découvre la véritable identité de celui pour qui elle croit travailler : le clochard Vagualame…

- Vagualame, qui êtes-vous ? dites-le-moi…

- Qui je suis ! pardieu !... tu le demandes ? tu veux le savoir ? Eh bien ! qu'il soit fait suivant ta volonté !... C'est ta dernière volonté !... Qui je suis ?... regarde !

Lentement, d'un mouvement digne et sûr, Vagualame déroulait la longue cape dans laquelle il était enveloppé. Il arrachait son chapeau qu'il jetait à ses pieds et, les bras croisés, fixant Bobinette, il l'apostrophait :

- Ose dire mon nom ! Ose me nommer !...

Devant Bobinette se dressait une terrifiante silhouette.

Le mendiant de tout à l'heure, sa cape enlevée, dépouillé de son chapeau, apparaissait soudain non plus comme un vieillard au corps tassé, mais comme un homme à coup sûr jeune, vigoureux, superbement musclé. Il était vêtu, ganté plutôt, d'un maillot collant de laine noire qui, des pieds jusqu'au cou, le gainait étroitement…

Bobinette ne pouvait apercevoir son visage : celui-ci était dissimulé par une longue cagoule noire enveloppant entièrement sa tête ; seuls les yeux, d'où sortaient deux reflets fauves, deux regards de feu, lumineux, impressionnants dans leur fixité, étaient apparents…

Cette vision de cet homme, sans visage, sans ressemblance avec un autre homme, la vision de cette apparition, au masque anonyme, au corps de statue, de cet être qui n'était aucun être reconnaissable, avait quelque chose de si précis en son mystère que Bobinette, un quart de seconde, l'ayant contemplée, hurla d'une voix rauque, inhumaine, mourante :

- Fantômas ! ah ! vous êtes Fantômas !

…L'orage redoublait de violence, la tempête déchaînée multipliait ses hurlements sinistres, la nuit se faisait plus sombre, la pluie plus lourde, le vent plus impétueux !

- Fantômas ! vous êtes Fantômas !

Bobinette répétait inlassablement son exclamation.

Et telle était sa surprise, tel était son émoi de se trouver réellement en présence de l'insaisissable, de l'inidentifiable bandit qu'elle oubliait presque ses horribles menaces ; hébétée, anéantie, incapable d'une pensé consciente.

- Fantômas ! vous êtes Fantômas !

Comme à dessein, comme jouissant du trouble de la pauvre fille, le bandit ne se hâtait point de répondre.

- Eh bien, oui ! faisait-il enfin, je suis Fantômas !... Je suis celui que le monde entier recherche, que nul n'a jamais vu, pour personne, parce que la nuit, parce que le crime n'ont point de visage !... Je suis la puissance illimitée ; je suis celui qui se raille1 de tous les pouvoirs, de toutes les forces, de tous les efforts ! Je suis le maître de tous, de tout, de l'heure, du temps ! Je suis la Mort ! Bobinette, tu l'as dit, je suis Fantômas !...

1 se railler : se moquer

Quel plan est approprié pour répondre au sujet traité ?

Quelles sont les deux principales caractéristiques de l'héroïsme ?

Quels sont les deux genres de roman qui magnifient le héros ?

Pour les partisans de "l'art pour l'art", qu'est-ce qui est plus important ?

On parle souvent de personnage romanesque pour définir un être doté de qualités incroyables. Lorsqu'on parle de héros de roman, on voit souvent un être formidable, héroïque dans le sens où il est courageux, fort, puissant. Souvent, ce personnage est engagé dans des aventures extraordinaires. C'est le protagoniste des premiers romans du Moyen Âge, un chevalier en quête d'amour et d'héroïsme. C'est aussi le héros des romans d'aventures. Le plaisir de la lecture viendrait donc de la rencontre du lecteur avec des personnages exceptionnels dans le sens où ils sont hors du réel, où ils sont hors du commun des mortels, donc différents des hommes réels.
Les héros de romans ne correspondent pas tous à cette description. Ainsi, Maupassant, dans la préface de Pierre et Jean, distingue plusieurs types de romanciers et de personnages : ceux qui s'inspirent de la réalité pour en faire une "aventure exceptionnelle" en inventant des héros extraordinaires, et ceux qui préfèrent utiliser des personnages ancrés dans le quotidien et évitent "tout enchaînement d'événements qui paraîtrait exceptionnel". Le héros de roman peut donc être médiocre, "normal". On peut également se demander si le personnage de roman est toujours la raison pour laquelle le lecteur est poussé vers la lecture.
Les héros médiocres peuvent-ils attirer le lecteur ? Est-ce que l'histoire ou l'écriture de l'auteur n'a pas aussi de l'importance ?
Pour répondre à ces questions, il convient d'abord de définir le statut du héros exceptionnel, avant de voir comment certains courants littéraires ont redéfini le personnage comme normal et banal, puis de conclure sur l'importance de l'intrigue et de l'écriture.

I

L'intérêt du lecteur pour le héros d'exception

A

L'attrait pour un destin incroyable

  • Le lecteur est attiré par le parcours héroïque et incroyable du personnage de roman. Ce dernier connaît des aventures étonnantes. C'est le cas des chevaliers dans les romans du Moyen Âge, comme par exemple Lancelot.
  • Le lecteur se passionne pour l'évolution du héros qui devient remarquable. Par exemple, dans les romans Le Seigneur des anneaux, le hobbit Frodon se découvre courageux et vit des péripéties hors du commun. Il doit lutter contre les forces du mal et s'affirmer. Ce destin exceptionnel tient le lecteur en haleine.
  • Le personnage d'exception expérimente une vie que le lecteur ne connaît pas. Cela crée le désir et le suspense. Ainsi, les jeunes lecteurs adorent Harry Potter car ils aimeraient être élus, sauver le monde, se démarquer des autres et vivre dans un monde magique. Le destin incroyable des héros d'exception permet de faire rêver.
B

La fascination pour une personnalité hors norme

  • Le lecteur aime les héros d'exception car leur personnalité hors norme intrigue. En effet, c'est souvent un être doté de hautes qualités, il impressionne et le lecteur le voit comme un modèle. Ainsi, dans La Princesse de Clèves l'héroïne se montre profondément vertueuse et refuse de laisser sa passion la faire commettre l'adultère. On peut également citer Jean Valjean dans Les Misérables, ancien voleur qui devient profondément bon et louable au cours du roman.
  • Surtout, le héros d'exception est courageux et valeureux. Souvent, il est capable de se battre contre des personnages profondément mauvais et d'en sortir vainqueur. On retrouve cette idée dans les premiers récits de l'Antiquité, l'Iliade et l'Odyssée. Des personnages comme Achille ou encore Ulysse sont braves et sortent victorieux de nombreux combats.

Si les héros d'exception fascinent et font rêver, ils ne permettent pas d'aborder toutes les caractéristiques humaines. Ils sont trop marqués par la grandeur. L'identification au personnage est possible quand les héros sont moins idéalisés. Certains romanciers ont donc choisi de faire le portrait de héros plus terre-à-terre, médiocres parfois, qui permettent au lecteur de réfléchir sur lui-même et sur l'Homme en général.

II

Le plaisir de découvrir l'Homme à travers le héros ordinaire

A

Les personnages réalistes et les anthihéros pour comprendre le monde

  • Avec le réalisme et le naturalisme, les écrivains tentent de décrire plus précisément les personnages. Les caractères deviennent plus complexes. Les auteurs affirment que personne n'est vraiment héroïque, vraiment parfait. Zola et Balzac estiment ainsi qu'être héroïque est caricatural. Ils veulent créer des personnages de manière objective.
  • Le lecteur découvre des personnages qui sont complexes. Ils ne sont plus parfaits même si ce sont des héros. Julien Sorel dans Le Rouge et le Noir a de grandes qualités, il est beau et intelligent. Toutefois, il est également ambitieux et prêt à tout pour réussir.
  • Le lecteur peut également avoir plaisir à suivre l'évolution d'antihéros, des personnages qui sont lâches ou mauvais. C'est par exemple le cas de George Duroy dans Bel-Ami de Maupassant, ou encore de la marquise de Merteuil dans Les Liaisons dangereuses de Choderlos de Laclos.
B

Le personnage absurde pour réfléchir à la condition humaine

  • À partir du XXe siècle, le mouvement de l'absurde se développe. Il convient alors de montrer des personnages en prise avec un monde qui n'a plus aucun sens. Le personnage sert de moyen, d'outil pour traiter de la condition humaine. C'est le cas de Roquentin dans La Nausée de Jean-Paul Sartre, il n'a jamais rien fait d'exceptionnel, il pousse ainsi le lecteur à se demander ce que signifie l'existence humaine.
  • Le lecteur découvre l'étrangeté du monde à travers des personnages absurdes. Meursault dans L'Étranger de Camus tue "l'Arabe" sans savoir bien pourquoi. Avant le meurtre, il mène une vie sans intérêt. Il n'a pas de sentiments, il vit en décalé, il semble presque inhumain. Il est difficile pour le lecteur de s'identifier au personnage mais cela l'entraîne à la réflexion.

Si la rencontre avec les personnages, exceptionnels ou non, est essentielle, le plaisir de la lecture ne vient pas seulement des êtres de papier mais également de l'histoire ou du style de l'auteur.

III

L'importance de l'histoire et du style

A

Le plaisir de la fiction

  • Le lecteur lit des romans pour être entraîné dans la fiction, découvrir un univers différent. Le roman peut faire oublier les soucis, permettre d'échapper au réel. C'est un moment d'évasion. Flaubert dénonce d'ailleurs cette caractéristique de la fiction dans Madame Bovary, avec Emma qui ne cesse de lire pour échapper à la réalité de l'amour.
  • Le roman policier, le roman d'aventures, le roman de gare ou à l'eau de rose ne sont pas des romans très littéraires. Ils dénoncent rarement quoique ce soit, mais leur succès est symptomatique du besoin du lecteur de rêver. La lecture, c'est aussi passer un moment agréable.
  • On voit que le roman plaît au lecteur pour différentes raisons, et notamment pour son histoire, pour sa capacité à faire sortir de l'ordinaire, à faire rêver.
B

La découverte d'une écriture

  • Un roman peut plaire au lecteur en raison du style de l'auteur, c'est-à-dire de la façon dont l'écrivain joue avec les mots, les sonorités, la syntaxe. L'émotion ou le plaisir suscités par une lecture peuvent venir du choix des termes, du rythme. Ainsi, un texte de Victor Hugo est très différent d'un texte de Marguerite Duras. L'écriture romantique est foisonnante, pleine d'images. L'écriture du XXe de Duras est plus simple, presque "impersonnelle".
  • Certains lecteurs recherchent d'abord un style en lisant. Ils s'intéressent par exemple aux écrivains défendant l'art pour l'art pour qui le texte est plus important que l'histoire ou les personnages. C'est le cas de Théophile Gautier.
  • Le plaisir de la lecture vient donc aussi du talent de l'écrivain, de son style, de son écriture. Tout le monde ne devient pas écrivain. Les histoires ou les personnages ne suffisent pas. Il faut avoir le talent pour les raconter ou les inventer.

Le plaisir de lire un roman tient donc à la possibilité d'y rencontrer des personnages d'exception. Certains romans, comme les romans d'aventures, les romans du Moyen Âge ou les romans romantiques, sont caractérisés par des personnages qui sortent de l'ordinaire, qui sont incroyables, dotés de qualités hors du commun (beauté, intelligence, ruse, etc.). Ils rencontrent des aventures ou des destins héroïques. Ils permettent de faire rêver le lecteur, de l'aider à oublier la réalité.
Mais le lecteur peut aussi apprécier de rencontrer des personnages peu héroïques. Il peut se plonger dans des romans naturalistes ou réalistes, qui choisissent de mettre en avant des personnages médiocres, ou tout simplement normaux. Le lecteur suit alors les aventures de personnages pauvres, complexes, qui commettent des erreurs, qui sont parfois capables du pire.
Enfin, le lecteur peut lire pour une raison autre que celle de rencontrer un personnage. Il peut apprécier l'histoire, les aventures, mais aussi la réflexion que certains romans procurent. La lecture s'accompagne aussi d'un certain amour de la langue, et donc d'une rencontre avec un style particulier.

La charte éditoriale garantit la conformité des contenus aux programmes officiels de l'Éducation nationale. en savoir plus

Les cours et exercices sont rédigés par l'équipe éditoriale de Kartable, composéee de professeurs certififés et agrégés. en savoir plus

Voir aussi
  • Cours : Le personnage de roman
  • Quiz : Le personnage de roman
  • Définitions : Le personnage de roman
  • Procédés littéraires : Le personnage de roman
  • Exercice fondamental : Les éléments qui permettent de révéler la personnalité d'un personnage
  • Exercice fondamental : Distinguer héros et anti-héros
  • Exercice fondamental : Interpréter le physique des personnages
  • Exercice fondamental : Distinguer portrait laudatif et portrait péjoratif
  • Exercice fondamental : Etudier le discours d'un personnage
  • Exercice fondamental : Repérer la focalisation
  • Exercice fondamental : Déterminer la fonction d'un personnage
  • Question sur corpus type bac : La toute-puissance des personnages principaux
  • Question sur corpus type bac : L'intérêt des scènes de bataille
  • Question sur corpus type bac : Les caractéristiques du personnage principal
  • Question sur corpus type bac : Les caractéristiques des figures maternelles
  • Question sur corpus type bac : Le regard des personnages sur le monde, révélateur d'un état d'âme
  • Question sur corpus type bac : La fonction du miroir
  • Dissertation type bac : Les récits de combat ont-il pour objectif de créer des figures héroïques ?
  • Dissertation type bac : Un personnage de roman ne se construit-il qu'à partir des scènes d'action ?
  • Dissertation type bac : Un romancier doit-il faire de ses personnages des êtres extraordinaires ?
  • Dissertation type bac : Attendez-vous d'un roman qu'il vous plonge dans les pensées d'un personnage ?
  • Dissertation type bac : Les personnages comme reflet de ce que l'on est ou aimerait être
  • Commentaire type bac : Victor Hugo, Les Misérables (2014)
  • Commentaire type bac : Fénelon, Les Aventures de Télémaque
  • Commentaire type bac : Alexandre Dumas, Les Trois Mousquetaires
  • Commentaire type bac : Jean Giono, Un roi sans divertissement
  • Commentaire type bac : Stendhal, La Chartreuse de Parme
  • Invention type bac : Ecrire un monologue de Monsieur de Villefort
  • Invention type bac : Raconter un combat
  • Invention type bac : Raconter un récit de Georges Duroy
  • Invention type bac : Etablir le portrait extraordinaire d'un être ordinaire
  • Invention type bac : Observer un lieu par la fenêtre
  • Invention type bac : Décrire une personne se regardant dans le miroir

Nos conseillers pédagogiques sont à votre écoute 7j/7

Nos experts chevronnés sont joignables par téléphone et par e-mail pour répondre à toutes vos questions.
Pour comprendre nos services, trouver le bon accompagnement ou simplement souscrire à une offre, n'hésitez pas à les solliciter.

support@kartable.fr
01 76 38 08 47

Téléchargez l'application

Logo application Kartable
KartableWeb, iOS, AndroidÉducation

4,5 / 5  sur  20264  avis

0.00
app androidapp ios
  • Contact
  • Aide
  • Livres
  • Mentions légales
  • Recrutement

© Kartable 2025