Sommaire
IUn roman réalisteALes principes du réalismeBLes éléments autobiographiquesIIL'éducation sentimentaleAUne description lyrique du paysageBL'amour : entre idéal et réalitéIIIUn roman épistolaire ? La place du narrateurLe Lys dans la vallée
Honoré de Balzac
1836
Il s'agit d'un roman qui se lit comme une longue lettre. En effet, Félix, le narrateur, écrit à Natalie pour lui raconter son enfance et son grand amour. L'histoire d'amour est celle, platonique, entre Félix de Vandenesse et la comtesse Madame de Mortsauf, épouse du comte de Mortsauf. Félix relate son enfance malheureuse, jusqu'à sa rencontre avec Madame de Mortsauf, une femme qu'il compare à un ange. Elle devient une sorte de deuxième mère pour lui, et bientôt il en tombe amoureux.
Le comte est un homme dur et violent. Madame de Mortsauf, très pieuse, refuse de céder aux avances de Félix et se confesse régulièrement à l'abbé François Birotteau. Après plusieurs années d'une relation platonique, Félix se rend à Paris où il rencontre Lady Dudley. C'est une femme anglaise, et il découvre avec elle l'amour charnel. Les portes des salons parisiens s'ouvrent également à Félix. Madame de Mortsauf apprend la liaison de Félix. Elle meurt de chagrin.
Un roman réaliste
Les principes du réalisme
Balzac explique, dans son avant-propos de La Comédie humaine, qu'il entend faire une étude des espèces sociales. Il assure qu'il existe plusieurs catégories sociales, et qu'il faut les étudier pour mieux comprendre la société. Ses romans s'inscrivent donc dans une perspective historique et sociale, dans le sens où il entend montrer la réalité de sa société. Il peint donc la France sous la monarchie de Juillet. Il se dit "secrétaire de la Société française", puisqu'il veut faire "concurrence à l'état civil". En effet, son monde fictif est fait de personnages de plusieurs horizons sociaux de son époque. Il traite des différents problèmes de son temps.
Les éléments autobiographiques
Dans ce roman grandement autobiographique, Balzac a transposé sa liaison avec Laure de Berny, allant même jusqu'à emprunter des détails de sa vie privée. Tout comme Laure, Madame de Mortsauf souffre d'une maladie de cœur et ses enfants sont malades, particulièrement son fils. Laure de Berny a lu le roman de Balzac, quelques mois avant de mourir. L'auteur y écrit, à son attention, ces mots : "Elle fut non pas la bien-aimée, mais la plus aimée (...). Elle devint ce qu'était la Béatrix du poète Florentin, la Laure sans tache du poète vénitien, la mère des grandes pensées, la cause inconnue des résolutions qui sauvent, le soutien de l'avenir (...) Elle m'a donné cette constance à la Coligny pour vaincre les vainqueurs, pour renaître de la défaite, pour lasser les plus forts vainqueurs."
Le nom de la propriété où se déroule l'histoire, Frapesle, est celui de la demeure d'une amie de Balzac, Zulma Carraud. Le narrateur du roman, à bien des égards, est un double de Balzac. Il a la même enfance douloureuse et la même ambition, celle de devenir écrivain.
L'éducation sentimentale
Une description lyrique du paysage
Dans ce roman, Balzac entreprend de se pencher sur "la grande question du paysage en littérature". En effet, il se livre à de nombreuses descriptions poétiques de la région de la Touraine où se déroule l'histoire. Ces passages témoignent d'un réel souci stylistique de la part de l'auteur, qui entend recréer la topographie des paysages vallonnés. Les phrases sont souvent très longues, harmonieuses, et prouvent que l'auteur essaie ici véritablement d'utiliser les outils de la langue pour peindre un tableau. Il ne s'agit plus de raconter une histoire et il n'est plus question de réalisme, mais bien de lyrisme, de poésie, voire de romantisme. Ces très beaux paysages sont propices à la naissance de l'amour, ils rappellent la pureté et la beauté des premiers émois amoureux.
Combien de fois déjà n'étions-nous pas demeurés silencieux, occupés à regarder un effet de soleil dans la prairie, des nuées dans un ciel gris, les collines vaporeuses ou les tremblements de la lune dans les pierreries de la rivière, sans nous dire autre chose que : - La nuit est belle.
Balzac
Le Lys dans la vallée
1836
L'amour : entre idéal et réalité
Balzac traite d'un sujet très utilisé en littérature, celui de la femme mal mariée qui reste néanmoins fidèle à son époux. C'est la tension entre désir et vertu qui devient la trame principale de l'histoire. Les deux amants ne peuvent vivre leur amour physiquement, ils le vivent donc sur le plan spirituel. Cet amour devient idéal, puisqu'il est rêvé, pur, et platonique. Henriette devient une sainte, une femme qui résiste à la tentation.
Cependant, lorsqu'Henriette approche de la mort, elle se met à regretter de ne pas avoir connu le bonheur dans les bras de Félix. Elle jalouse Arabelle, qui a connu le jeune homme intimement. Si Félix aime croire qu'Henriette est une femme "pure" dans le sens "privée de désir charnel", il se trompe. La jeune femme avoue qu'elle voulait aussi vivre son amour avec lui "comme une femme". Le désir est donc toujours présent, et idéal d'un amour platonique et réalité du désir ne cessent de se mêler. Félix est d'ailleurs hypocrite : il voudrait qu'Henriette soit une sainte, et pouvoir lui vivre un amour charnel avec Arabelle. Il demande donc à la femme idéale ce que lui-même est incapable d'offrir : la chasteté.
Un roman épistolaire ? La place du narrateur
Le roman est écrit à la première personne, "je", et il s'agit d'une lettre. Cependant, il est difficile de parler de roman épistolaire. En effet, un roman épistolaire est écrit en général sous la forme de plusieurs lettres. Ici, il s'agit plutôt d'une longue confession adressée à une femme. Le narrateur raconte son passé, et les autres personnages n'interviennent pas, ne racontent pas leur point de vue, tout est vu à travers les yeux de Félix. Le lecteur se trouve dans la position du destinataire de la lettre : il lit la confession, il est plongé dans la tête du jeune homme.
À la fin du roman, il y a la réponse de Natalie de Manerville. Tout à coup, il y a un autre point de vue. Félix lui demande en fait de réunir les qualités de la sainte Henriette, morte pour lui, et de la charnelle Arabelle, qui a tout donné pour lui. Natalie rejette cette proposition, elle s'en offusque même, elle trouve l'histoire terrible.
Comment, cher comte ? vous avez eu pour votre début une adorable femme, une maîtresse parfaite qui songeait à votre fortune, qui vous a donné la pairie, qui vous aimait avec ivresse, qui ne vous demandait que d’être fidèle, et vous l’avez fait mourir de chagrin ; mais je ne sais rien de plus monstrueux.
Balzac
Le Lys dans la vallée
1836
Natalie refuse donc d'être "la Vierge de Clochegourde" et l'"intrépide Amazone". Elle met alors le lecteur dans une nouvelle position, comme si elle lui proposait de relire le roman depuis le début et d'adopter un regard critique. Félix devient alors un homme profondément égoïste, responsable de la mort de la femme qu'il dit avoir aimée, et coupable d'avoir utilisé Arabelle.