Sommaire
ILes sources et influencesIIUne peinture acerbeALe réalisme socialBUne critique de la religionIIILa perversionLa Religieuse
Denis Diderot
Marie Suzanne Simonin est une jeune fille de seize ans. Elle vit avec ses deux sœurs et ses parents. Lorsque ses sœurs sont en âge de se marier, on l'envoie au couvent pour des raisons financières. En effet, cela évite de diviser l'héritage en trois. Suzanne apprend que M.Simonin n'est pas son véritable père, et que sa mère veut réparer sa faute en l'envoyant au couvent. Elle est alors obligée de prononcer ses vœux de religieuse alors qu'elle ne veut pas. Elle rencontre la supérieure Madame de Moni au couvent de Sainte-Marie à Longchamp. Elle a de l'amitié et du respect pour cette femme croyante et dévouée. Mais elle meurt et la nouvelle supérieure, la mère Sainte-Christine, est particulièrement détestable. Elle la torture et l'humilie.
La jeune femme n'a pas la foi, elle ne supporte plus l'enfermement, mais elle ne peut sortir. Elle tente de rompre ses voeux, mais elle subit encore plus la colère la mère Sainte-Christine. Personne ne veut admettre qu'elle n'est pas faite pour cette vie.
Suzanne n'a qu'une alliée Sœur Ursule, mais elle meurt bientôt. Suzanne tombe malade. Son avocat, Monsieur Manouri, prend pitié d'elle et parvient à la faire transférer au couvent de Sainte-Eutrope.
La nouvelle supérieure adore Suzanne. Mais très vite, il devient évident qu'elle a du désir pour la jeune femme et tente d'abuser d'elle. Suzanne s'enfuit du couvent. Elle vit dans la clandestinité et devient lingère à Paris. La vie est dure mais elle est traitée avec plus d'humanité que jamais. Le roman se termine sur l'espoir de Suzanne d'être sauvée par le marquis de Croismare.
Les sources et influences
La Religieuse est née d'une mystification. Dans les années 1760, un marquis croit recevoir les lettres d'une femme qui s'est enfuie de son couvent. Elles sont en fait écrites par Denis Diderot. Ce dernier décide d'en faire un roman. Entre 1780 et 1782, différents épisodes sont publiés en feuilleton.
L'histoire est inspirée de celle d'une religieuse de Longchamp nommé Marguerite Delamarre. Elle avait écrit à la justice, car elle avait été enfermée au couvent par ses parents. On peut parler de roman-mémoire, car la narration est rétrospective, et c'est la première personne "je" qui est utilisée.
Le roman se penche sur l'innocence d'une jeune femme qui est martyrisée par la religion, qui pourtant devrait protéger les innocents. Diderot entend surtout utilise l'idée de la Bible selon laquelle les enfants devront payer pour les crimes de leurs parents. Il rejette ce précepte et condamne les institutions religieuses.
Une peinture acerbe
Le réalisme social
Le roman est une protestation contre l'ordre social. Diderot condamne ici le pouvoir absolu du roi sur ses sujets, à travers la religion qui impose son ordre sur la religieuse, et les parents qui la forcent à obéir. Les mécanismes de la famille, de la religion, du pouvoir donc sont dénoncés.
Le crime dont traite le roman est celui d'exploiter les plus faibles. Diderot condamne aussi l'utilisation de la religion à des fins autres que religieuses. En effet, c'est pour des raisons financières que l'héroïne est enfermée. L'auteur dénonce une pratique sociale des aristocrates qui, quand ils n'avaient plus assez d'argent, envoyaient certains membres de leur famille en couvent, contre leur volonté.
Une critique de la religion
Le roman est une protestation contre une certaine conception mystique de l'Homme. Diderot s'oppose à la rédemption. Il ne croit pas que l'on peut expier ses crimes par la souffrance. Surtout, il pense qu'un innocent ne doit pas payer pour les crimes d'un parent.
Suzanne se sacrifie par devoir, par amour. Mais Diderot n'y voit pas de gloire ou de grandeur. Il trouve cela terrible et affreux. Il condamne ainsi la religion chrétienne qui a créé le mythe du salut. Il reconnaît l'authenticité de la vie spirituelle, mais pour lui elle n'est pas en adéquation avec la vie qui est menée par les religieuses dans les couvents.
La perversion
Le livre de Diderot a beaucoup choqué et a été condamné car il a été jugé pervers. Pourtant, Diderot dénonce la perversion. Elle est multiple dans le roman. C'est d'abord la perversion des sentiments naturels. La vie dans les couvents est montrée comme étant contre nature, puisqu'elle s'oppose à l'amour charnel, à l'amitié, à la chaleur humaine. La vie dans le couvent force l'homme à devenir asocial.
Cette vie transforme l'amour en haine, l'autorité en despotisme, la sympathie en jalousie. Diderot met aussi en scène la façon dont l'hystérie peut naître de l'enfermement. Les supérieures symbolisent des vices pervers, l'une étant violente physiquement et psychologiquement, l'autre tentant de profiter sexuellement de l'héroïne.