Comment naît et évolue le mythe résistancialiste en France depuis 1945 ?
Quelles sont les deux causes du résistancialisme ?
En quelle année le transfert des cendres de Jean Moulin au Panthéon a-t-il lieu ?
Comment se caractérise le résistancialisme ?
Quel parti politique se présente comme "le parti des 75 000 fusillés" ?
Quel auteur défend la thèse du "glaive et du bouclier" ?
Le résistancialisme est un néologisme formé par l'historien Henry Rousso en 1987 pour qualifier l'idée d'une France unanimement résistante. Alors que tous les Français n'ont pas été résistants, ce mythe est pourtant né et a évolué.
Le résistancialisme, né alors que beaucoup de Français n'ont pas été résistants voire ont collaboré avec l'ennemi, élimine les aspects sombres de l'histoire de la France durant la guerre. Sous l'Occupation, les Français sont divisés. Après la défaite de 1940, le maréchal Pétain, chef du régime de Vichy, collabore avec l'occupant nazi, ce que symbolise la poignée de main entre Pétain et Hitler à Montoire le 24 octobre 1940. La plupart des 42 millions de Français subissent et attendent la fin des "années noires". Certains collaborent activement (55 000 Français se sont engagés dans les forces de Vichy ou les forces allemandes). D'autres entrent dans la Résistance (203 000 Français ont reçu une carte de Combattant de la Résistance).
La nécessité de reconstruire une cohésion morale dans le cadre de la reconstruction nationale explique la naissance du mythe d'une France résistante. Toutes les forces politiques, notamment les gaullistes et les communistes, font une lecture héroïque de cette période. La mémoire officielle aborde peu les crimes du régime de Vichy, en particulier la participation active de l'administration française à la déportation des Juifs de France. Toute la France est présentée comme résistante.
Ce mythe connaît son apogée durant les années 1960 ; il est alors mis en scène de différentes façons. Le retour de De Gaulle au pouvoir en 1958 marque l'apothéose de ce résistancialisme. L'exaltation d'une France unie dans le combat contre le nazisme s'inscrit aussi dans la volonté de surmonter les difficultés de la guerre d'Algérie (1954-1962). En 1960, le mémorial de la France combattante est inauguré. La cérémonie de transfert des cendres de Jean Moulin (unificateur des forces résistantes) au Panthéon en 1964 représente le paroxysme de cette politique mémorielle. Diffusée en direct à la radio, elle permet de célébrer l'unité de la France combattante. Le concours national de la Résistance est créé la même année. Le résistancialisme fait jour aussi dans la culture populaire, dans des films tels que La Bataille du rail de René Clément ou La Grande Vadrouille de Gérard Oury.
Mais dès le début des années 1970, le mythe s'effondre sous les coups de travaux des historiens et l'affirmation de la mémoire juive. Dès 1969, le film documentaire Le Chagrin et la Pitié décrit des Français fortement pétainistes et surtout occupés à survivre. La France de Vichy, de l'historien américain Robert Paxton (1972 et version française en 1973), montre les liens étroits entre Vichy et l'Allemagne nazie. La thèse du glaive et du bouclier s'effondre peu à peu.
De son côté, la mémoire juive s'affirme. En 1961, le procès d'Adolf Eichmann en Israël libère la parole des survivants. Témoigner est une nécessité quand les négationnistes commencent à s'exprimer dans les médias. En 1985, le film Shoah, de Claude Lanzmann, est une longue enquête constituée de témoignages de rescapés et de bourreaux qui décrit le fonctionnement précis de ce que l'historien américain Raul Hilberg appelle "la destruction des Juifs d'Europe" (1985).
- Tous les Français n'ont pas été résistants.
- Le résistancialisme s'explique par la volonté de garantir la cohésion nationale.
- Le résistancialisme connaît son apogée dans les années 1960.