Sommaire
IUne tragédie teintée d'humourALa fatalitéBLe comique de la pièceIILe conflit des générationsAEn quête d'absoluBL'idéalisation de la mortIIIAntigone, une figure de la résistanceJean Anouilh
1946
Antigone est une pièce inspirée de Sophocle. Antigone est la fille d'Œdipe. Elle refuse d'abandonner le corps de son frère sans sépulture. Plusieurs fois, elle va ensevelir son corps, défiant la loi du roi, Créon, qui est aussi son oncle. Elle est bientôt arrêtée par les gardes et amenée devant lui.
Créon, qui est très attaché à Antigone, essaie de la persuader d'arrêter. Il tente de lui prouver qu'elle a une belle vie devant elle. Il assure qu'il n'a rien contre Polynice, qu'il le laisse sans sépulture pour l'exemple, que cela aurait pu être Étéocle. Il révèle des secrets de famille à Antigone. Il veut la faire flancher, qu'elle accepte la réalité. Il lui parle de son fiancé Hémon, qui est aussi son fils.
Cependant, Antigone résiste et s'oppose à son oncle. Elle ne le fait pas simplement pour son frère mais également pour elle. Elle défie l'ordre du roi, elle défie l'ordre des hommes, surtout elle défie la vie comme elle est. Elle veut de l'espoir, elle veut l'absolu. Elle ne peut se contenter de ce que propose Créon.
Il la condamne alors à être emmurée vivante. Elle se pend dans son tombeau. Hémon, qui a supplié son père de sauver Antigone, se poignarde. Eurydice, la femme de Créon, se tranche la gorge. Le roi se retrouve seul à la fin de la pièce.
Une tragédie teintée d'humour
La fatalité
Dès le début de la pièce, avec le prologue, la fatalité est présente. L'acteur qui joue le prologue, c'est-à-dire la personne intermédiaire entre les personnages et les spectateurs, explique que c'est une tragédie qui va être jouée devant nous. Il explique bien que les personnages n'ont pas le choix. Comme dans la tragédie antique (dont Anouilh s'inspire), les dieux pèsent sur la pièce. Antigone semble touchée par la prophétie de son père. Les enfants d'Œdipe continuent de mourir pour son crime (il a tué son père et épousé sa mère).
Le spectateur sait qui va mourir. Il n'y a pas d'espoir, il n'y a pas de "suspense" non plus. C'est la mort qui attend la plupart des personnages. Ils ne peuvent rien contre, les spectateurs non plus.
Le comique de la pièce
Bien que la pièce soit profondément tragique, elle a aussi un aspect comique. Les personnages de la noblesse, Créon, Antigone, Ismène et Hémon sont résolument tragiques, ils parlent bien, ils s’intéressent à de grandes idées, mais ils ne sont pas les seuls sur scène.
Comme dans les pièces de Shakespeare, Anouilh met en scène des personnages comiques qui permettent de relâcher la tension. Les soldats qui doivent garder le corps de Polynice sont des hommes rustres, qui parlent mal, qui se préoccupent de leurs petites vies et pas de la Cité ou de grandes idées. Anouilh montre ainsi que le monde n’est ni tout blanc ni tout noir.
Le conflit des générations
En quête d'absolu
Antigone symbolise la révolte de la jeunesse. Elle refuse d’accepter les règles, elle refuse de mener la même vie que tout le monde. Bientôt, Créon la persuade que ses raisons politiques pour se dresser contre lui ne sont pas bonnes. Mais elle en trouve d’autres.
Elle fait comprendre à son oncle qu’elle ne veut pas grandir, qu’elle ne veut pas épouser Hémon si un jour il devient comme son père. Elle rejette l’hypocrisie de son oncle, l’hypocrisie du monde autour d’elle. Elle veut l’absolu, que tout soit beau, que tout soit vrai, que tout soit très fort.
La pièce illustre donc le conflit des générations. La jeunesse est exaltée. Pour Anouilh, elle représente l’intégrité et la liberté.
L'idéalisation de la mort
Pour autant, Anouilh ne s'oppose pas à Créon. Si Antigone est une figure positive, elle est aussi égoïste. Créon veut le bien de ceux qui l'entourent. Antigone ne pense qu'à elle.
Quand Créon parvient à lui montrer que toutes ses raisons pour mourir sont inutiles, Antigone continue de vouloir la mort. On peut supposer qu'elle souhaite mourir plutôt que vivre. Elle ne veut même pas essayer. Dès le début, Antigone est déjà morte, elle a déjà choisi. Elle idéalise la mort.
Quel sera-t-il, mon bonheur ? Quelle femme heureuse deviendra-t-elle, la petite Antigone ? Quelles pauvretés faudra-t-il qu'elle fasse elle aussi, jour par jour, pour arracher avec ses dents son petit lambeau de bonheur ? Dites, à qui devra-t-elle mentir, à qui sourire, à qui se vendre ? Qui devra-t-elle laisser mourir en détournant le regard ?
Jean Anouilh
Antigone
1946
Les questions sont ici des questions de rhétorique. Antigone connaît en effet déjà les réponses à ces questions (ou se persuade qu'elle les connaît). Elle affirme ici sa volonté d'une vie parfaite, absolue. Comme elle a conscience que cela est impossible, elle préfère la mort.
Antigone, une figure de la résistance
La pièce est écrite juste après la Seconde Guerre mondiale. Jean Anouilh fait de son héroïne une jeune femme révoltée, une résistante. Elle se dresse contre le pouvoir de son oncle, Créon. Alors qu’il est interdit d’enterrer Polynice, elle le fait. Puis elle recommence, encore et encore, malgré les avertissements.
Bientôt, sa sœur Ismène elle-même décide qu’elle va le faire également. Antigone dit d’ailleurs à Créon qu’elle criera, qu’elle hurlera, qu’elle n’arrêtera qu’en mourant. Elle se dresse contre un état tyrannique.