Qu'appelle-t-on la catharsis ? Illustrer par des exemples.
Quelle idée caractérise le mieux la catharsis ?
Pourquoi la catharsis est-elle utile au niveau social ?
Que fait Cléopâtre dans Rodogune ?
Que permet la catharsis avant tout ?
Quel est le vice d'Harpagon dans L'Avare de Molière ?
Au XVIIe siècle, les dramaturges reprennent une notion antique essentielle pour justifier la portée morale du théâtre : ils empruntent à Aristote l'idée de "catharsis" afin d'expliquer les effets de la représentation dramatique sur le spectateur. On verra que l'enjeu de la représentation théâtrale est la purification des émotions du spectateur.
Tout d'abord, la catharsis désigne un phénomène de "purge" des passions, de libération des émotions. Les spectateurs du théâtre sont confrontés à la représentation d'émotions intenses dont ils se trouvent libérés, "purifiés". C'est tout particulièrement le cas pour la tragédie qui cherche à susciter des effets de terreur, d'effroi et de pitié pour des personnages en proie à l'hybris, victime de la fatalité et du destin. Par la représentation sur scène de passions destructrices, le dramaturge cherche à amener le public à évacuer ses propres pulsions et fantasmes qui ne trouvent pas à s'exprimer dans la vie de tous les jours, qui troubleraient l'ordre et l'harmonie sociale. Le spectacle tragique induit un effet de mise à distance, de recul, notamment au cours des monologues qui mettent en scène des personnages face à eux-mêmes, à leurs contradictions, à leurs conflits intérieurs : la fonction introspective du monologue théâtral doit amener le spectateur, en même temps que le personnage, à faire preuve de lucidité sur lui-même et à refuser de faire les mêmes choix destructeurs. Ainsi, le personnage de Cléopâtre, dans la pièce de Corneille, Rodogune, exprime dans son monologue la haine et la rage qui la dévorent et la conduisent à commettre l'irréparable, un infanticide au nom de sa jalousie et de son ambition. Au travers de l'expression du personnage, le dramaturge invite le spectateur à évacuer l'intensité et la fureur liées à ses sentiments négatifs afin d'éviter le destin du personnage représenté sur scène. Cette catharsis passe par un rire libérateur, moqueur dans la comédie : le personnage caricatural, qui se laisse dominer par ses passions ou ses vices, donne au spectateur l'occasion d'expérimenter des sentiments tels que la jalousie, la possessivité, l'envie, jusqu'à leurs débordements les plus extrêmes. Des personnages comme Harpagon dans L'Avare ou Arnolphe dans L'École des Femmes offrent des exemples de démesure des penchants pour inciter le spectateur à la réflexion.
On voit donc que le fait de reprendre des figures antiques ou des stéréotypes comiques, dont les spectateurs de l'époque connaissent ou devinent l'histoire, ne vise pas à provoquer un suspense, un intérêt lié à une histoire que l'on découvre : au contraire, la représentation théâtrale consiste plutôt dans le retardement d'un dénouement connu, attendu, fatal pour la tragédie, heureux pour la comédie. Ce retardement passe par l'alternance de moments où les personnages dévoilent leurs dilemmes intérieurs face à des situations sans issue. L'objectif est moins de susciter la curiosité du spectateur que de l'amener à l'introspection et à la catharsis. À travers des personnages en proie à des sentiments violents, le dramaturge tente de nous faire expérimenter, par procuration, des conflits intérieurs déchirants afin de mieux nous en dégoûter. La violence montrée sur scène vise à produire un effet de défouloir, d'exutoire pour le spectateur afin qu'il se libère et ne ressente plus le besoin de se désinhiber dans la vie de tous les jours.
- La catharsis est définie par Aristote comme une purge, une libération des émotions négatives face au spectacle de passions destructrices.
- Face à la représentation des conflits intérieurs des personnages comiques et tragiques, le spectateur est invité à évacuer des pulsions et fantasmes qui n'ont pas leur place dans la société.