Défense et illustration de la langue française
Joachim Du Bellay
1549
Défense et illustration de la langue française est un manifeste, c'est-à-dire un texte qui explicite la conception de la littérature d'un mouvement littéraire. Le groupe littéraire dont Du Bellay expose l'esthétique est la Brigade, qui deviendra la Pléiade. Du Bellay développe ici quatre grandes idées pour renouveler la langue française. Il veut qu'on lui accorde une plus grande place. Il pense qu'il faut l'utiliser dans les œuvres scientifiques ou littéraires pour l'enrichir (à l'époque les textes sont publiés en latin).
Il souligne également l'importance de créer des néologismes, des mots nouveaux. Il propose de réutiliser d'anciens mots français, des mots existants dans d'autres langues du royaume (la langue d'oc), ou des mots de dialectes provinciaux (le picard). Il avance même qu'on peut utiliser des mots étrangers.
Outre des idées pour renouveler la langue, Du Bellay insiste sur l'importance de créer une nouvelle poésie. Il faut s'inspirer de la poésie de l'Antiquité grecque ou romaine. Du Bellay juge sévèrement la poésie du Moyen Âge. Il pousse les écrivains à employer des figures de rhétorique (la métaphore, l'allégorie, la périphrase).
Du Bellay donne des conseils au poète. Il faut beaucoup travailler son poème (versification, sonorité, rimes, longueurs des vers). Il pousse également à l'adoption de nouveaux genres poétiques (élégie, épîtres, ode, sonnet...)
Les interlocuteurs
Du Bellay est un poète engagé. Il s'implique dans son essai. Il répète plusieurs fois le pronom personnel "je" : "je veux", "je confesse". Il s'adresse à ses adversaires en les tenant à distance, utilisant des pronoms indéfinis comme "on", "ils" ou encore le terme "quelqu'un".
Du Bellay s'adresse aussi à l'homme qui veut être poète, lui prodiguant ses conseils. Il lui parle comme un maître qui s'adresserait à son élève, utilisant l'impératif : "sache", "lis et relis". Il parle avec amitié au futur poète, le rapprochant de lui, créant un lien entre eux.
Un manifeste
Défense et illustration de la langue française est considéré comme le manifeste des poètes de la Pléiade. Du Bellay veut réhabiliter la langue française. Il défend d'abord la langue, et propose ensuite des méthodes pour la rendre plus riche.
Le texte sert de préface au premier ouvrage poétique de Du Bellay, L'Olive et quelques autres oeuvres poétiques. La tonalité du texte est donc polémique, puisqu'il s'agit de défendre des idées, une certaine vision de la littérature. L'auteur propose une véritable réflexion théorique sur la poésie, et les poèmes qui suivent dans le recueil en sont l'illustration.
Pour une poésie nouvelle
Du Bellay méprise certaines pratiques poétiques. Il s'attaque particulièrement à la poésie du Moyen Âge, la qualifiant de termes dépréciatifs : "vieilles", "épiceries". Il développe l'idée d'une langue corrompue, impure, qu'il faut réhabiliter, transformer.
Du Bellay invite les poètes à s'inspirer des Anciens. Il pousse à imiter et reprendre les poètes grecs et latins. Il souligne l'importance du travail que le poète doit entreprendre avant de pouvoir écrire. Il évoque également les Muses, les déesses qui correspondent aux arts. Ce sont elles qui inspirent les artistes. Du Bellay rappelle que le poète a besoin de solitude et de silence pour trouver l'inspiration.
Une œuvre polémique
Du Bellay explique que la langue française est suffisamment belle pour être utilisée en poésie. Du Bellay s'oppose à ceux qui estiment que le français est une langue qui manque de beauté. Il répond qu'elle n'est pas irrégulière, il rappelle la façon dont les mots se déclinent, dont la conjugaison fonctionne. Il prouve que des grammairiens ont réussi à trouver des règles au français.
Du Bellay proclame l'égalité en douceur de la langue française et des langues antiques. Il assure qu'elle peut être poétique, le problème n'est pas qu'elle ne l'est pas, mais qu'elle n'a jamais été utilisée à sa juste valeur par des poètes de talent. Il faut de grands poètes pour magnifier la langue française. Le poète parvient donc à réfuter tous les arguments de ses adversaires et à conclure que le français est une belle langue poétique, riche, et qu'il faut simplement savoir la manier.