Sommaire
ILa place de l'auteurALes événements historiquesBL'effacement de l'écrivainCUn témoinIILes personnages : des allégoriesADe nombreux protagonistesBUn héros de roman d'apprentissageCDes personnages secondaires symboliquesIIILe romantisme contre le réalismeAL'amourBL'échecL'Éducation sentimentale
Gustave Flaubert
1869
Le roman se déroule en France en 1840, et suit l'histoire de Fréderic Moreau. Au début, c'est un jeune bachelier de dix-huit ans. Sur le bateau qui le ramène à sa ville natale, il aperçoit Madame Arnoux, femme de Jacques Arnoux. Il échange avec elle quelques mots et un regard, et tombe profondément amoureux d'elle. Cette rencontre va marquer sa vie.
Frédéric s'installe à Paris pour étudier le droit, il passe beaucoup de temps avec son ami Deslauriers. Ils discutent de politique, ils sont innocents, pleins de vie, pleins d'espoir et d'illusions. En décembre 1841, Frédéric assiste à une manifestation étudiante dans le Quartier latin. Il rencontre Hussonnet et Dussardier. Grâce à eux, il est introduit au journal d'Arnoux L'Art industriel. Un soir, lors d'un dîner chez les Arnoux, il revoit Madame Arnoux, et se sent plus troublé encore que lors de leur première rencontre
Il voit Madame Arnoux de plus en plus souvent lors de dîners mondains. Quand il ne la voit pas, il est déprimé et échoue à ses examens. Quand il la voit et qu'elle se confie à lui, il se sent mieux et travaille bien. Apprenant par sa mère que leur fortune est dilapidée, il reste trois ans en province mais un héritage lui permet de retourner vivre à Paris.
Frédéric est déçu lorsqu'il revoit Madame Arnoux. Il ne semble plus l'aimer comme autrefois et elle paraît distante. De plus, elle est à présent mère d'un petit garçon. Il rencontre alors Rosanette, la maîtresse d'Arnoux, lors d'un bal masqué. Il veut en faire son amante. Il prête également de l'argent à Arnoux et se dispute avec son ami Deslauriers à qui il a emprunté la somme. De nombreux déboires arrivent alors au jeune homme. Il doit de l'argent à plusieurs personnes, il se prépare à un duel (qui n'a pas lieu car son adversaire s'évanouit), il n'arrive pas à avouer son amour à Madame Arnoux.
Il finit par retourner en province et accepte d'épouser Mademoiselle Louise, mais finalement repart sur Paris pour déclarer sa flamme à Madame Arnoux. Les deux amoureux se voient plusieurs fois, mais le fils de la jeune femme tombe malade et elle décide de ne plus jamais revoir Frédéric. En effet, elle prend la convalescence de son enfant pour un avertissement divin. Désespéré, Frédéric devient l'amant de Rosanette. La révolution de 1848 éclate.
Frédéric écrit des articles révolutionnaires ce qui lui vaut le respect de ses amis. Il se lasse déjà de Rosanette et Madame d'Arnoux lui manque. Il apprend bientôt pourquoi elle n'est pas venue lors de leur dernier rendez-vous, et ils tombent dans les bras l'un de l'autre. Il veut alors se séparer de Rosanette mais il apprend qu'elle est enceinte. Désabusé, Frédéric devient l'amant de Madame Dambreuse afin qu'elle l'aide à monter socialement. Le bébé de Rosanette naît, mais il meurt peu de temps après. Frédéric semble soulagé, Rosanette est très malheureuse. Frédéric finit par se séparer de ses deux maîtresses, et veut à présent épouser Louise, mais elle est mariée à Deslauriers. Frédéric erre dans Paris, où la révolution est écrasée. C'en est fini de la liberté, nous sommes en 1851.
Seize ans plus tard, Frédéric revoit Madame Arnoux, désormais âgée. Ils parlent, s'avouent leur amour. Elle lui donne une mèche de ses cheveux. Il ne la reverra plus jamais. Frédéric retrouve son ami Deslauriers, que Louise a quitté. Ils se racontent leurs vies, leurs déboires amoureux, et se souviennent de leur jeunesse.
La place de l'auteur
Les événements historiques
Flaubert utilise des événements historiques marquants de son époque en arrière-plan de son roman. Ainsi, il déclare lui-même que son roman est une chronique de 1848. Voici quelques événements importants à retenir pour analyser le roman :
- Le roman commence en 1840, en pleine monarchie de Juillet. Louis-Philippe est au pouvoir. Frédéric arrive à Paris.
- La transition entre les deuxième et troisième parties du roman se fait en février 1848. C'est la révolution de Février et la naissance de la IIe République. C'est le rendez-vous manqué entre Frédéric et Madame Arnoux.
- Le roman se termine avec le coup d'État du 2 décembre 1851. C'est le Second Empire et la fin de la République. Frédéric quitte Madame Dambreuse et voit s'effondrer ses rêves de fortune.
L'effacement de l'écrivain
Le projet de Flaubert est de se faire invisible dans le roman. Il pense qu'à aucun moment le lecteur ne doit pouvoir déceler la présence de l'auteur. Pourtant, cet idéal d'effacement de l'écrivain n'est pas tout à fait possible. En effet, Flaubert assure qu'il a disparu au profit de son histoire et de ses personnages, mais le lecteur peut tout de même relever ses idées sur les événements dans son pays. Ainsi, l'ironie de l'écrivain n'échappe pas à la lecture du roman. On sent bien que l'auteur se moque parfois de son héros, de ses idéaux, de son innocence. Il est aussi très dur quand il s'agit de relater les déboires amoureux de Frédéric, qui est fort peu doué dans ce domaine.
Un témoin
Plus qu'un historien, Flaubert est un témoin de son époque. Il montre l'importance des journaux, et le climat politique dans lequel baigne la France avant 1848. Il brosse le portrait d'une jeunesse idéaliste qui rêve de liberté, de république. On suit ainsi les rêves des jeunes hommes qui veulent créer un journal d'idées.
Lorsque février 1848 arrive, Flaubert fait preuve de beaucoup d'ironie. Il montre bien qu'il s'agit presque d'une mascarade. Il y a un décalage très fort entre l'idée que Frédéric se fait de cette révolution, du peuple, et la réalité. Le peuple se livre à des actes de vandalisme, c'est une véritable émeute. On se bat pour de la bière.
Contrairement à l'historien qui relate des faits et tente de les expliquer, Flaubert présente d'abord la réalité des faits, désacralisant l'idée que l'on se fait de certains événements.
Les personnages : des allégories
De nombreux protagonistes
Il y a de très nombreux personnages dans ce roman. Chaque personnage représente une idée, un caractère. Ils sont, en quelque sorte, des symboles de leur époque, des représentants de l'Histoire, des outils pour mieux faire passer les idées de la révolution de 1848. Ils sont des échantillons des différents milieux sociaux du XIXe siècle, des différentes mentalités, des différentes opinions. Ils agissent en fonction de leur classe sociale, de leurs codes. Ils incarnent des mouvements politiques. On peut dire que Flaubert les utilise comme des allégories de sa société. Ce sont donc les acteurs de l'Histoire, plus que les faits, qui sont au cœur du livre.
Un héros de roman d'apprentissage
Frédéric Moreau est un héros de roman d'apprentissage. Il apprend de la vie. Au début du roman, il est tout jeune, il a dix-huit ans, il vient d'avoir son bac. C'est un jeune homme innocent, plein d'idéaux et de rêves. Il est nourri d'idées romantiques, et tombe amoureux de Madame Arnoux au premier regard. La pureté est une chose sacrée pour lui, il a donc du mal à trouver sa place dans une société fort corrompue et très loin de son idéal.
Mais Frédéric ne sait pas saisir les occasions. Il laisse tout passer, il n'a aucun sens des réalités. Il n'agit presque pas et, lorsqu'il le fait, il se trompe. Il hésite sans arrêt. Il est très passif, on peut dire que c'est un simple observateur. On a l'impression qu'il ne participe pas à l'histoire. Tout se déroule autour de lui et il est entraîné par les événements. À la fin, c'est un homme qui n'a pas su vivre pleinement, qui regrette sa jeunesse, profondément mélancolique. Il est passé à côté de sa vie.
Des personnages secondaires symboliques
Dussardier est le personnage le plus sympathique. Pour lui, la République est plus importante que tout, il se bat pour. Il meurt tué par Sénécal, un autre républicain, mettant fin au rêve d'une République unie et forte. Arnoux est le bourgeois parvenu qui cherche à s'enrichir et à vivre de ses plaisirs. Il représente la classe moyenne, c'est un républicain modéré. Sénécal est le républicain radical, il représente la tendance socialiste de 1848. C'est un personnage violent qui peut devenir dangereux.
Deslauriers est un personnage passionnel, le meilleur ami de Fréderic. Il est ambitieux et arriviste, contrairement à son ami. La République représente pour lui la possibilité d'assouvir tous ses désirs. Dambreuse représente la noblesse passée à l'industrie et à l'orléanisme, la monarchie de Juillet. Il symbolise le monde des affaires, le capitalisme. Il ne cesse de changer de bord politique.
Le romantisme contre le réalisme
L'amour
Madame Arnoux et Fréderic Moreau représentent l'amour platonique. Par amour pour elle, Frédéric ne se mariera jamais. En effet, il ne peut s'y résoudre quand il l'aime. Et, quand déçu, il veut épouser une femme, quelque chose l'en empêche (Madame Dambreuse le trahit, Louise épouse quelqu'un d'autre). À la fin, lorsque Madame Arnoux lui avoue son amour, il ne veut plus vraiment d'elle. C'est un amour qui ne peut vivre dans leurs esprits, que de façon idéale.
Les deux amants ne cessent de se chercher mais ne se trouvent jamais. Jeune, Frédéric ignore que Madame Arnoux l'aime. Plus tard, des malentendus les séparent. Et lorsque la vie les fait se retrouver, Madame Arnoux est trop vieille, Frédéric plus assez jeune pour avoir l'insouciance de ses vingt ans. C'est un amour avorté.
L'échec
Frédéric est le premier héros moderne. Il ne s'inscrit pas dans son époque, il n'est pas héroïque puisqu'il n'agit pas. Il est perpétuellement en situation d'échec. Il ne cesse de regarder en arrière, de rêver au passé. Il est en décalage. Tout ce qu'il entreprend se termine par un échec : la politique, la finance, les études, l'amour. Il est immobile alors que le monde autour de lui est en effervescence, en transformation. Il est lent, il est passif, il est ignorant. Son innocence au début est normale, mais elle devient une insouciance presque terrible vu le monde dans lequel il évolue. C'est un romantique qui se fait une fausse idée du réel, mais qui en même temps n'essaie jamais vraiment de vivre à la hauteur de ses idéaux.
Laissez-moi tranquille avec votre hideuse réalité ! Qu'est-ce que cela veut dire, la réalité ? Les uns voient noir, d'autres bleu, la multitude voit bête. Rien de moins naturel que Michel-Ange, rien de plus fort !
Flaubert
L'Éducation sentimentale
1869