On donne le portait suivant extrait de la nouvelle "Le Chef-d'œuvre inconnu" d'Honoré de Balzac :
Un vieillard vint à monter l'escalier. À la bizarrerie de son costume, à la magnificence de son rabat de dentelle, à la prépondérante sécurité de la démarche, le jeune homme devina dans ce personnage ou le protecteur ou l'ami du peintre ; il se recula sur le palier pour lui faire place, et l'examina curieusement, espérant trouver en lui la bonne nature d'un artiste ou le caractère serviable des gens qui aiment les arts ; mais il aperçut quelque chose de diabolique dans cette figure, et surtout ce je ne sais quoi qui affriande les artistes. Imaginez un front chauve, bombé, proéminent, retombant en saillie sur un petit nez écrasé, retroussé du bout comme celui de Rabelais ou de Socrate ; une bouche rieuse et ridée, un menton court, fièrement relevé, garni d'une barbe grise taillée en pointe, des yeux vert de mer ternis en apparence par l'âge, mais qui par le contraste du blanc nacré dans lequel flottait la prunelle devaient parfois jeter des regards magnétiques au fort de la colère ou de l'enthousiasme. Le visage était d'ailleurs singulièrement flétri par les fatigues de l'âge, et plus encore par ces pensées qui creusent également l'âme et le corps. Les yeux n'avaient plus de cils, et à peine voyait-on quelques traces de sourcils au-dessus de leurs arcades saillantes. Mettez cette tête sur un corps fluet et débile, entourez-la d'une dentelle étincelante de blancheur et travaillée comme une truelle à poisson, jetez sur le pourpoint noir du vieillard une lourde chaîne d'or, et vous aurez une image imparfaite de ce personnage auquel le jour faible de l'escalier prêtait encore une couleur fantastique.
Quels sont les éléments descriptifs positifs ?
Il ne semble pas y en avoir, à l'exception de la richesse, de la "magnificence" de son habit et l'assurance ("prépondérante sécurité") de sa démarche qui inspirent, dans un tout premier temps, du respect au jeune homme.
Balzac compare également l'homme à deux grands esprits, Rabelais et Socrate, ce qui tend à le valoriser.
L'apparente richesse du peintre et la comparaison à deux grands hommes sont des éléments descriptifs positifs.
Quels sont les éléments descriptifs négatifs ?
- Le portrait du vieillard dégage une impression d'étrangeté inquiétante ("bizarrerie", "curieusement", "singulièrement", "magnétique", "une couleur fantastique", etc.), aux limites du fantastique : on devine d'emblée un personnage négatif dans l'idée que son visage a quelque chose de "diabolique".
- La description physique donne à voir un personnage très laid, au "front chauve, bombé, proéminent, retombant en saillie sur un petit nez écrasé".
- Son corps "fluet et débile" est marqué par la vieillesse et le contraste avec son riche habit crée une impression de ridicule, de grotesque.
- Ce portrait physique laisse deviner des caractéristiques morales inquiétantes, d'emportement (colère ou enthousiasme) ou de pensées qui ont "flétri" son visage.
Le physique de ce vieillard malveillant et l'impression d'inquiétude qui s'en dégage sont des éléments descriptifs négatifs.
S'agit-il d'un portrait laudatif, péjoratif, neutre ou équilibré ?
- Les éléments, physiques et moraux, négatifs annulent la première impression positive qu'avait créée l'apparente richesse du personnage.
- La description, en focalisation interne, laisse une impression inquiétante chez le personnage qui le croise.
Il s'agit d'un portrait péjoratif.