Marie
Vous y dansiez petite fille
Y danserez-vous mère-grand
C'est la maclotte qui sautille
Toute les cloches sonneront
Quand donc reviendrez-vous Marie
Les masques sont silencieux
Et la musique est si lointaine
Qu'elle semble venir des cieux
Oui je veux vous aimer mais vous aimer à peine
Et mon mal est délicieux
Les brebis s'en vont dans la neige
Flocons de laine et ceux d'argent
Des soldats passent et que n'ai-je
Un cœur à moi ce cœur changeant
Changeant et puis encor que sais-je
Sais-je où s'en iront tes cheveux
Crépus comme mer qui moutonne
Sais-je où s'en iront tes cheveux
Et tes mains feuilles de l'automne
Que jonchent aussi nos aveux
Je passais au bord de la Seine
Un livre ancien sous le bras
Le fleuve est pareil à ma peine
Il s'écoule et ne tarit pas
Quand donc finira la semaine
Guillaume Apollinaire
Alcools
1912
La femme aimée
- Marie est la femme aimée dans le poème.
Apollinaire a été avec deux femmes nommées Marie. Le poème peut être pour l'une d'elle.
Marie peut aussi représenter la femme dans l'absolu, c'est notamment le prénom de la Vierge Marie. - Quelques mentions sont faites des mains de la femme. On peut noter la métaphore avec les mains qui sont des "feuilles d'automne", qui véhicule l'idée du passé.
- Une seule description est faite de ses cheveux. Le terme est mentionné deux fois, dans la quatrième strophe.
- L'évocation de la femme aimée est vague. Le poème se concentre sur quelque chose de mélancolique lié au passé.
La destinataire
- L'énonciation du poème montre que le poète s'adresse à la femme aimée.
- Le "vous" respectueux est répété trois fois dans le poème.
- On peut relever une adresse directe avec la présence du prénom "Marie".
- La quatrième strophe fait intervenir un changement. La distance entre le poète et Marie n'est plus la même, il y a des souvenirs partagés.
Le poète utilise la deuxième personne du singulier, et le possessif "tes" est répété trois fois.
L'amour malheureux
- Ce poème traite de l'amour malheureux.
- Le poète est impatient. Il se tourmente, il veut savoir quand reviendra la femme aimée.
- Les conjonctions de coordination "donc" et "mais" laissent entendre que le poète se tourmente mais tente de comprendre.
- Les termes "aimer" et "mais" sont proches.
- On peut percevoir la souffrance du poète qui associe les termes "mal" et "délicieux". C'est une antithèse, on trouve du plaisir dans la douleur.
- Dans la dernière strophe, le désespoir arrive. Il n'est plus simplement question de la tristesse liée à la séparation, c'est la mélancolie, le mal de vivre qui se manifestent.
Le spectre de la douleur s'élargit.
Le temps
- On peut remarquer un mélange des temps : présent, passé et futur. Le poète semble perdu.
- Il y a une imprécision du temps qui montre la difficulté du poète à accepter les choses.
- Le groupe nominal "les flocons" renvoie à l'idée de la mort.
- On peut noter l'idée de l'eau qui coule inexorablement avec le "fleuve".
- L'inconstance vient avec le temps, rien n'est permanent : "cœur changeant".
- Il ne reste que des souvenirs, que le poète évoque : les fêtes, les cheveux, les masques et la musique.
La musique
- La musique est présente dès la première strophe. On trouve les termes "danse", "maclotte" et "cloche".
- Le rythme des premiers vers imite le rythme de la maclotte.
Le son de la cloche est mimé par des allitérations en dentales en [d] et [t] et des assonances en [o]. - Puis, la musique disparaît petit à petit, le poète l'entend moins.
- Le poème s'apparente ensuite à une chanson populaire. Il y a des répétitions comme "sais-je" qui rappellent un refrain.
- Le vocabulaire utilisé est courant et populaire avec "mère-grand".
- Il faut noter la musicalité des mots, avec des rimes en "je", des répétitions de "cœur", et le terme "changeant".
- On peut remarquer la rime riche : "neige"/ "n'ai-je".
- La musique est triste et mélancolique.
Comment ce poème traite-t-il de l'amour ?
I. Marie, la femme aimée
II. L'amour malheureux
III. Un poème mélancolique
Quels thèmes le poète aborde-t-il ?
I. L'amour malheureux
II. Le temps qui passe
III. La mélancolie
En quoi ce poème est-il original ?
I. Un langage simple
II. Le jeu sur les sonorités
III. Une chanson populaire